New York (awp/afp) - La plus grande banque américaine, JPMorgan Chase, a mis un peu plus d'argent de côté au deuxième trimestre pour prendre en compte une "modeste détérioration" des perspectives et a suspendu ses rachats d'actions, tout en assurant que pour l'instant, l'économie se tient bien.

Son patron, Jamie Dimon, a mis en avant jeudi "deux dynamiques contradictoires".

L'économie américaine continue de croître, le marché de l'emploi se porte bien, les salaires augmentent, et les consommateurs dépensent encore allègrement malgré l'inflation, même si les économies qu'ils ont engrangées pendant la pandémie commencent à s'amoindrir.

Les particuliers "sont en très bonne santé" financière si une récession arrive, a affirmé M. Dimon lors d'une conférence téléphonique avec des journalistes.

"Quand on parle aux entreprises (...), les carnets de commandes sont bons", a-t-il aussi signalé.

Si on s'en tient aux chiffres, "il n'y a aucune indication d'une faiblesse" de l'économie, a abondé le directeur financier Jeremy Barnum. En revanche, "des questions se posent sur les perspectives".

M. Dimon a évoqué les tensions géopolitiques, l'inflation au plus haut en 40 ans, l'érosion de la confiance des consommateurs, l'incertitude quant à la politique de la banque centrale américaine, ainsi que la guerre en Ukraine.

Tous ces éléments "sont très susceptibles d'avoir des conséquences négatives sur l'économie mondiale à un moment donné", a-t-il noté.

Dans ce contexte, la banque a augmenté ses provisions de près de 1,1 milliard de dollars: 657 millions de dollars pour faire face aux prêts non remboursés et 428 millions de nouvelles réserves afin notamment de refléter "une modeste détérioration des prévisions économiques".

Même s'ils augmentaient encore leurs réserves, ce serait "bien moins" qu'au début de la pandémie, a précisé M. Dimon.

Faible activité des banquiers d'affaires ___

Au deuxième trimestre, le chiffre d'affaires de la banque a augmenté de 1%, à 30,7 milliards de dollars.

Dans le sillage de la hausse des taux engagée par la banque centrale américaine, sa banque a pu compter sur la progression de ses revenus nets d'intérêts (+19%), soit la différence entre les intérêts que JPMorgan gagne sur les prêts accordés à ses clients et ceux qu'elle verse aux épargnants.

Son bénéfice net a baissé de 28%, à 8,6 milliards de dollars.

Il pâtit de la comparaison avec le deuxième trimestre 2021, quand la banque avait fortement diminué les réserves mises de côté au début de la pandémie pour faire face aux éventuels impayés de ses clients.

Du côté des particuliers et petites entreprises, la banque a vu les dépôts augmenter (+13%) mais l'activité de prêts immobiliers reculer, les particuliers hésitant à solliciter un nouvel emprunt avec la hausse des taux d'intérêts.

La banque a aussi vu les commissions générées par ses banquiers d'affaires fortement reculer (-54%), les entreprises n'étant pas enclines à engager actuellement de grosses opérations ou à entrer en Bourse au vu de l'incertitude sur l'économie mondiale et des turbulences sur les marchés.

Les revenus tirés des marchés, en proie à une forte volatilité, ont, eux, augmenté de 15%.

Morgan Stanley a fait face à la même dynamique: son chiffre d'affaires (-11%) et son bénéfice net (-30%) ont été plombés par la moindre activité des banquiers d'affaires de la firme. Les revenus générés par ses courtiers ont, en revanche, progressé.

JPMorgan a, par ailleurs, annoncé jeudi la suspension de son programme de rachat d'actions. C'est pour pouvoir répondre aux exigences des régulateurs en termes de capital, a assuré la banque.

Mais c'est aussi un signal, pour certains investisseurs, que la direction ressent le besoin d'être prudente avec son argent: "en règle générale, les banques ont de meilleurs résultats quand les taux montent, mais les inquiétudes concernant l'économie et le consommateur à long terme semblent être plus importantes", avancent les analystes de Briefing.

L'action a reculé de 3,5% à Wall Street.

Pour Ken Leon, de CFRA, la banque est actuellement dans une position ambigüe, où "les résultats du deuxième trimestre ne reflètent clairement pas les inquiétudes pour le deuxième semestre".

Les autres grandes firmes de Wall Street doivent dévoiler leurs résultats dans les prochains jours: vendredi pour Citigroup et Wells Fargo, lundi pour Bank of America et Goldman Sachs.

afp/rp