PLAN DE CAMPAGNE (awp/afp) - "Depuis 8H30 il y a la queue et plus qu'un samedi ordinaire", lance tout sourire le responsable d'une enseigne à bas prix de Plan-de-Campagne, plus vaste zone commerciale de France au nord de Marseille.

En ce jour de réouverture après un mois de confinement pour limiter la propagation du coronavirus, les vendeurs de cette chaîne de hard-discount ressemblent davantage à des aiguilleurs de gare avec leurs chasubles orange floquées "Distance de 1,5 mètre, merci!".

Avec la règle du "un client pour 8 m2", la jauge est ici limitée à 130 personnes.

Françoise Bachelet, 70 ans, patiente depuis plus d'un quart d'heure. "Pour faire ma crèche, il me manque des petits sujets et dans leur catalogue en ligne, j'ai vu qu'ils avaient aussi des puits aux bonnes dimensions", glisse-t-elle, masque fleuri sur le visage.

Emilie Riviere, emmitouflée dans un gros manteau de fausse fourrure noir, et son conjoint sont eux venus "acheter des petites choses pour passer Noël, des broutilles".

Ce couple, qui a deux enfants, avoue avoir déjà fait de nombreux achats sur le géant du commerce en ligne Amazon. "J'ai aussi +mis à gauche+ pour moi et mes enfants. Et je ne réinjecterai pas ce que j'ai économisé car l'avenir m'inquiète, surtout pour mes enfants", confie Emilie, aide-soignante de nuit.

Economistes et commerçants se demandent quel sera le comportement des ménages après ce nouveau confinement. Vont-ils réinjecter dans l'économie l'énorme épargne "Covid" estimée dès octobre par l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) à 86 milliards d'euros sur 2020?

"Le chiffre d'affaires perdu, on ne le rattrapera jamais", balaie Julie Becart, directrice du centre commercial Avant Cap, 115 boutiques au coeur de cette zone commerciale bétonnée où s'alignent parkings gratuits et enseignes sur 300.000 m2, à cheval sur les communes des Pennes-Mirabeau et Cabriès.

"On espère que les clients n'ont pas déjà fait tous leurs achats et vont soutenir l'achat physique", ajoute-t-elle.

Dépourvu d'hypermarché, son centre commercial est resté quasi désert pendant le confinement avec une perte de chiffre d'affaires estimée à 90% malgré le "click and collect" ou même le "visio and shop" mis en place par certains.

"Acheter, acheter, acheter"

Samedi matin, quelques dizaines de personnes étaient là dès l'ouverture anticipée à 9H00, ravies de pouvoir se balader, voir du monde et les illuminations de Noël.

"On va acheter, acheter, acheter", lançait cette lycéenne qui n'a pas hésité à se lever à 8H00 un samedi pour venir en bus depuis Vitrolles, une petite ville proche. Budget de la journée? "30 euros d'argent de poche".

Céline Archetti et sa fille Eva comptaient elles rester une petite heure maximum histoire d'acheter quelques vêtements: "Je regarde les prix, je vais continuer à faire attention et j'espère qu'ils ne vont pas profiter pour augmenter et se rattraper".

Sur les vitrines, l'heure était plutôt aux rabais et quelques-unes affichaient même samedi un "Black Friday" qui devait pourtant être décalé au 4 décembre.

Dans sa boutique de prêt-à-porter féminin, David Mimoun montre les nouvelles flèches de circulation, la vitre en plexiglas à la caisse, les filtres de la climatisation qui ont été rénovés. Avec une jauge réduite de moitié, à 20 clientes, il pense rattraper 15 à 20% du chiffre perdu sur novembre, pas plus.

"Les vendeuses sont super motivées, elles n'en pouvaient plus", ajoute celui qui est aussi le directeur général de cette enseigne comptant une vingtaine de boutiques. Il se félicite d'avoir depuis longtemps un site de vente en ligne qui lui a permis de limiter les dégâts des fermetures du printemps et de l'automne.

Les conséquences se feront sentir plutôt dans six/huit mois, estime Mme Becart.

Chez le coiffeur d'en face, on se demande comment gérer les couleurs qui prennent des heures avec une jauge très limitée.

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