AstraZeneca perd 2,8% à 8 219 pence, pénalisé par l'information Bloomberg selon laquelle il aurait approché Gilead le mois dernier en vue d'une fusion. La biotech américaine gagne, elle, 1,34% à 77,78 dollars. Un tel rapprochement donnerait naissance à un géant de la pharmacie d'une capitalisation d'environ 240 milliards de dollars, soit devant Merck et Pfizer. L'objectif du laboratoire britannique, spécialisé dans l'oncologie, serait de se diversifier dans les maladies virales et surtout de profiter des liquidités abondantes de la biotech, qui elle renforcerait son "pipeline" trop pauvre.

La biotech américaine aurait décliner la proposition, préférant se concentrer sur sa stratégie de partenariats et de petites acquisitions.

Cette information a fait réagir de nombreux analystes ce matin. Globalement, peu jugent ce scénario crédible.

Citi et JPMorgan estiment que le gouvernement américain risque fort de bloquer une telle opération de rachat d'un groupe d'un secteur stratégique par une société étrangère. De surcroît, Gilead est actuellement le laboratoire le plus avancé, grâce au remdesivir, dans la recherche d'un traitement contre le Covid-19.

De plus,souligne Citi, une transaction pourrait conduire à une hausse significative de la rémunération du PDG, AstraZeneca, ce qui risquerait d'irriter le gouvernement britannique. Par ailleurs, Londres pourrait lui aussi bloquer cette opération alors que le laboratoire est, lui, en plein développement d'un vaccin contre le Covid-19 et que gouvernement s'est engagé à fournir le potentiel vaccin en premier lieu à ses citoyens.

En outre ajoute JPMorgan, les actionnaires d'AstraZeneca pourrait s'opposer à un deal qui ternira, du moins à court terme, les impressionnantes perspectives de croissance des bénéfices du groupe. En effet, son bénéfice par action a devrait progresser à un taux moyen de 18% par an sur la période 2021-2024, contre 3% pour Gilead. Par ailleurs, le portefeuille de produits en développement de l'américain est limité et les synergies limitées tant les deux groupes ont peu de spécialités en commun.

Enfin, explique le courtier, les actionnaires de la biotech américaine pourrait également se rebiffer à l'idée de se vendre sans prime ou avec une prime modeste alors que remdesivir est considéré comme un atout majeur.

Jefferies doute également du potentiel de ce scénario. L'intérêt stratégique d'une telle opération apparaît en effet limité pour AstraZeneca aors que Gilead n'est qu'à mi-chemin de son redressement.

L'analyste rappelle que le britannique affiche une croissance impressionnante à court terme, un portefeuille de produits en développement relativement solide et une stratégie de levier d'exploitation, observe le broker, qui doute donc de l'intérêt d'une fusion.

Finalement seul UBS semble y croire,.. un peu.  Le broker reconnaît que l'idée d'un rapprochement entre le britannique et Gilead peut paraître étrange tant les synergies semblent limitées entre les deux groupes. Pour autant, le bureau d'études estime qu'il ne faut pas rejeter cette thèse trop rapidement. Ainsi, Astra bénéficierait des liquidités qui lui manquent tandis que Gilead enrichirait un portefeuille de produits en développement limité. Affaire à suivre...


Valeurs citées dans l'article : AstraZeneca PLC, Gilead Sciences