Les raisons d’un tel désamour des investisseurs pour la compagnie franco-néerlandaise sont nombreuses, et bien recensées dans Air France-KLM : l’action la plus sous-cotée du moment ? Entre autres, on signalera une croissance atone, une capacité bénéficiaire erratique et, suite à une succession de douloureuses augmentations de capital, un nombre d’actions en circulation multiplié par neuf en dix ans.

Notre équipe d’analystes saute sur l’occasion pour rappeler que le résultat net, ou profit comptable, est souvent une oeuvre de fiction, a fortiori dans les secteurs les plus capitalistiques. Il est ainsi fréquent qu’il n’ait rien à voir avec le profit réel, ou cash-flow libre, qui correspond lui au profit effectivement distribuable aux actionnaires, quand il n’est pas redirigé vers des acquisitions ou du désendettement.

Voir à ce sujet ABC de l'analyse financière : le tableau des flux de trésorerie.

A l’instar de toutes les autres compagnies aériennes, le résultat net d’Air France-KLM n’a rien à voir avec son cash-flow libre ; en d’autres termes, son profit comptable n’a rien à voir avec son profit réel. La divergence fut substantielle tout au long de la décennie 2015-2024, sauf en 2023 où les deux étaient quasiment identiques. 

Une fois n’est pas coutume, chez Air France-KLM, le cash-flow libre est supérieur au profit comptable. Ainsi, sur la dernière décennie, et en agrégat, la compagnie accumulait €6 milliards de pertes comptables, mais réalisait sur la période €4 milliards de cash-flow libre.

Ce montant est alléchant lorsqu’on le rapporte à la capitalisation boursière de €2 milliards, puisque Air France-KLM pourrait théoriquement générer ce montant en à peine cinq ans d’exercice. Mais notre équipe d’analystes saute aussi sur l’occasion pour rappeler que la valeur d’une entreprise n’est pas que sa capitalisation boursière ; elle doit également prendre en compte sa dette nette. 

Voir à ce sujet ABC de l'analyse financière : capitalisation boursière vs. valeur d'entreprise.

La valeur d’entreprise de la compagnie franco-néerlandaise, si l’on ajoute les €9 milliards de dette nette attendus fin 2025 à sa capitalisation boursière du moment, atteint €11 milliards. Autrement dit, un multiple de plus de vingt-sept fois le cash-flow libre annualisé sur la dernière décennie. Pour justifier une telle valorisation — digne d’une solide entreprise en croissance — la prochaine décennie a fort intérêt à n’avoir rien en commun avec celle qui vient de s’achever. 

Qui serait vraiment prêt à prendre ce pari ?