Après un nouveau plongeon boursier vendredi, provoqué par un tweet du fonds américain Muddy Waters révélant qu'une filiale du groupe, Casino Finance, n'avait pas déposé ses comptes 2017, l'agence S&P a abaissé d'un cran sa note de crédit sur Casino à "BB" lundi matin, avec perspective négative.

L'endettement du groupe est selon elle, "depuis plus de deux ans supérieur à ce qu'impliquerait une note "BB+" tandis que "la récente chute du titre ainsi que l'écartement du spread de crédit de Casino et de sa maison-mère Rallye laissent anticiper des financements coûteux et des risques sur la structure du capital de Rallye".

L'agence évoque "les risques que font peser sur l'ensemble du groupe les échéances de dette de Rallye".

Dans la foulée, Casino a répondu par un communiqué confirmant ses objectifs financiers annuels, notamment en matière de réduction de dette et de cessions d'actifs, évoquant aussi "une bonne activité en France et à l'international depuis le début de l'année et particulièrement en juillet et août".

Le groupe, qui a dit faire l'objet "d'attaques spéculatives répétées", juge que son cours de Bourse ne reflète ni sa "résilience opérationnelle", ni sa "solidité financière" ni ses "ressources immédiatement disponibles".

Le distributeur a aussi déposé les comptes de sa filiale Casino Finance et publié des "compléments d'informations" détaillant notamment sa trésorerie, Casino Finance compris.

"Le groupe a perdu la confiance du marché. Il est maintenant urgent qu'il concrétise son plan de cessions qui constitue le seul moyen de faire remonter le cours de Bourse et d'alléger la pression sur Rallye", commente un analyste qui a souhaité garder l'anonymat.

"LE MARCHE VEUT DU CONCRET SUR LES CESSIONS"

"Casino confirme ses objectifs mais ce que le marché attend, c'est du concret sur les cessions", ajoute-t-il.

La valeur, qui a plongé de 46% depuis le début de l'année et touché de nouveaux plus bas depuis plus de 20 ans, cède encore -2,3435% à 14h05 à 26,67euros, alors que l'indice SBF 120 gagne 0,06%.

Le rendement des obligations à deux ans de Casino a grimpé à plus de 8% et le coût de son assurance contre un risque de faillite a atteint un record.

Le titre Rallye lâche quant à lui -3,5874% à 8,6 euros au même moment.

Depuis le mois de mai, l'inquiétude grandit sur les flux de trésorerie du groupe et la dette de sa maison mère, qui devra faire face à un remboursement de plus de 600 millions d'euros de dette obligataire au mois d'octobre.

La valeur des actifs de Rallye est estimée par les analystes aux environs de 1,9 milliard d'euros, pour une dette de 2,9 milliards.

Selon eux, faute de pouvoir faire appel au marché, Rallye devra tirer des lignes de crédit bancaire et, pour cela, nantir des titres Casino. Or, plus le cours de Casino est bas, plus Rallye a besoin de nantir de titres.

Pour certains, une baisse de Casino au-dessous de la barre des 25-27 euros pourrait poser d'importantes difficultés à Rallye pour ces nantissements.

"Au cours actuel, si on estime que Rallye ne peut plus recourir à des émissions de billet de trésorerie, près de 100% des actions Casino seraient nanties en octobre 2018", notent les analystes de Kepler Cheuvreux.

"PRESSION ACCRUE"

"Cela accroît la pression sur le groupe pour céder rapidement ses actifs", ajoutent-ils, estimant cependant que les risques de faillite sont faibles au regard des actifs que peut vendre Casino (CDiscount, immobilier).

Attaqué par Muddy Waters à la fin 2015 pour manque de transparence et pile de dettes, Casino avait été contraint de céder ses très rentables actifs asiatiques pour regagner la confiance des investisseurs.

A nouveau mis sous pression par le marché au printemps dernier, il a lancé un deuxième plan de cession d'actifs de 1,5 milliard d'euros, sans rassurer davantage.

En juillet dernier, le groupe a de nouveau été sanctionné pour avoir annoncé une baisse de la dette de sa maison-mère finalement imputable à des transferts en provenance de sa holding brésilienne.

Il a encore été plombé, en août, par une note de Bernstein ayant révisé en baisse la valorisation du groupe pour prendre en compte l'impact financier de ses accords de franchise en France, des calculs contestés par le distributeur.

Le titre Casino pourrait, selon Kepler Cheuvreux, sortir de l'indice MSCI en novembre.

(Avec Benjamin Mallet, édité par Cyril Altmeyer)

par Pascale Denis