ajoute déclarations de M. Boccia

CERNOBBIO (awp/afp) - Les entrepreneurs italiens, inquiets de la politique à venir du gouvernement populiste, ont été quelque peu rassurés par les dernières déclarations de l'exécutif, même s'ils attendent encore le contenu exact du budget.

Ces dernières semaines, la colère commençait à gronder dans les rangs du patronat, certains membres du principal syndicat, la Confindustria, évoquant même de possibles manifestations pour protester contre l'attitude du gouvernement à leur égard.

Parmi les causes de la grogne: l'adoption du "décret-loi +Dignité+", cheval de bataille de Luigi Di Maio, ministre du Travail et chef de file du Mouvement 5 Etoiles (M5S, antisystème), qui limite le recours aux contrats à durée déterminée (CDD) et pénalise licenciements et délocalisations.

Ils se disaient aussi inquiets d'un éventuel abandon des politiques industrielles - alors que le plan "Industrie 4.0" du précédent gouvernement avait donné un véritable élan pour moderniser les entreprises - mais aussi d'un non-respect des règles budgétaires européennes.

Cette crainte a enflammé les marchés financiers et affecté du même coup les banques italiennes.

Après les déclarations cette semaine du vice-Premier ministre, Matteo Salvini (Ligue, extrême droite), qui a promis un respect de ces règles européennes, c'est son binôme Di Maio qui a lancé un message d'apaisement samedi.

"Nous confirmerons Industrie 4.0 et la baisse de la charge fiscale se fera (...) Nous ne sommes plus antagonistes, nous avons travaillé (...) pour trouver ensemble des solutions concrètes" aux problèmes administratifs des entreprises, a-t-il déclaré au quotidien économique Il Sole 24 Ore.

Conséquence: un certain soulagement du côté des entrepreneurs réunis à Cernobbio (nord) pour le forum The European House - Ambrosetti, même s'ils attendent encore le budget qui doit être présenté avant le 15 octobre à Bruxelles.

"Il y avait un malaise fort au début vis-à-vis de ce gouvernement" mais désormais "le ton a changé", ce qui donne "l'espoir que les choses puissent s'améliorer", a déclaré à l'AFP Vincenzo Boccia, président de la Confindustria.

"On commence à parler d'un plan à moyen terme, à vouloir ne pas faire croître de manière excessive le déficit", a-t-il dit, précisant: la loi de finances "sera le banc d'essai de ce gouvernement".

Le président de Brembo, Alberto Bombassei, se dit, lui, "un petit peu rassuré" par les dernières déclarations mais "attend désormais qu'elles se traduisent en actes".

"Nous sommes un pays industriel et vivons des exportations. Il est donc fondamental pour nous d'avoir de bons rapports avec les autres pays et une bonne image à l'étranger pour pouvoir vendre nos produits", a-t-il souligné.

"Apprentissage"

"Le décret +Dignité+ n'a pas plu" aux entrepreneurs mais "maintenant, nous regardons de l'avant", a noté la présidente du géant pétrolier Eni, Emma Marcegaglia.

"Il est important que le prochain budget pousse la croissance et les politiques industrielles qui servent aux entreprises à être plus compétitives", a-t-elle déclaré, en rappelant que l'Italie avait "la plus faible croissance en Europe".

"Et dans le même temps, il faut évidemment maintenir le budget dans les clous, à la fois pour respecter les règles européennes, ne pas avoir de problèmes sérieux sur les marchés financiers" mais aussi "pour des raisons de soutenabilité à long terme", la dette italienne s'élevant à plus de 2.300 milliards d'euros (132% du PIB), a-t-elle noté.

Président de la banque Intesa Sanpaolo, Gian Maria Gros-Pietro a estimé assez logique l'évolution du discours du gouvernement.

"C'est une coalition nouvelle, les deux âmes qui la composent doivent s'accorder et doivent aussi tenir compte des contraintes extérieures. Il faut un peu de temps", a-t-il souligné, évoquant un "apprentissage de la politique au jour le jour".

Face au boom du spread, le très surveillé écart entre les taux d'emprunt allemand et italien, les deux partis ont "compris qu'il y avait des conséquences".

Mais M. Gros-Pietro a lui-même jugé l'évolution du spread "irraisonnable": l'Italie, qui "a toujours payé régulièrement" ses traites, se retrouve à payer des taux "plus élevés que des pays ayant des économies beaucoup plus faibles".

La péninsule est "le deuxième pays manufacturier d'Europe et le 5e dans le monde pour l'excédent commercial", tandis que la situation des banques "s'est beaucoup améliorée, avec la réduction du stock de créances douteuses, même s'il reste du travail à faire", a-t-il insisté.

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