La veille de la publication, le titre Boeing accusait une baisse de 7% sur un an, et de 11% sur le seul dernier mois. Plusieurs signaux négatifs venaient s'ajouter à la morosité ambiante : la Chine a suspendu ses commandes d’avions et de pièces, en plein bras de fer commercial. Trois appareils destinés à une compagnie chinoise ont même été rapatriés. 

À la fin mars, Boeing recensait 130 avions commandés par des clients chinois, provenant de compagnies aériennes et de sociétés de leasing. selon les données publiées sur son site. Mais certains acheteurs préfèrent rester anonymes, ce qui pourrait gonfler ce chiffre.

Les analystes de Bank of America estiment d’ailleurs qu’une “large part” des 668 appareils commandés par des clients non identifiés pourraient, en réalité, venir de Chine. Un signe que, malgré les tensions commerciales et la suspension officielle de certaines commandes, la demande chinoise reste présente bien que discrète.

Autre problème : des difficultés persistantes dans la chaîne d’approvisionnement, qui freinent la montée en cadence de la production, malgré une demande en plein essor.

Des décisions stratégiques saluées

La vente de l’activité “Solutions numériques pour l’aviation”, incluant l’unité de navigation Jeppesen, à la société de capital-investissement Thoma Bravo pour 10,55 milliards de dollars, a eu un effet apaisant sur les marchés. Kelly Ortberg présente cette cession comme un moyen de se recentrer sur les activités principales et de consolider la notation de crédit. Le marché a salué l’initiative : l’action gagnait 2% avant même la publication des résultats trimestriels.

L’entreprise conserve d’ailleurs ses notations "investment grade" auprès des trois principales agences : S&P : BBB- ; Moody’s : Baa3 et Fitch : BBB-
Vendre des actifs n’est jamais un bon signe en soi, mais les efforts pour réduire la dette semblent porter leurs fruits.

Des chiffres meilleurs que prévu

Le chiffre d’affaires grimpe de 17,5%, à 19,5 milliards de dollars. Le bénéfice par action s’établit à -0,49 dollar, bien mieux que les -1,13 attendus. Côté livraisons, Boeing a livré 130 avions de ligne sur le trimestre, contre 83 un an plus tôt. Une belle remontée après une fin d’année 2024 marquée par une grève importante de presque 40 000 salariés pendant 50 jours et des problèmes de qualité.

Segment par segment : un redressement en marche

Avions commerciaux : le moteur du redressement

C’est le pilier du groupe et le principal motif d’optimisme. Boeing prévoit d’augmenter la cadence de production de ses deux modèles phares : le 737 et le 787, avec pour objectif 38 et 7 appareils par mois respectivement pour l’instant. La production du 737 avait été ralentie par la FAA (administration fédérale de l’aviation) à cause de plusieurs incidents. Selon CNBC, le groupe fera les démarches pour demander une augmentation à 42 par mois.

Le carnet de commandes reste massif : 460 milliards de dollars, soit 5 600 avions.

Défense, espace et sécurité : recul des revenus, mais des projets prometteurs

Ce segment recule de 9% en chiffre d’affaires. Toutefois, Boeing a été choisi pour construire le F-47, avion de combat de nouvelle génération pour l'US Air Force. Autre annonce : le début de l’assemblage du premier drone de ravitaillement aérien, avec des essais prévus cette année.

Services mondiaux : stabilité et visibilité

Parallèlement aux autres segments, la division “services mondiaux” affiche de solides performances. 

Concernant les deux dernières divisions, elles maintiennent un carnet de commandes solides qui prévaut de solides revenus futurs. 62 milliards de dollars pour la défense, l'espace et la sécurité (la commande pour l’US Air Force n’est pas encore comptabilisée) et 22 milliards de dollars pour les services mondiaux. 

Des avancées sur les programmes en difficulté

Certains projets à la traîne semblent reprendre des couleurs. Le programme de gros porteur, attendu initialement pour 2020, a franchi une étape clé vers sa certification. Le 737 Max 10, lui, a terminé une phase de vols d’essai, en vue de sa certification (la mise sur le marché était prévue pour 2023).

Boeing montre sa résilience en pleines turbulences. Alors que le dernier bénéfice enregistré par l’entreprise date de mi-2021, que la direction s’est vu remanié après une succession de problèmes relatifs à la qualité et la sécurité des avions. Les signaux d’un redressement pointent le bout de leur nez : pertes en baisse, production en hausse, discours rassurant. Boeing n’est toujours pas sorti de l’orage.