Paris (awp/afp) - Le redémarrage économique a dopé les bénéfices des établissements bancaires européens au deuxième trimestre, mais les taux d'intérêt bas restent un défi pour leur rentabilité, à l'heure où il leur faut de surcroît financer le virage numérique.

Les banques ont affiché un rebond spectaculaire de leur activité par rapport au deuxième trimestre 2020, qui portait la marque de la crise sanitaire du Covid-19. Et certaines ont même dépassé leurs niveaux d'avant-crise.

La première banque du continent, la française BNP Paribas, a ainsi signé la meilleure performance trimestrielle de son histoire avec un bénéfice net de presque 3 milliards d'euros. C'est environ 18% de mieux qu'au deuxième trimestre 2019.

Sa compatriote Société Générale revendique son meilleur résultat trimestriel depuis 2016 avec un bénéfice net de 1,4 milliard, effaçant sa lourde perte d'un an plus tôt et améliorant d'environ 30% son résultat trimestriel sur deux ans.

Ailleurs en Europe, la deuxième banque italienne UniCredit a doublé son bénéfice net sur un an à 1,03 milliard d'euros. Celui de la première banque espagnole Banco Santander a atteint deux milliards, après une perte de 11 milliards un an plus tôt.

L'allemande Deutsche Bank est aussi revenue dans le vert après plusieurs années de traversée du désert.

Baisse des provisions

Ces bons résultats se reflètent en Bourse: l'Euro Stoxx banks, l'indice des banques de la zone euro, affiche un gain de près de 10% depuis mi-juillet et de plus de 25% depuis le début de l'année.

"Les banques se sont très bien débrouillées ces six derniers mois", ont souligné les analystes de Barclays dans une note publiée mercredi.

Elles "bénéficient de la reprise de l'activité" et "d'une baisse des provisions pour pertes sur crédits", c'est-à-dire les réserves constituées pour faire face à d'éventuels défauts de remboursement des emprunteurs, expliquent-ils.

Pour ne rien gâter, le secteur s'est bien tiré des tests de résistance organisés par les superviseurs européens, selon lesquels il serait globalement capable d'encaisser une grave crise économique sur trois ans.

Le ratio de fonds propres "durs", indicateur clé de mesure de la solidité financière, passerait pour l'ensemble du secteur de 15% à environ 10%, soit un niveau jugé acceptable par les superviseurs après trois années de turbulences.

Certains établissements n'en ont pas moins terminé ces tests sur des scores assez bas, à l'image de Société Générale avec un ratio de 7,64% ou de Deutsche Bank avec 7,43%. Monte dei Paschi di Siena, la plus vieille banque du monde, en passe d'être rachetée par sa compatriote UniCredit, aurait même vu s'évaporer tous ses fonds propres.

Le "point noir" des taux d'intérêt

De façon générale, ces tests montrent que "le problème de faible rentabilité structurelle reste le talon d'Achille de beaucoup de banques européennes", soulignent dans une note les analystes de S&P Global Ratings.

"Le point noir, ce sont les taux d'intérêt. Tout est orienté dans le bon sens à l'exception des (activités dont les revenus dépendent des) intérêts, qui restent affectées par l'environnement de taux très bas, voire négatifs", explique à l'AFP Jérôme Legras, directeur de recherche chez Axiom AI.

Dans un tel environnement, il est plus compliqué de faire fructifier les dépôts des clients. Et les activités de prêt rapportent moins aux banques, au moment où elles doivent investir massivement pour moderniser leur informatique. D'autant qu'elles doivent faire face à la concurrence croissante d'une multitude de startups financières venant sur leur terrain, avec des services de paiement ou de crédit, et aux premières incursions dans la finance des géants mondiaux de la tech.

Certains établissements restent par ailleurs aux prises avec de coûteux plans de restructuration, à l'image de la deuxième banque allemande, Commerzbank: elle a essuyé une perte nette de 527 millions d'euros au deuxième trimestre, en raison notamment d'un important plan de départs volontaires pendant qu'elle force son virage numérique et ferme des centaines d'agences.

Le tout dans un contexte de révolution des usages bancaires, qui éloigne progressivement les clients des agences bancaires, nourrit la demande de services en ligne et contraint les banques à repenser en profondeur leurs modèles.

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