PARIS (Reuters) - Les Bourses européennes ont terminé en baisse jeudi et Wall Street évoluait également dans le rouge à mi-séance dans la crainte d'une accélération du resserrement monétaire aux Etats-Unis, ce qui pourrait à terme affecter la croissance mondiale.

À Paris, le CAC 40 a accusé une perte de 1,01% à 6.206,26 points. Le Footsie britannique a reflué de 1,56% et le Dax allemand de 0,64%.

L'indice EuroStoxx 50 a abandonné 0,94%, le FTSEurofirst 300 0,62% et le Stoxx 600 0,75%.

Aux Etats-Unis, les marchés monétaires tablent majoritairement sur une hausse de 75 points de base du coût du crédit en juin alors que de nouvelles données ont montré que l'inflation avait certes ralenti en avril mais qu'elle demeurait à un niveau très élevé.

Selon le département américain du Travail, les prix à la production ont progressé de 11,0% sur un an en avril, contre un gain de 11,5% le mois précédent, et ceux à la consommation ont augmenté de 8,3% après +8,5% en mars.

"Ce que nous constatons, c'est que l'inflation commence à ralentir, mais le rythme n'est pas aussi rapide qu'espéré. Je pense donc que les marchés sont toujours dans la crainte de l'inflation", a déclaré Gene Goldman, directeur des investissements chez Cetera Investment Management.

"Il y a vraiment beaucoup d'incertitudes autour de la Fed en ce moment. Si elle se montre trop agressive, cela va nuire à la croissance économique, mais (si) elle est trop conservatrice, une inflation plus élevée pénalisera la consommation, ce qui affectera également la croissance", a-t-il ajouté.

Dans la zone euro, où l'inflation évolue à 7,5% en rythme annuel, plusieurs responsables de la Banque centrale européenne, à l'image du gouverneur de la banque centrale d'Irlande, Gabriel Makhlouf, et de Peter Kazimir, son homologue à la banque centrale de Slovaquie, ont de nouveau exhorté l'institution à s'attaquer à la hausse des prix.

"Nous nous attendons à ce que les données sur l'inflation restent une préoccupation centrale pour les décideurs politiques et les investisseurs au cours des prochains mois", écrit dans une note Mark Haefele, directeur des investissements chez UBS Global Wealth Management.

Parallèlement, la guerre en Ukraine, les sanctions occidentales contre la Russie, les restrictions sanitaires en Chine continuent de peser sur le moral des investisseurs.

Signe de la nervosité du marché, l'indice mesurant la volatilité aux Etats-Unis évolue au-dessus des 33 points et son équivalent européen a fini en hausse de 4,1% à 32,3 points.

VALEURS EN EUROPE

Sur le Stoxx 600 paneuropéen, tous les principaux secteurs ont terminé dans le rouge, la consommation cyclique (-1,32%), les ressources de base (-2,94%) et l'automobile (-1,22%) accusant l'une des plus fortes baisses.

Le compartiment du luxe, exposé à la Chine, a fléchi avec Kering, LVMH, Hermès, Richemont ou encore Tod's, qui ont perdu de 1,33% à 2,68%.

Les résultats de Siemens (-2,48%), qui a annoncé des dépréciations et des charges en raison de son retrait de Russie, et de HeidelbergCement (-4,64%) ont déçu, tandis que ceux de STMicroelectronics (+3,97%) Commerzbank (+0,26%) ont été bien accueillis.

L'opérateur télécoms britannique BT (+0,96%) a profité de l'annonce de la finalisation d'un accord de fusion de sa division de contenus sportifs avec Discovery.

A WALL STREET

Au moment de la clôture en Europe, le Dow Jones reculait de 0,95%, le Standard & Poor's 500 de 0,79%, mais le Nasdaq de 0,37%.

La séance est volatile, alimentée par les craintes sur les taux d'intérêt et les dernières déclarations de la secrétaire américaine au Trésor américain, Janet Yellen, qui a assuré que la Réserve fédérale américaine avait un plan pour réduire l'inflation sans provoquer une récession.

Le compartiment technologique cède 1,74%. Apple, qui a perdu mercredi sa place de première capitalisation boursière au monde au profit de Saudi Aramco, abandonne encore de 1%, pénalisé par l'avertissement de Foxconn, qui a fait état d'un ralentissement de la demande dans les produits électroniques.

Dans les résultats d'entreprises, Walt Disney reflue de 2,6% après un deuxième trimestre inférieur aux attentes. Le géant du divertissement a en outre prévenu que les problèmes d'approvisionnement et la hausse des coûts salariaux pourraient affecter ses comptes.

LES INDICATEURS DU JOUR

Les données préliminaires publiées jeudi par l'Office national de la statistique (ONS)ont montré que l'économie britannique avait enregistré une contraction inattendue en mars, de 0,1%, à la suite d'une chute des ventes de véhicules liée aux problèmes de chaînes d'approvisionnement.

Les inscriptions au chômage aux Etats-Unis ont augmenté de manière inattendue la semaine dernière, à 203.000.

CHANGES

L'indice dollar, qui mesure les variations du billet vert contre un panier de devises, gagne 0,73%, au plus haut depuis 20 ans, profitant à la fois des chiffres de l'inflation aux Etats-Unis et de son statut d'actif refuge.

L'euro, en chute de 1,22%, à 1,0383 dollar, évolue à son plus bas niveau depuis janvier 2017.

Dans les cryptomonnaies, le bitcoin, tombé à 25.401,05 dollars, est à un plus bas de 16 mois.

TAUX

Le rendement des Treasuries à dix ans recule de 7,1 points de base à 2,8425%, pénalisé davantage par les doutes sur la croissance économique à long terme que l'inflation à court terme.

L'écart entre les rendements entre les obligations américaines à dix ans et celles à deux ans, qui permet de mesurer le risque de récession, est désormais de 26 points de base.

En Europe, le rendement du Bund allemand à dix ans a perdu 13,1 points de base à 0,872% et son équivalent français 24,5 points à 1,384%.

PÉTROLE

Les cours pétroliers sont également affectés par les craintes d'une récession, qui prennent le pas sur les inquiétudes sur l'offre et les tensions géopolitiques.

Le Brent perd 0,41% à 107,95 dollars le baril et le brut léger américain (West Texas Intermediate, WTI) recule de 0,88% à 106,64 dollars.

(Reportage Claude Chendjou, édité par Sophie Louet)

par Claude Chendjou