New York (AFP) --Altice a annoncé dans la nuit de lundi à mardi la séparation de ses activités américaines et européennes pour davantage de "transparence", mais les deux nouvelles entreprises restent contrôlées par le milliardaire français Patrick Drahi.

Les deux entités ont été rebaptisées Altice USA, qui comprend les câblo-opérateurs Suddenlink et Cablevision (Optimum), et Altice Europe (SFR, Portugal Telecom, BFM, Libération, L'Express...).

Cette décision intervient deux mois seulement après que M. Drahi a repris lui-même les commandes suite à une chute boursière spectaculaire de l'action ayant entraîné le départ du PDG Michel Combes.

"C'est un moment important pour le groupe afin de se concentrer sur nos opérations existantes", a déclaré Dexter Goei, le directeur général d'Altice USA, lors d'une brève conférence téléphonique.

Selon lui, la séparation a été le fruit d'un débat récurrent en interne et vise également à répondre à une demande de "transparence" d'actionnaires désemparés par la structure jugée "complexe" d'Altice.

"Dans la durée nous espérons que la clarté et la simplicité de la structure vont aider nos actionnaires à soutenir par la suite les initiatives" engagées, a tenu à souligner le responsable. "L'ADN de notre groupe est d'essayer de grossir dans la durée", a-t-il conclu.

Cette restructuration se fera par le biais d'une répartition secondaire d'actions (spin-off) qui séparera Altice USA de Altice NV, la maison-mère du groupe de droit néerlandais. "La séparation permettra à chaque entité de se concentrer davantage sur les opportunités de création de valeur sur leurs marchés respectifs et assurera une plus grande transparence pour les investisseurs", souligne-t-on de même source.

- L'Europe divisée en trois -

Actuellement, Altice NV possède 67,2% d'Altice USA. Le groupe prévoit de finaliser cette opération d'ici la fin du premier semestre 2018 après accord des autorités de la concurrence et des actionnaires d'Altice.

Patrick Drahi conservera le contrôle des deux entités et la présidence de leurs conseils d'administration respectifs. Il détiendra au moins 51% des droits de vote de l'entité américaine, qui est le quatrième câblo-opérateur aux Etats-Unis.

Il est également prévu de verser un dividende exceptionnel de 1,5 milliard de dollars aux actionnaires d'Altice USA après la séparation. Altice NV utilisera 625 millions de dollars sur les 900 que ce versement lui rapportera pour payer une partie de ses dettes.

Altice Europe se restructurera également en plusieurs unités, dont Altice France, Altice International et une nouvelle filiale appelée "Altice Pay TV".

Cette opération va notamment permettre à Patrick Drahi d'isoler ses intérêts aux Etats-Unis où il nourrit de grandes ambitions après les déboires subis par son groupe en Europe. Il souhaite participer à la consolidation en cours du marché du câble américain en mettant la main sur Charter, le deuxième câblo-opérateur américain, selon des sources bancaires. Il vient aussi d'y lancer la première box permettant aux abonnés d'avoir accès à internet, au téléphone fixe et à la télévision par le biais d'un seul appareil.

Le titre Altice avait été sévèrement secoué sur la Bourse d'Amsterdam fin novembre après la publication de résultats trimestriels inférieurs aux attentes et d'inquiétudes sur la dette du groupe, estimée à quelque 50 milliards d'euros. Il avait perdu à un moment jusqu'à 50% de sa valeur.

Patrick Drahi avait dans la foulée décidé d'un remaniement de la direction du groupe pour en reprendre la direction effective et s'est engagé à céder des actifs jugés non stratégiques. Altice chercherait un acheteur pour ses activités en République dominicaine, selon le Financial Times, et a annoncé en décembre la cession d'actifs en Suisse pour environ 217 millions de dollars.

Dexter Goei a indiqué lundi qu'Altice travaillait "activement" à l'identification des activités devant être vendues mais a insisté sur le fait que la séparation n'était en aucun cas un signal sur la stratégie d'acquisitions du groupe.

En séparant Altice USA et Altice Europe, Patrick Drahi continue de reproduire les recettes de son mentor John Malone, surnommé le "cowboy" du câble américain, qui a scindé son empire Liberty Interactive en différentes activités afin de mieux en refléter la diversité et d'en augmenter la valeur aux yeux des marchés financiers.

Tout comme M. Malone, le milliardaire français a bâti son empire via des acquisitions financées le plus souvent par des montages financiers complexes et en s'endettant.