Après la tempête soulevée vendredi par un tweet de Muddy Waters concernant l'absence de dépôt des comptes 2017 de la filiale Casino Finance à l'expiration du délai légal, que nous avons relaté ici, Casino a passé un weekend studieux pour tenter d'inverser la tendance. L'action a sombré de -10,2% lors de la dernière séance de la semaine précédente, pour finir à 27,31 EUR. Conformément à ses engagements, le distributeur a déposé les comptes de Casino Finance samedi. Le site Infogreffe précise ce matin que les documents sont bien disponibles.

En parallèle, Casino a complété la présentation de résultats qui avait été fournie aux investisseurs en marge de ses comptes semestriels, en ajoutant quatre "slides" (numérotés 53 à 56) pour évoquer des critiques et interrogations récentes :
• La slide 53 porte sur la position de trésorerie par entité du périmètre France.
• La slide 54 précise la trésorerie détenue en devises étrangères, notamment au Brésil, où "la trésorerie disponible en BRL est variable. Elle était de 636 millions d'euros au 31 décembre 2017, de 578 millions d'euros au 30 juin 2018 et a été réduite de manière significative depuis lors", écrit le groupe.
• La slide 55 traite de diverses interrogations sur l'impact des exceptionnels sur le besoin en fonds de roulement en France.
• La slide 56 s'efforce de préciser que la performance dynamique de juillet n'est pas liée à la Coupe du Monde de football mais repose sur les qualités intrinsèques de la société et qu'elle est pérenne.

Une communication à revoir

Les doutes sur la capacité du groupe à honorer un endettement élevé quoiqu'en baisse ne devraient pas se dissiper, surtout si des zones d'ombre persistent. L'exemple Casino Finance en est une parmi les autres. Et ce n'est pas l'excuse piteuse servie par la société qui va arranger les choses : un "retard technique", qui aurait empêché le dépôt en temps et en heure. Quand on se sait scruté comme l'est Casino, on évite ce genre d'épisode, même si les comptes de Casino Finance avait été intégrés dans les comptes consolidés. 

Pour couronner le tout, Standard & Poor's a dégradé ce matin la dette de la société de "BB+" à "BB", pour une perspective d'évolution qui reste négative. La solidité financière s'ancre davantage en catégorie spéculative, puisque la catégorie d'investissement démarre deux crans au-dessus, à "BBB-". Une décision dont le distributeur "prend acte", tout en la critiquant car elle "ne prend pas en compte dans son appréciation le plan de cessions de 1,5 milliard d'euros en cours de réalisation". Il considère que cela ne modifie pas son profil de liquidité et confirme ses objectifs 2018, notamment sur le désendettement.

Qu'en pense S&P ?

"La dette et le ratio d'endettement de Casino sont supérieurs à nos anticipations depuis plus de deux ans, en dépit d'une bonne dynamique commerciale et des engagements du management à vendre des actifs pour réduire la dette", écrit Raam Ratnam, en charge du dossier chez S&P. Il estime que le plongeon du titre en bourse et l'élargissement des spreads de crédit "laissent entrevoir des risques pour Rallye, à la fois pour son refinancement et sa structure capitalistique". Pour Ratnam, si la division Casino elle-même est en partie immunisée contre le risque crédit, l'ensemble "Casino, Rallye et ses holdings jusqu'à Finatis" s'est affaibli et présente des risques. En particulier parce que Rallye doit honorer 1 milliard d'euros d'échéances dans les mois à venir (700 millions en octobre 2018 et 300 en mars 2019). Si le holding dispose de 1,7 milliard d'euros de ligne de crédit, 1,4 milliard sont adossées à des actions Casino (les lignes concernées sont nanties en actions Casino lors du tirage). Il faut aussi noter que Foncière Euris a aussi nanti des titres Rallye. Bref, la baisse des actions de la "galaxie" Naouri n'est pas une bonne nouvelle pour le bilan du groupe. Et ça, les spéculateurs à la baisse l'ont bien compris.