Nous vous l’avions déjà signalé il y a près d’un mois : l’Union européenne y va avec le dos de la cuillère pour ses premières sanctions liées au Digital Markets Act. Pour rappel, une infraction au DMA permet à Bruxelles d’imposer une amende pouvant aller jusqu’à 10 % du chiffre d’affaires mondial d’une entreprise. Un plafond bien loin d’avoir été atteint : Apple écope d’une amende de 500 millions d’euros, Meta de 200 millions. Et en plus de ces sanctions mesurées, les deux géants bénéficient d’un délai de 60 jours pour rentrer dans les clous avant d’éventuelles astreintes journalières.

Un contexte qui dépasse le juridique

Comme évoqué dans notre précédent article, cette clémence s’explique en grande partie par le contexte géopolitique tendu, avec Donald Trump en toile de fond. Le président américain brandit déjà la menace de nouveaux droits de douane, et Bruxelles semble vouloir éviter toute escalade en ciblant trop sévèrement les Big Tech américaines. Trump a d’ailleurs déjà qualifié les amendes européennes de “taxes déguisées” et d’“extorsion à l’étranger”.

Malgré cette approche diplomatique, les réactions des entreprises concernées ne se sont pas fait attendre.Apple dénonce une décision “injuste” et affirme être contrainte de “donner gratuitement ses technologies”. La firme de Cupertino a annoncé son intention de déposer un recours devant la justice européenne.Chez Meta, le ton est encore plus offensif : Joel Kaplan, responsable des affaires publiques, compare les amendes à des droits de douane visant des “entreprises américaines à succès”, une sortie clairement alignée sur la rhétorique de Donald Trump. Là aussi, un appel est prévu.

L’UE peut encore serrer la vis

Ces réactions traduisent deux choses. D’abord, il est peu probable que les amendes actuelles suffisent à pousser Apple et Meta à modifier en profondeur leurs pratiques. Ensuite, les deux groupes semblent bien décidés à s’aligner sur la posture de Donald Trump, misant sur le soft power américain pour tirer avantage du contexte géopolitique. Pourtant, si les entreprises refusent toujours de se conformer pleinement au DMA, la Commission européenne pourrait donc activer des astreintes journalières allant jusqu’à 55 millions de dollars pour Apple et 23 millions pour Meta. Plusieurs responsables européens assurent qu’ils n’hésiteront pas à passer à l’action. Une hypothèse tout à fait crédible, notamment au regard des précédents : l’UE a déjà contraint Apple à adopter l’USB-C en lieu et place de ses connecteurs Lightning, et à offrir aux utilisateurs la possibilité d’installer des applications via des boutiques tierces, en alternative à l’App Store.

En parallèle, une nouvelle procédure a été lancée le 23 avril contre Apple, toujours dans le cadre du DMA. Elle vise cette fois les commissions imposées par la firme sur les boutiques d’applications tierces, soupçonnées de freiner la concurrence. Apple prévoit de facturer 50 centimes par téléchargement annuel, dès lors que la barre du million est atteinte. Cette procédure ne rentre évidemment pas dans le cadre du DMA et la Commission reproche à Apple de rendre le processus d’installation des applications “inutilement lourd et confus” depuis une boutique tierce.