Quand arrive le mois d’avril, la nature se réveille et les jardiniers aussi. Les enseignes spécialisées sont alors prises d'assaut pour leurs végétaux, leurs accessoires et leurs sacs de terreaux, de paillage et autres amendements. C’est là qu’intervient Florentaise, le leader français des terreaux pour le grand public. Un sac sur cinq vendu en enseigne spécialisée a été produit par la société basée en Loire-Atlantique.  

Florentaise est dirigée par Jean-Pascal Chupin, dont la famille a fondé l’entreprise en 1973.  

Un pionnier dans les terreaux sans tourbe  

La société se distingue par une utilisation limitée de la tourbe, qui est de plus en plus décriée et commence à faire l’objet d’une réglementation stricte.  

Le marché des supports de culture est aujourd’hui composé d’environ 60% de tourbe, une matière végétale d’origine fossile qui se forme dans des zones humides - les tourbières - par accumulation de matière organique morte, notamment des végétaux. Cette matière est particulièrement appréciée pour sa rétention de l’humidité du sol, élément essentiel à la croissance d’une plante et pour ses qualités de combustible dans le secteur de l’énergie. La tourbe est aussi l’un des puits à carbone naturel les plus puissants de la planète. Les estimations révèlent que bien que les tourbières n’occupent que 3% de la surface de la Terre, elles emmagasinent environ 30% du carbone stocké dans les sols. Exploiter ces tourbières est donc un risque (de plus) pour la préservation de la planète et la lutte contre le changement climatique.  

Dans ce contexte, 77% de la gamme de Florentaise ne contient pas de tourbe. La société a breveté des solutions alternatives, dont Hortfibre, issue de plaquettes de bois et Turbofibre, issue d’écorce de scierie.  

Le marché, les finances 

Le marché général des terreaux et celui, plus petit, des terreaux sans tourbe, bénéficient de tendances de fond porteuses : tout d’abord, les implantations d’espaces verts en milieu urbains se généralisent. Être entouré de murs végétaux, d'îlots de verdure ou de jardins cultivables offre un confort qui semble aujourd’hui indispensable au cœur des métropoles. Deuxièmement, la recherche d’amélioration des rendements des terres agricoles et des plantations dépend en grande partie de la qualité des substrats utilisés. Un bon terreau est donc indispensable à une croissance rapide et solide d’une plante. Enfin, dans un contexte plus récent, les confinements successifs ont permis à de nombreuses personnes de découvrir le jardinage et on constate très nettement un avant et un après Covid dans la demande de produits de jardinage et d’aménagements extérieurs. Avec ces perspectives, le marché devrait croître de 4,4% par an d’ici 2050, pour atteindre une taille supérieure à 28 Mds€.  

L’exposition de Florentaise à des gammes sans tourbe n’est pas qu’une question environnementale. La réglementation en vigueur évolue pour protéger les tourbières. L’Irlande a par exemple stoppé toute activité d’exploitation des tourbières. Le Royaume-Uni a interdit l’exportation de tourbe pour les particuliers à partir de 2024.  

Fort de ces tendances, Florentaise prévoit de doubler ses revenus d’ici 2027.  

L’offre de la société (terreaux, paillages et amendements) est répartie entre le grand public (69%) et les professionnels (31%). La grande majorité est réalisée en France (81,9%), le reste étant écoulé en Chine et en Inde.  

L’entreprise dispose d’une corde complémentaire à son arc. Pour produire ses terreaux sans tourbe, Florentaise utilise une machine, la Bivis, dont elle détient l’exclusivité d’usage. Dans ce cadre, le contrat mis en place avec le fabricant de la machine, Clextral, filiale du Groupe Legris Industries, permet aussi à Florentaise de louer les machines à d’autres fabricants de terreaux. Florentaise touche donc des revenus de locations.  

Une société endettée qui vient chercher le salut sur le marché 

Problème, cette nouvelle source de revenus basée sur les locations (3,6% du chiffre d’affaires) est responsable d’une explosion de la dette suite à la pandémie de Covid. Les 7 machines que l’entreprise prévoyait d’installer chez des clients n’ont pas pu être déployées, créant des tensions de trésorerie.  

En parallèle, la société a accumulé de la dette en relation avec un projet de technologie innovante de fermes verticales. 

Bien qu'au cours des trois dernières années, le chiffre d'affaires et le résultat net de l'entreprise ont connu une augmentation régulière, ce n’est pas le cas en pro forma, qui ne montre pas l’entreprise sous son meilleur angle. Cela est lié à une réorganisation interne du groupe Floreasy - holding de Florentaise - qui prévoit la filialisation de l’activité terreaux. Dans le cadre de cette opération, clôturée avant l’introduction en bourse, Florentaise a enregistré une dette de crédit-vendeur à hauteur de 16,3 M€ envers sa société-mère.  

D’un point de vue global, l’endettement brut s’élève à 37,1 M€. Florentaise doit rembourser 8,2 M€ dès le prochain exercice, sans compter une dette à court terme de 5,6 M€ destinée à financer la saisonnalité, alors que les disponibilités de l'entreprise s'élèvent à seulement 3,7 M€. Le ratio dettes sur capitaux propres est supérieur à 2, ce qui est assez critique. 

L’explosion de l’endettement date de 2020. La société explique avoir connu une forte augmentation des ventes durant la pandémie. Cette situation a entraîné une détérioration importante du BFR et a poussé Florentaise à contracter des emprunts à moyen et court terme. Cela explique pourquoi elle disposait en 2020 d'un montant de trésorerie élevé. 

Toutefois, la société a également financé des investissements en plus de son activité d'exploitation. Elle a dû effectuer un nantissement de ses titres et des sûretés réelles pour s'engager auprès de ses créanciers. 

Le groupe n'a pas produit de prévisions sur les exercices à venir. Elle précise dans ses documents viser à l’horizon 2027 un chiffre d’affaires de 120 M€ et 24 M€ au moins de résultats d’exploitation, soit une marge de 20% minimum. Sur l’exercice clos le 30 juin 2022, en base pro forma, Florentaise a dégagé 57,5 M€ de chiffre d’affaires et 3,01 M€ de résultat d’exploitation, soit une marge de 5,4%. Il y a donc des progrès considérables à réaliser pour atteindre les objectifs, d’autant que des marges de ce calibre ne sont pas vraiment répandues dans le secteur. 

Sur la base d'un prix médian pour l'IPO (11,10 EUR), la capitalisation de la société ressortirait à 98,6 M€ en cas d'émission des actions nouvelles à hauteur de 100%.  

Modalités de l’offre  

A savoir : 

  • Libellé : Florentaise
  • Code mnémonique : ALFLO
  • Code ISIN : FR001400GO75
  • Marché de cotation : Euronext Growth Paris
  • Classification ICB : 55201015 – Fertilizers (Fertilisants). 

Les actions sont proposées entre 9,44 € et 12,76 €. Par le biais de cette IPO, la société entend lever un produit brut de 28 M€, qui peut être porté à un montant de 32,2 M€ en cas d’exercice total de la clause d’extension et à 37 M€ en cas d’exercice de la clause d’extension et de l’option de surallocation.  

Les personnes désirant participer à l’IPO devront déposer leur souhait auprès de leur intermédiaire financier au plus tard le 4 Avril.  

Sur la base d’un prix médian de la fourchette, la société prévoit d’utiliser le produit net de 26,2 M€ de la façon suivante :  

  • 12 M€ souscrits par Floreasy, le holding de Florentaise, par voie de compensation des créances détenues par la société mère.  
  • le solde de 14,2 M€ sera réparti comme suit :  
  • 32% pour le financement du déploiement de nouvelles machines bivis 
  • 25% dédiés aux dépenses d’investissement sur l’activité terreaux, de façon à augmenter les capacités de production 
  • 23% serviront à rembourser une dette de comptes courants d’actionnaires envers la holding Floreasy 
  • 20% permettront de financer le besoin en fonds de roulement actuel.  

Pour résumer … 

Points forts :  

  • Florentaise offre un alternative plausible à la tourbe et est innovante 
  • Les positions sont solides sur les principaux marchés
  • Le potentiel de croissance est avéré  

Points faibles :  

  • Une structure d’endettement trop lourde
  • Une partie des fonds levés (15,2 M€) va servir à compenser des créances et à rembourser une avance en compte courant
  • Peu de visibilité sur la trajectoire d’amélioration de la rentabilité