(Ajoute précisions)
par Pamela Barbaglia et Gwénaëlle Barzic
LONDRES/PARIS 16 janvier (Reuters) - Le groupe canadien
Alimentation Couche-Tard a renoncé à son offre
d'acquisition de Carrefour à laquelle le gouvernement
français est hostile, a-t-on appris vendredi de source proche du
dossier.
La décision a été prise après une entrevue entre le ministre
français de l'Economie et des Finances, Bruno Le Maire, et le
fondateur et président de Couche-Tard, Alain Bouchard, a-t-on
précisé.
Le groupe canadien et Carrefour se sont refusés à tout
commentaire.
Plus tôt vendredi, le gouvernement français s'est opposé à
une éventuelle prise de contrôle de Carrefour par le groupe
canadien au nom d'une sécurité alimentaire nationale élevée au
rang de priorité absolue.
"Nous ne sommes pas favorables à cette opération, nous le
disons avec beaucoup de respect pour Couche-Tard, pour Carrefour
et pour tous ces opérateurs qui sont de grande qualité", a
déclaré le ministre français de l'Economie, Bruno Le Maire.
Couche-Tard espérait obtenir l'aval de la France en prenant
des engagements sur la question des emplois et sur la chaîne
d'approvisionnement alimentaire française, et en maintenant la
cotation de l'entreprise à Paris et à Toronto, déclare la
source.
Elle ajoute que le PDG de Carrefour, Alexandre Bompard, et
celui de Couche-Tard, Brian Hannasch, auraient oeuvré comme
co-dirigeants.
Le plan prévoyait aussi de conserver les opérations
stratégiques de l'entreprise en France, et de compter des
Français au sein de son comité d'entreprise, selon cette même
source.
Couche-Tard devait aussi injecter 3 milliards d'euros
d'investissement dans le groupe français, une idée largement
soutenue par Carrefour qui emploie 150.000 personnes en France,
ce qui en fait le plus grand employeur du secteur privé.
Bien qu'ayant initialement pensé poursuivre son offre,
Couche-Tard a préféré lever le drapeau blanc et la retirer afin
d'éviter de déclencher une tempête politique, explique une
source.
S'il est politiquement possible de décider de ne pas laisser
le plus grand employeur du pays passer entre des mains
étrangères, "on ne peut pas accuser une grande société
canadienne comme Couche-Tard de mettre en danger la sécurité
alimentaire de tout un pays", a déclaré vendredi une source
gouvernementale canadienne sous couvert d'anonymat.
La promptitude du refus du gouvernement français a surpris
et pourrait ternir l'image pro-entreprise du président Emmanuel
Macron, estiment des observateurs, tandis que d'autres
soulignent que la crise du COVID-19 a contraint plus d'un pays à
revoir les contours de ses intérêts stratégiques.
Le premier ministre canadien Justin Trudeau dit s'être
entretenu avec le président français cette semaine et a promis
de continuer d'oeuvrer au succès des entreprises canadiennes
dans le monde.
(Reporting by Pamela Barbaglia in London and (Pamela Barbaglia
avec Gwenaelle Barzic à Paris et Allison Lampert à Montreal,
version française Jean-Philippe Lefief et Camille Raynaud)