Formé aux États-Unis, ce haut fonctionnaire a mené une carrière discrète mais continue : après un passage à la Banque mondiale à Washington, il rejoint le ministère de l'Économie en France, qu’il ne quittera plus. Il entre chez Alstom en 1998 comme responsable des relations investisseurs, puis gravit rapidement les échelons. Directeur financier de 2004 à 2010, il dirige ensuite plusieurs divisions avant de devenir directeur général en 2016.
Le sens de la direction, il l’a dans le sang : son père fut directeur financier de Bouygues dans les années 1980, et son frère a dirigé Nexans entre 2014 et 2018.
Une nouvelle dynamique
Ce départ s’inscrit dans un contexte de renouvellement de la direction. Début mai, Alstom annonçait déjà plusieurs mouvements : Andrew DeLeone, jusque-là président de la zone Afrique-Moyen-Orient-Asie centrale, prend la tête de la région Europe. Martin Vaujour, ancien président de Bombardier Europe et responsable des fusions-acquisitions depuis 2021, lui succède dans l’hémisphère sud (Afrique-Moyen-Orient-Asie).
Un héritage contrasté
Henri Poupart-Lafarge aura marqué Alstom par son ambition de bâtir un champion européen du rail. Le projet de fusion avec Siemens, en 2019, est bloqué par Bruxelles, mais il parvient à concrétiser le rachat de Bombardier. Une intégration complexe, qu’il mène difficilement à bien, consolidant la place d’Alstom parmi les leaders du transport ferroviaire dans le monde.
S’il a dû affronter la déroute boursière de 2023, il laisse un groupe assaini : la dette nette a été divisée par six en un an, le retour aux bénéfices est acté en 2024, et le carnet de commandes atteint 20 milliards d’euros, soit plus d’un an de chiffre d’affaires.
Alstom est aujourd’hui plus grand, plus international, et plus engagé sur le plan environnemental. Reste à surmonter plusieurs défis : une rentabilité encore fragile, et des critiques récurrentes sur les retards de livraison.
Le départ d'Henri Poupart-Lafarge était peut-être devenu inéluctable. Artisan du redressement puis de la transformation du groupe, en dépit d'une consolidation sectorielle contrariée, il quitte Alstom après avoir restauré un bilan correct après le rachat de Bombardier, mais sans séduire le marché. Parfois, il faut savoir changer de capitaine pour forcer un nouveau chapitre de l'histoire.