C’est que tous les bons esprits en percevaient depuis longtemps la pressante nécessité. Si les perspectives du groupe sont très favorables dans la connectivité fixe et mobile — le succès de Starlink le prouve — l’érosion rapide de l’activité transmission de signal vidéo mettait depuis quelques temps les cash-flows sous trop forte pression.

Eutelsat avait déjà réussi un excellent coup en fusionnant avec le britannique OneWeb. Cette opération lui permettait d’ajouter à ses satellites en orbite géostationnaire un portefeuille de satellites en orbite basse sur des fréquences de communication fermement attribuées. 

Mais, désormais incapable de s’autofinancer, il était dans l’impasse pour capitaliser sur ce succès et assurer ses investissements de recherche et développement. Les circonstances appelaient donc un tour de table à l'aube de ce nouveau cycle.  

A ce jour, 54% de son chiffre d’affaires restent en effet liés à la vidéo — c’est-à-dire à la télévision par satellite principalement — tandis que les services de connectivité fixe et mobile en représentent 19% et 13% ; les services aux gouvernements sont les 14% restants.

Sur ces segments d’avenir, les taux de croissance annualisés sont à deux chiffres, et les enjeux de souveraineté évidents. Eutelsat s’attend ainsi à ce que le marché des satellites à orbite basse quintuple de taille au long de la prochaine décennie. Naturellement, ces perspectives sont à accueillir avec les habituelles précautions. 

L’urgence d’une augmentation de capital s’imposait tant par la nécessité de financer ce nouveau souffle que pour faire face aux prochaines échéances bancaire et obligataire — pour un total d’environ un milliard d’euros — en 2027 et 2028. C’est là une sacrée épine du pied que l’Etat français vient de retirer au groupe. Pas étonnant donc que le cours de l’action ait bondi en conséquence.

S'il y avait un toutefois un sujet d'étonnement permis, voire de consternation, ce serait sur l'absence d'investisseurs privés — outre CGA-CGM, dont le président est un très proche d'Emmanuel Macon — dans le tour de table. En France, faut-il donc qu'à chaque fois l'Etat fasse tout lui-même ?