Amadeus IT a été créée en 1987 par Air France, Lufthansa, Iberia et SAS, qui voulaient se doter de leur propre système mondial de distribution de billets (SMD, ou GDS en anglais), tout en proposant une architecture neutre susceptible d'interconnecter d'autres acteurs. Les fondateurs ont introduit la société en bourse en 1999. Elle n'y restera que six ans, jusqu'à son rachat par les fonds d'investissement BC Partners et Cinven. Ce sont eux qui la font à nouveau coter à Madrid en 2011. Les deux fonds et les quatre actionnaires-fondateurs n'ont plus aucun titre et la société vole de ses propres ailes depuis longtemps déjà.

Amadeus peut se targuer d'être une belle réussite, puisqu'elle contrôle aujourd'hui environ 40% du marché mondial des GDS, devant l'américain Sabre et le britannique Travelport. Le groupe a progressivement étoffé son offre à partir de sa solution initiale de gestion de la relation entre les compagnies aériennes et les agences de voyage. Car il a fallu s'adapter à l'économie numérique, puisque la création de l'entreprise remonte à l'ère pré-internet de masse, que les moins de trente ans ne peuvent pas connaître. A force de diversification et d'acquisitions, Amadeus continue à dégager une part conséquente de son activité de la distribution aérienne (environ 45%), mais propose aussi des prestations informatiques pointues aux compagnies aériennes (35%) et des solutions pour le secteur de l'hébergement, ou plus généralement le tourisme dans son ensemble (20%).

Amadeus, en sousperformance à cause du covid

Il va sans dire qu'avec ce type de clientèle, c’est-à-dire des compagnies aériennes, des groupes hôteliers, des opérateurs maritimes ou ferroviaires, des assureurs ou des tour-opérateurs, les années 2020 et 2021 ont été compliquées, pandémie mondiale oblige. Le chiffre d'affaires a été divisé par plus de deux entre 2019 et 2020. Mais la capacité de rebond est forte : Amadeus devrait quasiment renouer avec le niveau de 2019 dès la fin de l'année 2023 (soit 5,5 milliards d'euros), tout en dégageant 1 milliard d'euros de cash-flow libre. C'est dire l'agilité de l'entreprise, dont l'intensité capitalistique est bien moindre que la plupart des clients auxquels elle s'adresse. Les années de vaches maigres auront aussi accéléré les efforts de diversification en dehors de l'aérien pur, comme le montre le retour à la croissance du segment hébergement dès le 4e trimestre 2022, en avance sur les deux autres divisions.

Période Fiscale : Décembre 2019 2020 2021 2022 2023 2024 2025 2026
Chiffre d'affaires 1 5 578 2 174 2 670 4 486 5 441 6 099 6 648 7 119
EBITDA 1 2 245 227,8 627,6 1 640 2 094 2 353 2 627 2 847
Résultat d'exploitation (EBIT) 1 1 540 -772,3 -83 962,7 1 414 1 697 1 913 2 116
Marge d'exploitation 27,61 % -35,52 % -3,11 % 21,46 % 25,99 % 27,82 % 28,77 % 29,72 %
Résultat Avt. Impôt (EBT) 1 1 471 -882,7 -197,4 871,7 1 362 1 639 1 876 2 047
Résultat net 1 1 162 -625,4 -142,4 664,3 1 118 1 234 1 396 1 552
Marge nette 20,83 % -28,77 % -5,33 % 14,81 % 20,54 % 20,24 % 21 % 21,8 %
BNA 2 2,700 -1,400 -0,3200 1,450 2,290 2,756 3,107 3,375
Free Cash Flow 1 1 045 -541,9 176,1 - 1 194 1 314 1 415 1 569
Marge FCF 18,73 % -24,93 % 6,6 % - 21,95 % 21,55 % 21,28 % 22,04 %
FCF Conversion (EBITDA) 46,54 % - 28,06 % - 57,03 % 55,85 % 53,86 % 55,12 %
FCF Conversion (Résultat net) 89,96 % - - - 106,87 % 106,45 % 101,32 % 101,13 %
Dividende / Action 2 0,5600 - - - 1,240 1,338 1,530 1,755
Date de publication 28/02/20 26/02/21 25/02/22 24/02/23 28/02/24 - - -
1EUR en Millions2EUR
Données Estimées

On l'aura compris, le principal risque qui pèse sur l'entreprise est sa dépendance au tourisme mondial, donc à la cyclicité inhérente à ce pan de l'économie. Une autre menace provient des évolutions du secteur et des nouvelles technologies qui pourraient réduire la dépendance des transporteurs aux solutions des GDS. Les barrières à l'entrée restent toutefois considérables et les tentatives d'émancipation ont jusqu'ici échoué. Reste que pour minimiser les risques, les dépenses de R&D d'Amadeus et de ses concurrents sont élevées. Il découle de ce qui précède que la diversification est une arme évidente pour renforcer la croissance et réduire la dépendance à l'aérien. Mais là encore, pas de formule magique : il faut souvent procéder par croissance externe, ce qui entraîne des besoins en capitaux et, généralement, de l'endettement additionnel.

Fort heureusement pour faire face à ces problèmes, Amadeus génère d'abondantes liquidités grâce à des marges élevées. En rythme de croisière, pour rester dans le thème, sa marge opérationnelle se situe entre 25 et 30%. Un niveau avec lequel le groupe devrait renouer dès cette année. Les multiples de valorisation ne sont pas exorbitants pour un acteur en position de force, étroitement corrélé à un marché du tourisme qui reste en croissance constante, hors épisode pandémique, grâce à l'accroissement des rangs de la classe moyenne dans les pays émergents. Amadeus devrait même reprendre le versement d'un petit dividende à compter de cette année.