L’ETI familiale cotée, spécialiste mondiale de la pulvérisation, traverse des difficultés multiples, notamment sur sa principale activité, la pulvérisation agricole. Un plan de réorganisation a été annoncé en juillet par la direction, incarnée par Guerric Ballu, petit-fils du fondateur. Entretien.

Guerric Ballu, votre groupe fait face à des vents adverses et votre cours de Bourse, revenu à son niveau de 2015, le traduit directement…

"Effectivement, deux de nos quatre pôles d’activités, qui représentent plus de 50% de notre chiffre d'affaires, sont en cours de réorganisation. L’Arrachage de Betteraves d’abord, où la crise sucrière en Europe provoque une chute de nos ventes qui s’est accélérée au 3e trimestre, à -27%. Il s’agit du contrecoup de la très bonne année que nous avions réalisée grâce à la fin des quotas sucriers en Europe depuis octobre 2017. Les prix sont maintenant mondialisés et au plus bas depuis plus de 10 ans, ce qui provoque une réduction des surfaces cultivées et donc une chute des ventes de matériel. La croissance des ventes hors d’Europe ne compense que partiellement ce phénomène, qui devrait se prolonger jusqu’en 2021. La réorganisation de cette activité est bien engagée, avec une réduction des effectifs d’un peu plus de 20%."
Et le second secteur ? 

"Toujours dans l’agricole, la pulvérisation connaît une baisse ponctuelle mais sensible des ventes en grande culture en Ukraine et en Australie du fait des mauvaises récoltes de la saison passée, à laquelle vient s’ajouter un phénomène structurel en France et dans une moindre mesure en Europe, de décisions politiques visant à réduire, l’utilisation de produits phytopharmaceutiques dans l’agriculture. Une profonde réorganisation de cette activité a donc été annoncée en juillet dernier pour renforcer notre capacité d’innovation, organiser notre expertise et améliorer la force de nos marques. Notre volonté est de créer un système d'évaluation des options techniques permettant de réduire les doses, jusqu’à 50%. Les exploitants pourraient s'engager dans une démarche pour obtenir des labels, voire des subventions. En attendant, cela nécessite la mise en place d’une nouvelle organisation qui passe par la fermeture et le regroupement de deux usines en France, avec une suppression nette d’environ 200 emplois. Le coût s’étalera sur un an et s’élèvera à une vingtaine de millions d’euros."

Le groupe parviendra-t-il à maintenir des résultats annuels 2018/2019 bénéficiaires dans ce contexte ?

"Compte tenu des difficultés rencontrées dans les activités agricoles et d’une référence à un 4e trimestre particulièrement fort l’année dernière en Pulvérisation et Arrosage du Jardin et en Pulvérisation Industrielle, le chiffre d’affaires de l’exercice 2018-2019 devrait être en décroissance de l’ordre de -6% à -8% par rapport à l’année dernière. Néanmoins, grâce à la bonne tenue des activités de Pulvérisation et Arrosage de jardin ainsi que la Pulvérisation industrielle, nous serons en mesure de maintenir un résultat net positif en 2019 et en 2020. En espérant ensuite nous rapprocher de notre objectif de 10% de marge opérationnelle pour l’ensemble du Groupe. Par ailleurs, nous réduisons notre niveau d’endettement grâce à la réduction de ses stocks, et donc du BFR du Groupe. Il est vrai que notre cours de Bourse est logiquement déprimé, à tel point qu’il valorise aujourd’hui l’entreprise moins que ses fonds propres, pourtant en augmentation."

Rappelons que votre père vous a transmis les rênes du Groupe en 2011 et que votre famille détient un peu plus de 75% du capital. Quelle est votre politique financière ?

"Dans la continuité de mon père, Exel Industries a vocation à rester contrôlé par la famille Ballu, avec une vision long terme. La solidité financière de notre bilan nous permet de poursuivre notre stratégie, basée sur l’innovation et le développement international, et de rester attentif à toute opportunité de croissance externe. Notre niveau d’endettement maîtrisé et en baisse nous permettra de continuer de proposer le versement d’un dividende à nos actionnaires. Quant au rachat d’actions sur le marché, cela ne nous ressemblerait pas d’acheter des actions quand elles sont basses et les vendre quand elles sont mieux évaluées. Et nous souhaitons rester cotés en Bourse, car cela impose une rigueur de gestion et donne une valeur aux actions du groupe, ce qui facilite notamment les problématiques de transmission."