New Delhi (awp/afp) - Le Groupe ADP, gestionnaire des aéroports de Paris, espère commencer à récolter dans quatre ans les fruits de ses gros investissements en Inde, où le secteur aérien se développe à un rythme effréné.

Le pays compte 1,4 milliard d'âmes pour un PIB par habitant de 2.300 dollars, et veut doubler ce montant, espérant suivre la trace des "tigres" asiatiques.

"L'un des facteurs importants pour contribuer à cette croissance sera le secteur aérien et aéronautique", espère G.B.S. Raju, PDG de GMR Airports, émanation du groupe familial de BTP et d'énergie GMR, qui s'exprimait dans le cadre d'un voyage de presse organisé par ADP en Inde cette semaine.

C'est afin de profiter de ces vents porteurs qu'ADP, dont l'Etat français contrôle la majorité, a finalisé en 2020, en pleine crise du Covid-19, une acquisition à 1,2 milliard d'euros, prenant 49% de GMR Airports.

Cette entreprise gère plusieurs plateformes, dont Indira-Gandhi à New Delhi, Rajiv-Gandhi à Hyderabad (Etat du Telangana, sud) et Manohar à Mopa (Goa, sud-ouest).

Trois aéroports, captant au total le quart du trafic aérien indien actuel, mais surtout trois chantiers considérables.

Façades ocres et architecture intérieure rappelant l'historique influence portugaise sur cette région, celui de Goa, destiné à desservir une zone touristique de renommée mondiale, vient tout juste d'entrer en service, un investissement de 400 millions d'euros pour une capacité annuelle de 4,4 millions de passagers.

La plateforme n'accueille jusqu'ici que des vols intérieurs, mais plusieurs compagnies étrangères sont candidates à des créneaux: Qatar Airways et Oman Air... et Aeroflot, l'Inde n'ayant pas, contrairement à l'Union européenne entre autres, rompu les liens aériens avec Moscou après l'invasion de l'Ukraine.

A Hyderabad, 700 millions d'euros sont consacrés à l'extension de l'aéroport, pour pouvoir accueillir 40 millions de voyageurs d'ici à la fin de l'année contre 20 millions actuellement. Cette ambition est nourrie par l'existence de nombreuses industries dans la région, dont des usines pharmaceutiques, vectrices d'échanges avec le reste du pays, mais aussi l'étranger.

Effort de désendettement

Plus de 5.000 ouvriers ont oeuvré depuis trois ans à la construction de ces agrandissements. Cet aéroport désormais ultramoderne, situé à moins de deux heures de vol de l'ensemble des grandes villes de l'Inde, se rêve en "hub", une plateforme de correspondance.

GMR veut en développer les alentours, jusqu'ici surtout un lacis de voies poussiéreuses, pour accueillir des usines - le motoriste français d'avions Safran y est déjà implanté - mais aussi des activités commerciales et de loisirs.

Même grandes manoeuvres à New Delhi, à une échelle encore plus massive: de 70 millions de passagers, GMR veut faire passer la capacité de la principale plateforme aéroportuaire du pays à 100 millions - l'équivalent des trafics combinés des aéroports parisiens de Roissy et Orly, avant le Covid-19. Cela passe par la reconstruction d'un terminal et l'ouverture imminente d'une quatrième piste pour une facture totale de 1,2 milliard d'euros.

Autant d'investissements financés par l'emprunt, qui ont considérablement alourdi la dette de GMR Airports, même si celle-ci reste un secret bien gardé.

"Dans notre séquence de business plan, les dividendes, le cash, va survenir à partir de 2027-2028 sur GMR", explique Augustin de Romanet, PDG du Groupe ADP.

"L'objectif est de désendetter au plus vite GMR Airports pour qu'elle puisse nous servir de plateforme de développement", renchérit Philippe Pascal, le directeur financier d'ADP.

Il évoque "plusieurs méthodes" à cet effet, dont des cessions d'actifs - GMR a récemment vendu l'aéroport de Cebu aux Philippines - et une entrée en Bourse.

En 2022, ADP a tiré quelque 24% de son résultat opérationnel de l'international, et vise une proportion de 40 à 50% en 2035.

Une ambition qui devrait aussi être aidée par les autres participations d'ADP, dont l'entreprise turque TAV, gestionnaire d'Ankara et Antalya, mais aussi d'Almaty au Kazakhstan. ADP, qui gère directement ou indirectement une trentaine d'aéroports dans le monde, rivalise avec Vinci Airports (France), Aena (Espagne) et Fraport (Allemagne) dans ce secteur.

Après le cataclysme du Covid, ADP, dont la privatisation un temps évoquée n'est plus à l'ordre du jour, a dégagé en 2022 un bénéfice de 516 millions d'euros et quasiment retrouvé son chiffre d'affaires de 2019.

afp/al