FRANCFORT (dpa-AFX Broker) - Le "sauvetage d'urgence" de Credit Suisse, en grande difficulté, par UBS n'a pas suffi à apaiser les tensions dans le secteur bancaire lundi. Les craintes d'un incendie généralisé sont persistantes. La perspective d'un défaut total sur certains emprunts de plusieurs milliards de la grande banque suisse a notamment pesé lourdement sur les cours des banques et des assureurs. C'est la raison pour laquelle de nombreuses valeurs sectorielles avaient déjà été mises sous pression en Asie. La Banque centrale européenne (BCE) a déclaré que le secteur bancaire européen était résistant.

L'indice du secteur bancaire européen, le Stoxx Europe 600 Banks, a perdu 2,4 % après avoir atteint son plus bas niveau depuis la mi-novembre, avec une baisse de plus de 5 % à certains moments. La semaine précédente, le baromètre du secteur avait déjà perdu 11,5 % dans le sillage de la crise des banques régionales américaines et des incertitudes concernant l'avenir du Crédit Suisse.

Fin février encore, l'indice avait atteint son plus haut niveau depuis 2018 dans le contexte du retournement des taux d'intérêt. Depuis ce sommet intermédiaire, la baisse s'élève désormais à près d'un cinquième. Le désastre des cours s'est poursuivi pour les actions du Credit Suisse, qui ont encore chuté de deux tiers pour atteindre un nouveau plus bas record. Un titre ne vaut désormais même plus un franc. Après avoir perdu 16%, les actions UBS n'ont plus perdu que 5%.

Le sauvetage de la banque suisse, négocié au cours d'un long marathon de négociations ce week-end, n'a donc pas eu l'effet de signal escompté sur le marché pour rassurer les marchés financiers.

Konstantin Oldenburger, du courtier CMC, estime qu'il est tout à fait compréhensible que les investisseurs s'agitent face aux turbulences du marché bancaire suisse, autrefois considéré comme sûr. "Avant le week-end, toutes les autorités faisaient semblant de croire que tout était sous contrôle", écrit-il. Mais aujourd'hui, avec le rachat de Credit Suisse par UBS et les nouvelles mesures de soutien monétaire de la Fed, "les événements s'enchaînent et suggèrent exactement le contraire aux investisseurs".

L'UBS rachète sa petite rivale locale pour trois milliards de francs suisses (un peu plus de 3 milliards d'euros). Elle assume en outre des pertes pouvant aller jusqu'à cinq milliards de francs. A cela s'ajoutent une garantie de perte de l'Etat de 9 milliards de francs et des promesses de liquidités pouvant atteindre 200 milliards de francs. En outre, six grandes banques centrales, dont la Banque centrale européenne et la Réserve fédérale américaine, ont augmenté leur rythme de travail pour fournir des liquidités en dollars au système financier.

Michael Hewson, collègue de CMC chez Oldenburger, a souligné que certains détenteurs d'obligations du Crédit Suisse subissent désormais d'énormes pertes. Les obligations subordonnées, appelées AT1, font l'objet d'un défaut de paiement. La Deutsche Bank a déclaré entre-temps que son investissement dans ces titres était "quasiment nul". Une chute des cours de près de 11% par moments n'a pas pu être évitée non plus, alors que la dernière baisse était encore de plus de 3%. Les actions de la Commerzbank ont connu une baisse similaire, mais la banque n'a pas d'investissement dans les obligations AT1. Les actions Allianz ont baissé d'un pour cent.

Anke Reingen, experte chez RBC, a écrit que même s'il était peu probable qu'UBS privilégie cette voie, il semble que ce soit une étape nécessaire, non seulement pour les banques suisses, mais aussi pour l'ensemble du secteur bancaire mondial, en ce qui concerne cette acquisition qui semble avoir été approuvée par les autorités politiques et de surveillance.

Ce que cela signifie pour l'action UBS est pour l'instant controversé parmi les analystes : Reingen, par exemple, estime que l'acquisition est attrayante à long terme. Alastair Ryan, analyste chez Bofa, a également relevé la note d'UBS, y voyant un potentiel de synergies considérable et recommandant donc désormais l'achat.

En revanche, la Société Générale française a supprimé sa recommandation d'achat et les analystes de Keefe, Bruyette & Woods ont également dégradé le titre UBS de "Market Perform" à "Underperfrom". Certes, l'action concertée dissipe pour l'instant les craintes de contagion du marché et, compte tenu du faible prix d'achat, il pourrait s'agir d'une opération prometteuse, a fait valoir l'expert du secteur Thomas Hallett. Mais pour l'instant, la transaction apporte beaucoup d'incertitude.