(Actualisation: commentaires d'analystes, contexte et cours de Bourse)

PARIS (Agefi-Dow Jones)--Le distributeur Casino a annoncé jeudi que le conseil d'administration de sa filiale brésilienne, Grupo Pao de Açucar (GPA), étudiait la scission de son enseigne Assai, spécialiste du libre-service de gros (cash and carry).

Les analystes estiment que cette opération est le prélude à la cession de tout ou partie des activités du groupe en Amérique latine.

"En tentant ainsi de mieux valoriser l'ensemble de ses actifs en Amérique latine, Casino espère surtout améliorer ses conditions de refinancement, directement liées à la valeur de ses actifs, et accroître mécaniquement son cours de Bourse", confie une source au fait de l'opération à l'agence Agefi-Dow Jones.

Le marché a bien reçu le message puisque l'action Casino progresse de 3% en milieu de séance à la Bourse de Paris, à 23,16 euros.

Vers une double cotation d'Assai

Dans un communiqué, GPA a indiqué qu'en cas de scission d'Assai, l'enseigne ferait l'objet au cours du premier trimestre de 2021 d'une cotation à la Bourse de Sao Paulo, sur le segment B3 du Novo Mercado, ainsi qu'aux Etats-Unis, sur le New York Stock Exchange, après l'émission de certificats américains de dépôt, ou American depositary receipts (ADR).

"L'objectif d'une telle opération est d'optimiser le potentiel d'Assai, d'une part, et des activités de distribution alimentaire plus traditionnelles de GPA et Exito, d'autre part", a expliqué Casino dans un communiqué. Cette opération permettra aux différentes enseignes de Casino en Amérique latine de fonctionner de manière autonome, de se concentrer sur leur modèle d'entreprise et sur les opportunités de leurs marchés respectifs, a ajouté le distributeur.

GPA, qui regroupe les enseignes de proximité ou de supermarchés Pao de Açucar, Extra et Exito, et Assai bénéficieront par ailleurs d'un accès direct aux marchés de capitaux et aux différentes sources de financement, créant ainsi davantage de valeur pour leurs actionnaires, a complété Casino. A l'issue de cette scission, Casino détiendrait 41,3% du capital d'Assai, ce qui correspond à son taux de participation dans GPA.

Saluant cette décision, JPMorgan Cazenove explique que la scission envisagée pourrait montrer que la valorisation de l'enseigne Assai, seule, est probablement plus élevée que la capitalisation boursière actuelle de GPA. Dans le même temps, la valeur de GPA pourrait augmenter de 34% à 100%, estime la banque d'affaires américaine, si Assai venait à s'échanger en Bourse selon un ratio valeur d'entreprise sur excédent brut d'exploitation compris entre celui de Carrefour Brésil (8) et celui de Walmex (12) pour 2021.

Carrefour pressenti sur certains actifs

"Ce projet de scission se justifie d'un point de vue industriel car GPA et Assai exploitent des formats de magasins très différents, pour lesquelles les synergies sont infimes", se félicite un autre analyste qui préfère rester anonyme. Convaincu que l'opération peut créer de la valeur pour les actionnaires de GPA et les futurs porteurs de titres Assai, dont Casino, ce même intermédiaire financier note toutefois qu'"un GPA aminci pourrait faire l'objet d'une offre de rachat par un concurrent tel Carrefour à moyen terme".

Analyste de Bryan, Garnier & Co, Clément Genelot estime pour sa part que Carrefour pourrait être intéressé par la reprise des magasins de proximité de GPA, tandis que l'enseigne Assai serait plutôt une cible de choix pour un acteur tel Grupo Big. "Les autorités de la concurrence bloqueraient probablement un rachat d'Assai par Carrefour", assure Bryan, Garnier & Co.

Contactée par l'agence Agefi-Dow Jones, une porte-parole de Carrefour n'avait pas de commentaire à apporter sur ces propos d'analystes dans l'immédiat.

Invest Securities anticipe aussi des cessions: "La recherche d'une liquidité croissante de la participation de Casino dans GPA est une éventualité qui pourrait participer à une cession postérieure d'une partie des actifs pour alimenter les désinvestissements imposés au groupe Casino, dont le programme semble prendre quelque retard".

Un vaste plan de désendettement en cours

Les résultats semestriels dévoilés par Casino à la fin juillet ont été jugés décevants par les analystes, notamment parce que le distributeur n'est pas parvenu à rassurer sur sa capacité à se désendetter et à respecter les engagements pris avec ses créanciers. La dette financière nette consolidée de Casino a augmenté de 2,8% en un an, pour s'établir à 4,83 milliards d'euros au 30 juin 2020, dont une dette nette de 2,8 milliards d'euros en France (-3,4%).

En raison d'une structure actionnariale fortement endettée, les sociétés mères de Casino, dont Rallye, ont été placées en procédure de sauvegarde le 23 mai 2019. Depuis le début de l'année, Casino a notamment vendu trois entrepôts et 567 magasins Leader Price dans l'Hexagone à Aldi, pour une valeur d'entreprise de 735 millions d'euros, et cédé sa filiale de distribution dans l'océan Indien, Vindémia, pour une valeur d'entreprise de 219 millions d'euros.

Ces ventes s'inscrivent dans le cadre du plan établi par le groupe, visant à réaliser pour 4,5 milliards d'euros de cessions entre mi-2018 et le premier trimestre de l'année prochaine.

-Dimitri Delmond, Agefi-Dow Jones; +33 (0)1 41 27 47 31; ddelmond@agefi.fr ed: VLV - ECH

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