Zurich (awp) - Credit Suisse a puisé dans les vieilles recettes au moment de repenser son organisation. Le numéro deux bancaire helvétique va passer un nouveau coup de rabot dans la banque d'affaires, cédant l'unité à l'origine de la coûteuse affaire Archegos. Comme également attendu, la gestion de fortune sera regroupée au sein d'une seule et même division.

Ces mesures, qui seront conduites ces trois prochaines années, étaient largement anticipées par les observateurs. Elles ont été annoncées dans le cadre de la journée des investisseurs, organisée à Londres en marge des résultats au 3e trimestre.

La grande banque va ainsi créer une nouvelle division de gestion de fortune, fusionnant International Wealth Management (IWM), Asia-Pacific (Apac) et l'activité dédiée de la banque universelle suisse (SUB). Credit Suisse met ainsi un terme à la "régionalisation" décidée il y a six ans par l'ancien directeur Tidjane Thiam, emporté en 2019 par l'affaire des filatures de cadres. Autre mesure forte, l'unité Prime Services sera en grande partie liquidée.

Cité dans un communiqué, le nouveau président António Horta-Osório veut replacer la gestion du risque au coeur du modèle d'affaires, mais également promouvoir une culture mettant l'accent sur la responsabilité et l'"obligation de rendre des comptes".

La réorganisation doit permettre à M. Horta-Osório d'imprimer sa marque dans un contexte difficile. Les nombreux litiges - nouveaux ou anciens - ont fortement pesé sur la performance et terni la réputation de la banque depuis l'entrée en fonctions du Portugais en avril.

Sous couvert de changements, Credit Suisse suit en fait la voie tracée, continuant à renforcer la gestion de fortune au détriment de la banque d'affaires, une stratégie de réduction des risques appliquée depuis le départ en 2015 de l'ex-patron Brady Dougan. Quelque 3 milliards de francs suisses seront ainsi ponctionnés chez Investment Bank et réalloués à la toute nouvelle entité Wealth Management.

Engagement de 500 conseillers

La nouvelle organisation reposera sur quatre divisions, contre cinq actuellement, et sera accompagnée d'un investissement de 1 à 1,5 milliard de franc par an pour en assurer le développement. Lors de la journée des investisseurs, le directeur financier David Mathers a insisté sur la nécessité d'économiser afin de financer ces mesures.

L'effectif de la nouvelle division Wealth Management sera renforcé de 15% d'ici 2024 à 500 conseillers. L'objectif est d'atteindre 1100 milliards de francs suisses de masse sous gestion d'ici trois ans, soit une augmentation de 200 milliards par rapport au niveau actuel, selon les indications de Credit Suisse.

L'activité dévolue aux fonds spéculatifs sera cédée d'ici fin 2022. Prime Services est à l'origine de la débâcle Archegos, qui a coûté plus de 5 milliards de francs suisses à la grande banque au premier semestre. L'absence de synergies avec la gestion de fortune a fait pencher la balance en faveur du désinvestissement, a précisé Christian Meissner, chef de la division Investment Bank.

Alors que des rumeurs évoquaient la cession de l'activité de gestion d'actifs, celle-ci est maintenue au sein de la structure. La division Asset Management a été affectée par l'affaire des fonds en liquidation Greensill, du nom de la société britannique d'affacturage en faillite.

Sur le plan géographique, Credit Suisse se reposera sur quatre régions, à savoir la Suisse, la zone Europe-Moyen-Orient-Afrique (Emea), l'Asie-Pacifique et le continent américain.

Les analystes ne se montrent guère surpris par des mesures largement attendues, néanmoins saluées comme un pas incontournable. La réorganisation de Credit Suisse ressemble davantage à une évolution qu'à un "big bang", note la banque Vontobel, qui y voit un remake de celle conduite par Tidjane Thiam en 2015. Morgan Stanley met en garde contre une mise en application s'annonçant compliquée.

A la Bourse, l'action Credit Suisse a terminé en chute de 4,8% à 9,42 francs suisses, dans un SMI en hausse de 0,16%.

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