sa voie

ROSNY-SOUS-BOIS (awp/afp) - Escape game pour prendre conscience de ses compétences, réalité virtuelle pour "s'immerger" dans des métiers... au centre commercial Rosny-2 (Seine-Saint-Denis), Pôle emploi expérimente un concept ludique pour ramener un public hors des radars institutionnels vers l'emploi.

Ouverte sur le rez-de-chaussée de cette galerie commerciale très fréquentée au pied d'une gare RER, Yookan - 'you can' - fait en apparence davantage penser à un espace de loisirs qu'aux locaux un peu aseptisés d'une agence Pôle emploi, dont le logo est d'ailleurs absent.

"On veut déstigmatiser la recherche d'emploi par un cadre ludique où l'on se rend sans obligation. On l'a installé dans un lieu de passage où les gens ont l'habitude de venir et de se rencontrer", résume Nacera Torche, directrice du site créé par l'opérateur avec 200 partenaires (acteurs locaux, institutions, entreprises...).

La cible: des jeunes sans emploi mais aussi des personnes cherchant à se reconvertir ou des scolaires en mal d'orientation.

Envoyé par sa conseillère Pôle emploi, Medhi Rangassamy, 21 ans, "apprécie l'atmosphère, d'être dans un cadre relaxé".

Si l'escape game proposé a mis en exergue "ses points forts" (communication, parler à autrui) utiles par exemple "dans le commerce ou la communication", il a plutôt eu le déclic pour le métier "de conducteur d'engins de chantier" grâce au simulateur de conduite de chariot-élévateur qui lui a rappelé "la conduite de tracteurs dans l'exploitation agricole de son père en Guadeloupe".

"On vise un public qui subit des déterminismes sociaux ou géographiques et s'interdit des métiers à cause d'une mauvaise connaissance de soi et des attentes des recruteurs. On cherche à élargir le champ des possibles de personnes qui s'autolimitent", explique Mme Torche.

Dès l'entrée, le côté high tech se manifeste avec des bornes tactiles proposant des quizz d'images, élaborés par des psychologues pour "mieux se connaître" et découvrir ses "affinités" comme "esprit d'équipe" ou "sensibilité environnementale".

A côté, dans l'escape game, les joueurs incarnent une équipe de sauveteurs qui doivent résoudre des énigmes pour réveiller un astronaute endormi. Ils en ressortent avec un profil (capitaine, facilitateur, explorateur...) et des atouts (concentration sur l'objectif, communication, créativité...) que le "game master" met en valeur avec eux "sur une roue des métiers".

Les participants "voient qu'ils ont des compétences à valoriser" auprès des entreprises, explique Mme Torche, citant l'exemple de "la Caisse d'Epargne qui ne recrute plus ses conseillers que sur ces +soft skills+ (aisance à l'oral, relationnel, force de persuasion)".

L'espace suivant permet d'explorer différents métiers, notamment du BTP et de l'industrie (électricien, sécurité chantier, soudeur, peinture, métiers de la plasturgie, etc.) grâce à des casques de réalité virtuelle et des simulateurs, "qui permettent de découvrir la technologie de ces métiers", selon l'un des "coachs", Michel.

Propositions d'immersion

Ces simulateurs attirent aussi des jeunes qui déambulent dans la galerie. "On se baladait, on a vu que c'était lumineux, on est rentrés. C'est intéressant", témoigne Ryan, 16 ans, lycéen de seconde.

Le parcours s'achève par des propositions d'immersion de quelques jours en entreprise, affichées sur un mur, avec éventuellement une formation ou un contrat à la clé. C'est aussi l'endroit pour discuter de son projet ou croiser des recruteurs lors d'un "job dating".

Ce mercredi après-midi, même si l'affluence est plutôt limitée, plusieurs entreprises et organismes de formation sont présentes pour "un forum de l'industrie". Airbus Helicopters propose ainsi de former 70 "agents composite" pour fabriquer des pales d'hélicoptères sur son site de Paris-Le Bourget. "On vise plutôt des personnes en reconversion, ayant une tête bien faite, un goût pour la matière et le travail manuel", explique son représentant.

Yookan a été implantée en Seine-Saint-Denis, où le taux de chômage est de 10,5% fin 2021 (contre 7,2% pour l'Île-de-France) car "ce département souffre du paradoxe d'avoir un essor économique important mais dont les emplois bénéficient peu à ses habitants", souligne Mme Torche.

Lancé mi-novembre pour 18 mois avec un budget de 3 millions d'euros, le site a enregistré 10.000 visites. Si le bilan s'avère concluant, l'idée serait d'en créer un dans chaque région.

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