Ce verdict – l’un des plus élevés jamais prononcés dans une affaire liée au Roundup – s’inscrit dans une longue série de déconvenues judiciaires pour Bayer depuis son rachat de Monsanto en 2018. Une acquisition à 63 milliards de dollars qui, loin d’être une opération de croissance tranquille, s’est transformée en bourbier juridique et en débâcle économique : le groupe a déjà déboursé environ 10 milliards pour régler à l’amiable des milliers de litiges similaires. Et la tempête est loin d’être passée : plus de 60 000 dossiers sont encore pendants. Bayer a d’ailleurs mis de côté 5,9 milliards de dollars pour affronter la suite.
Dans le cas jugé à Atlanta, le jury a accordé 65 millions de dollars de dommages compensatoires – pour couvrir les préjudices subis par le plaignant – et pas moins de 2 milliards au titre des dommages punitifs, censés sanctionner l’attitude jugée fautive de l’entreprise.
Sans surprise, Bayer a rapidement fait savoir qu’il comptait faire appel, estimant que cette décision allait "à l’encontre du consensus scientifique mondial" ainsi que des évaluations des autorités sanitaires. Le groupe affirme disposer "d’arguments solides" pour faire annuler ou réduire drastiquement ces indemnisations, qu’il juge "excessives et inconstitutionnelles". Bayer souligne au passage que, dans les affaires déjà jugées de manière définitive, les dommages ont été en moyenne réduits de 90% par rapport aux montants initiaux fixés par les jurys.
Mais la pression monte. Début mars, le groupe a même averti les parlementaires américains qu’il pourrait envisager de retirer le Roundup du marché américain si aucune mesure de protection juridique n’était prise pour limiter sa responsabilité dans ces affaires. Une manière de pousser Washington à légiférer en sa faveur — ou une stratégie de dernier recours pour ne pas être enseveli sous les procédures. Le glyphosate, lui, continue de diviser science, justice et opinion publique.
L'action Bayer chutait de plus de 6% en matinée, à 22,51 EUR.
(Avec Reuters)