Lausanne (awp) - Le produit intérieur brut (PIB) romand va plonger de 5,7% en 2020 d'après les banque cantonales romandes. C'est le pire repli qu'a connu l'économie de la région depuis l'après-guerre, dépassant de loin les effets de la crise mondiale de 2008/2009. Les mesures de soutien économique mises en place par les autorités fédérales et la reprise de certains secteurs durant l'été ont toutefois permis d'éviter la catastrophe, ont assuré ces banques face à la presse à Lausanne.

La contraction dépasse de loin celle des crises passées. La crise financière et économique de 2008/2009 n'a par exemple provoqué un repli de que de 2,0% en Suisse romande et de 2,2% dans toute la Suisse, contre une chute nationale de 6,2% cette année.

Une crise sans précédent...

"C'est la plus grave crise que l'on connaît depuis l'après-guerre" a déploré Jean-Pascal Baechler, conseiller économique à la Banque cantonale vaudoise (BCV). Toutes les branches économiques sont affectées, ce qui rend cette crise aussi exceptionnelle selon lui.

Le secteur industriel a en particulier souffert de la chute des exportations, celles des montres et des machines notamment, et enregistrera un recul de 15% cette année par rapport à 2019.

Ce ralentissement est cependant moins violent que celui vécu durant la crise de 2008/2009, précise M. Baechler. Les industries pharmaceutiques et chimiques ont par exemple été particulièrement solides, avec une grosse baisse en mai de 20% sur un an contre un quasi-retour à la normale avec un repli de 5% en août par rapport au même mois l'année dernière.

Selon l'expert de la Banque cantonale vaudoise, c'est le recul des services aux entreprises, le premier depuis longtemps, qui est le signe d'une crise majeure. La branche a enregistré une baisse en comparaison annuelle de 5% et cela "contribue grandement à la baisse générale du PIB romand en 2020" a affirmé Jean-Pascal Baechler.

Le taux de chômage s'achemine, lui, vers une hausse de 50%, passant de 3% en 2019 à 4,4% en 2020. "On n'a pas observé une explosion du chômage" a tempéré le conseiller économique, grâce à la mise en place rapide selon lui du chômage partiel dans la région.

La Suisse subissait déjà le ralentissement du commerce international au début de l'année et l'impact du franc fort sur ses exportations. "Oui on a été handicapé par un franc suisse surévalué, mais ce n'était pas davantage un problème durant la crise que ça l'est depuis quelques années" a expliqué l'analyste, présentant une courbe quasiment stable depuis quelques années de la surévaluation du franc par rapport à l'euro.

... mais moins marquée que celles d'autres pays

Malgré ces chiffres en baisse, "la Suisse ne s'en sort pas trop mal", par rapport à d'autres pays européens. Selon M. Baechler, le fait que la Suisse ait opté pour un semi-confinement au lieu d'un confinement total comme en France ou en Italie a permis au pays d'amoindrir les conséquences de la pandémie sur l'économie. Mais ce n'est pas le seul facteur.

"Notre économie est très diversifiée, très ouverte à l'international avec en parallèle un marché intérieur qui a continué de bien fonctionner" a décrypté Jean-Pascal Baechler. "La Suisse est moins orientée vers l'industrie lourde que son voisin allemand et est plutôt plus développée au niveau de l'industrie pharmaceutique".

Il y a donc pour lui des raisons d'être optimiste. Les six institutions cantonales tablent d'ailleurs sur une reprise du PIB de l'ordre de 4,5% en 2021 en Suisse romande, et de 4,9% au niveau national.

L'expert prévient tout de même: "Il faut rester prudent avec ce genre de prévisions. Il est difficile d'anticiper la manière dont les gouvernements vont réagir. La sortie du Royaume-Uni de l'UE n'est pas encore totalement actée, le franc suisse s'apprécie, les tensions entre la Chine et les Etats-Unis sont toujours présentes. Il faut composer avec les vieilles et les nouvelles incertitudes" a-t-il conclu.

nj/jh/rp