easyJet n’est pas Ryanair. Le fantasque fondateur et directeur général de la seconde, Michael O’Leary, a beau dire que le secteur des compagnies aériennes n’a presque jamais été dans une aussi bonne passe, son rival aux fuselages orangés tarde à récolter les fruits de cette félicité en bourse. Voir Ryanair fait bande à part, publié plus tôt cette semaine dans ces mêmes colonnes.
Il y a pourtant du mieux, indiscutablement, ce qui confirme la tendance générale à l’amélioration que nous décrivions l’an dernier. L’année 2023 avait profité à fond des « revenge holidays » post-pandémie ; l’année 2024 avait été pareillement heureuse, et la compagnie avait coup sur coup réalisé les meilleurs cash-flows libres de son histoire.
Cette bonne dynamique continue sur le premier semestre de l’année fiscale 2025, avec un cash-flow libre proche de ses records historiques. Sur dix ans, c’est d’ailleurs le quatrième meilleur semestre pour la compagnie, dont le bilan a été nettoyé suite aux deux dernières augmentations de capital.
En matière de chiffre d’affaires, c’est aussi le meilleur premier semestre à dix ans. La précision est importante car l’activité est saisonnière, avec des volumes d’activités très supérieurs durant les seconds semestres puisque ces derniers couvrent les vacances d’été.
La providence heureuse dont profitent toutes les compagnies aériennes en Europe est due à un concours de circonstances : nonobstant la conjoncture économique morose, les réservations tiennent bon ; les retards de livraison chez Boeing et Airbus entraînent des restrictions de capacité, et par extension une hausse des revenus par siège pour les compagnies ; tandis que le prix du pétrole se morfond sur ses planchers.
Toutes ces bonnes nouvelles ne sont pas encore pleinement reflétées dans la valorisation d’easyJet. La capitalisation boursière de la compagnie, si elle rebondit depuis quelques semaines, traduit toujours des multiples de profits deux fois inférieurs à ceux que les investisseurs attribuent généreusement à sa rivale Ryanair.
Ceux d’entre eux qui voudraient parier sur un rattrapage ont peut-être une carte à jouer intéressante sur le court terme. Sur le long terme, il s’agira de ne pas perdre de vue que la destruction de valeur fut épique chez easyJet comme chez tant d’autres — ceci, malgré un chiffre d’affaires qui a doublé sur la dernière décennie.