(Répétition sans changement d'une dépêche transmise vendredi)

* Le coût des mesures de Biden inquiète les marchés

* Les plus riches redoutent une hausse de la fiscalité

* La Fed doit gérer un risque de surchauffe économique

* Certains opérateurs s'attendent à de la volatilité

par Patrick Vignal

PARIS, 26 avril (Reuters) - L'alliance entre Joe Biden et les marchés pourrait prendre un tour moins harmonieux, les investisseurs commençant à s'interroger sur le coût du soutien budgétaire massif mis en place par le président américain.

Le net recul des indices de Wall Street, jeudi, sur des craintes d'une augmentation de la fiscalité pesant sur les plus riches, annonce peut-être la fin de l'idylle entre les investisseurs et le nouvel occupant de la Maison blanche, à l'approche des 100 jours de son mandat.

Certains analystes ont jugé que les investisseurs avaient simplement saisi des informations prêtant à l'administration Biden l'intention de doubler les taxes sur les plus-values financières comme un prétexte pour prendre leur bénéfice avant les résultats trimestriels que publieront dans les prochains jours Microsoft, Alphabet ou encore Facebook .

De nombreux observateurs considèrent en outre qu'il est peu probable que le projet soit adopté par le Congrès, où les républicains ont déjà affiché leur opposition au plan de 2.300 milliards de dollars pour les infrastructures et l'emploi.

Il n'en demeure pas moins que toutes ces dépenses, qui s'ajoutent à un plan de relance budgétaire de 1.900 milliards de dollars déjà validé par le Congrès, commencent à poser question.

"Il est en effet naturel de s'interroger sur les retombées de ces programmes sur l'inflation et les taux d'intérêt", fait valoir Matthew Benkendorf, directeur des investissements pour la boutique "Quality Growth" de Vontobel Asset Management.

"La question de savoir si l'économie a besoin de plus d'investissements devrait alimenter les prochains débats politiques et avoir des conséquences sur la volatilité au cours de l'année."

LA FED EN PREMIÈRE LIGNE

La Réserve fédérale, dont les annonces de politique monétaire sont attendues pour mercredi, ne peut ignorer ces débats, alimentés plus tôt dans l'année par un bond des rendements des bons du Trésor américain reflétant la hausse des anticipations d'inflation aux Etats-Unis.

La Fed devrait réaffirmer sa posture accommodante mais n'empêchera pas les marchés de craindre une surchauffe de l'économie et de guetter le moment où la banque centrale devra baliser un retrait progressif de son soutien monétaire.

La Banque centrale européenne n'a, pour l'instant, pas ce genre de problème, l'économie de la zone euro accusant un retard important sur celle des Etats-Unis.

Sans surprise, l'institution de Francfort n'a pas touché jeudi à sa politique monétaire et sa présidente, Christine Lagarde, a jugé prématurée toute discussion sur une sortie du programme d'achats d'urgence face à la pandémie (PEPP).

Le sujet n'en reviendra pas moins sur la table et la réunion de juin, au cours de laquelle la BCE actualisera ses prévisions économiques, pourrait s'avérer plus délicate, surtout si les campagnes de vaccination produisent leurs effets.

La reprise dans la zone euro sera certainement moins vigoureuse qu'aux Etats-Unis mais elle ne s'en profile pas moins, comme viennent de le montrer les résultats des enquêtes mensuelles que réalise IHS Markit auprès des directeurs d'achat (PMI).

UN MOIS DE MAI ORAGEUX EN VUE

Pour l'instant, malgré la petite frayeur observée à Wall Street, le climat demeure favorable aux marchés d'actions avec des indices proches de niveaux records, portés par l'espoir d'un rebond économique vigoureux.

Il n'en faudrait cependant pas beaucoup pour que la machine se dérègle, jugent certains opérateurs.

Ainsi, si les publications trimestrielles des entreprises répondent jusqu'à présent dans l'ensemble à des attentes élevées, toute déception entraîne une sanction immédiate dans un contexte de valorisations tendues, comme Netflix vient d'en faire l'expérience avec un repli de plus de 7% en Bourse sur des comptes mal accueillis.

L'inquiétude persiste également sur le plan sanitaire, notamment dans des pays émergents de premier plan comme l'Inde ou le Brésil, sans parler de la crainte d'un resserrement monétaire qui a pesé récemment sur les indices boursiers chinois et d'un climat géopolitique tendu par les prises de positions fermes de Joe Biden vis-à-vis de la Chine mais aussi de la Russie.

"A l'aube d'un prochain déconfinement, l'optimisme est a son zénith", note Alain Guélennoc, directeur général de Federal Finance Gestion.

"Tous les secteurs profitent du mouvement général de hausse, les investisseurs balayant d'un revers de la main non seulement une gestion planétaire de la pandémie loin d'être homogène mais aussi les risques inflationnistes", ajoute-t-il avant de prévoir un mois de mai qui pourrait se révéler plus orageux.

"Après les nouveaux records historiques enregistrés sur les marchés et le risque de surchauffe économique, le nouveau mois boursier qui s'ouvre pourrait constituer une phase propice a une certaine accalmie de cette exubérance", dit-il. (Edité par Jean-Michel Bélot)