Bridgestone

BÉTHUNE (awp/afp) - Entre colère et espoir, environ 1.400 salariés de Bridgestone et leurs familles, élus et habitants de Béthune (Pas-de-Calais) ont marché silencieusement dimanche contre la fermeture annoncée de l'usine de pneumatiques qui emploie plus de 860 personnes.

"C'est une marche silencieuse pour montrer la tristesse de Béthune", a indiqué à l'AFP Stéphane Lesix (CFDT), secrétaire du Comité social et économique (CSE). "On veut garder Béthune, l'idée première, c'est garder Béthune, mais on se prépare à tout".

La manifestation, co-organisée par le maire Olivier Gacquerre (UDI) et l'intersyndicale, est partie aux alentours de 10h00 du site industriel où une équipe travaillait, et a relié sous quelques gouttes de pluie l'hôtel de ville. Sans drapeau syndical et sans slogan.

"Non à la fermeture de Bridgestone, solidarité avec les salariés", pouvait-on lire sur l'une des banderoles en tête de cortège portée par des enfants, des élus avec écharpe tricolore derrière eux.

"C'est difficile, le moral est au plus bas" au travail, rapporte Olivier, opérateur polyvalent, 28 ans chez Bridgestone, qui espère toujours que l'usine ne fermera pas.

Marie, 38 ans, venue avec ses enfants "par solidarité", ne se fait, elle, "pas d'illusion" sur le sort du site qui emploie son mari depuis 12 ans, mais veut "faire voir qu'on est là, malgré tout".

D'autres n'ont pas de proches à l'usine, mais se sentent concernés, anticipant les conséquences pour les sous-traitants qui verront leur activité baisser, pour l'économie et la vie locale qui en pâtiront.

"Il ne faut pas penser qu'à nous, mais aux jeunes et aux camarades de Béthune," souligne Jean-Claude, retraité vivant à quelques kilomètres, à Lillers, où il est conseiller municipal. "Je suis là pour défendre l'emploi. J'ai quatre petits-enfants, j'ai peur pour eux".

"SOS hôpital, SOS usine"

Une fois arrivé sur la grande place du centre-ville, le maire de cette ville de 25.000 habitants a fait applaudir les salariés, pour saluer leur "dignité".

"On attend une seule chose: savoir si oui ou non Bridgestone nous propose un plan B, avec la modernisation de la chaîne de production, un changement de produit", insiste Olivier Gacquerre, inquiet du sort de la "France périphérique": "On avait SOS TGV, SOS hôpital, maintenant on a SOS usine".

Selon le président du Conseil régional des Hauts-de-France Xavier Bertrand (ex-LR), présent à la manifestation, le salut de l'usine passera par l'investissement du groupe pour produire des pneus plus grands, "qui continuent à se vendre", avec l'aide de la Région et de l'Etat.

"Bridgestone ne peut pas partir comme ça, on ne jette pas les gens comme des kleenex", fustige-t-il.

Mi-septembre, Bridgestone avait brutalement annoncé la "cessation définitive" de l'activité du site, qui emploie plus de 860 personnes, à l'horizon 2021, invoquant une surcapacité de production en Europe et la concurrence des marques asiatiques à bas coût.

Le 21 septembre, une réunion s'était tenue sur place avec les ministres du Travail et de l'Industrie, la direction du groupe et les élus locaux.

La ministre déléguée à l'Industrie, Agnès Pannier-Runacher, avait déclaré que les dirigeants de Bridgestone avaient dit "examiner un certain nombre de scénarios", que le gouvernement entendait "contre-expertiser".

La direction de Bridgestone avait, elle, indiqué que la fermeture du site de Béthune était "la seule option" mais également qu'elle réfléchissait à des "projets alternatifs de reconversion du site, avec et sans Bridgestone".

Selon le maire de Béthune, une nouvelle réunion doit se tenir avec un ou des ministres la semaine du 12 octobre. La première réunion de négociation du plan de sauvegarde de l'emploi (PSE), qui doit durer cinq mois, aura lieu mardi.

Dans la zone d'emploi de Béthune-Bruay - une centaine de communes et 280.000 habitants -, l'usine Bridgestone, inaugurée en 1961, est l'un des plus gros employeurs, derrière PSA et Roquette.

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