La Commission de la concurrence indienne a mené en mars des perquisitions surprises dans les bureaux locaux des agences de publicité GroupM (propriété de WPP), Interpublic, Publicis et Dentsu, ainsi que dans les bureaux d'un organisme de radiodiffusion indien et d'une association d'entreprises de publicité.
Un document de la CCI daté du 7 février et consulté vendredi par Reuters apporte un nouvel éclairage sur les allégations selon lesquelles trois cartels distincts opéraient par l'intermédiaire de trois groupes industriels différents : l'Indian Society of Advertisers (ISA), l'Advertising Agencies Association of India (AAAI) et l'Indian Broadcasting and Digital Foundation (IBDF).
Avant les perquisitions, le document de la CCI indique qu'elle a examiné des preuves montrant que les fautes présumées étaient courantes depuis au moins 2023 et que les agences de publicité échangeaient des informations commercialement sensibles sur des groupes WhatsApp et s'étaient mises d'accord pour respecter des structures de commission préétablies.
« L'AAAI et ses membres enfreignent » les lois sur la concurrence, a noté la CCI dans son examen initial, tout en ordonnant l'enquête qui a déclenché les perquisitions de mars, selon le document.
L'AAAI organisait également souvent des réunions virtuelles entre ses membres afin d'harmoniser les prix et les réponses à communiquer aux clients, et discutait de « mesures de rétorsion » à l'encontre des membres qui ne respectaient pas ces directives, selon le document.
Le groupe « a également fixé la formule de calcul des honoraires en cas de services payants aux annonceurs », a déclaré la CCI.
Les groupes - l'AAAI, qui représente GroupM, Dentsu et Publicis, l'ISA, qui compte des dizaines d'entreprises indiennes et étrangères parmi ses membres, et le groupe IBDF, qui regroupe des diffuseurs - n'ont pas répondu aux questions de Reuters.
La CCI n'a pas non plus répondu à une demande de commentaires.
La CCI ne divulgue pas publiquement les détails des enquêtes sur la fixation des prix. Reuters a rapporté en mars que les allégations concernaient une collusion entre des agences d'achat d'espace publicitaire et des diffuseurs, et que l'affaire avait été déclenchée après que Dentsu ait fait des révélations dans le cadre d'un programme fédéral de dénonciation.
Ces perquisitions jettent une ombre sur le secteur des médias et de la radiodiffusion en pleine croissance en Inde, qui compte Reliance-Disney et Sony parmi ses principaux acteurs, et pourraient modifier la manière dont les publicités sont tarifées et vendues dans le pays.
Détaillant les allégations, le document de la CCI indique que les annonceurs ont « mis en place un cartel d'acheteurs », tandis que les diffuseurs qui fournissent des chaînes ont séparément engagé une « action collective visant à s'abstenir d'accorder des remises » aux clients.
Un autre cartel « existe dans le segment des agences de publicité et des tentatives sont en cours » pour en créer un dans le segment de la création, ajoute la CCI.
Les trois groupes industriels « coordonnent également leurs activités et se livrent à des négociations collectives [...] sur des questions qui devraient idéalement être négociées de manière indépendante », a-t-il ajouté.
« Les associations industrielles respectives semblent élaborer des lignes directrices, des avis ou des paramètres de négociation [...] afin de décrocher les intérêts commerciaux de leurs membres », a-t-elle ajouté.
Ces dernières semaines, l'AAAI a demandé à ses membres d'éviter toute discussion sur les prix lors des réunions auxquelles le conseiller juridique du groupe doit être présent, a rapporté Reuters.
Cette enquête intervient dans un contexte de bouleversements majeurs du paysage publicitaire indien, suite à la fusion, l'année dernière, entre Walt Disney et les actifs médiatiques indiens de Reliance, pour un montant de 8,5 milliards de dollars, qui détiendrait 40 % du marché publicitaire dans les segments de la télévision et du streaming.
L'Inde est le huitième marché publicitaire mondial, avec des revenus estimés à 18,5 milliards de dollars l'année dernière, selon GroupM.
L'enquête de la CCI devrait se poursuivre pendant plusieurs mois avant que les conclusions finales ne soient rendues publiques.