Un tel attentisme des investisseurs était inhabituel, d’autant que sur la période 2021-2024 le chiffre d’affaires de Airbnb a doublé, et son profit d’exploitation quintuplé. Non seulement la licorne a mis ses comptes solidement dans le vert, mais sa domination sur le segment de la location saisonnière entre particuliers — via le fameux « effet réseau » — semble désormais consacrée pour de bon.

Vient s’ajouter audit profit d’exploitation une manne providentielle : celle du revenu financier issu des intérêts perçus sur la trésorerie des utilisateurs de la plate-forme en séquestre chez elle ; en 2024, ce sont ainsi $818 millions supplémentaires qui rentrent dans les caisses du groupe dirigé par Brian Chesky.

Le profit avant impôts de Airbnb atteint $3.3 milliards en 2024, contre $2.1 milliards en 2023 et en 2022, et un léger déficit en 2021. L’an dernier, nous soulignions que la communication du groupe était étonnamment timide sur la profitabilité en berne malgré la nette croissance du chiffre d'affaires. Les douze derniers mois marquent donc une nette amélioration, d'ailleurs saluée par le marché. 

Il en faudra sans doute davantage pour convaincre les pessimistes. Airbnb, comme Uber, évolue toujours sur un créneau à risque en matière de régulation, avec déjà des mesures prises par certaines grandes agglomérations pour limiter son expansion sur leur territoire.

De plus, si la croissance continue, son rythme diminue. En 2024, les réservations étaient en hausse de 12% en valeur et 10% en volume. L’an dernier, elles l’étaient de 16% en valeur et de 14% en volume. Airbnb approche-t-il progressivement de son plafond de verre ?

S’ajoute à cette possibilité — et comme de coutume chez les entreprises américaines du secteur de la technologie — des rémunérations en stock-options qui elles n’en finissent pas de crever le plafond : encore $1.4 milliard en 2024, contre $1.1 milliard en 2023, soit 12% du chiffre d’affaires.

Depuis son IPO, Airbnb a consacré près de $10 milliards à des rachats d’actions. Sauf que ces opérations ne sont pas de retour de capital aux actionnaires ; elles ont en réalité servi à absorber la dilution causée par les émissions de titres liées aux stock-options. 

Malgré les montants engagés, sur une base diluée, le nombre de titres en circulation progresse ainsi sensiblement entre 2021 et 2024, de 616 à 645 millions.