(Rpt technique)

par Taiga Uranaka et Thomas Wilson

TOKYO, 29 janvier (Reuters) - Le régulateur financier japonais a annoncé lundi qu'il passerait en revue si nécessaire toutes les plates-formes d'échange de cryptomonnaies et a ordonné à Coincheck de prendre des mesures après l'un des plus importants vols jamais perpétrés sur ce marché.

La Financial Services Agency (FSA) a exigé que Coincheck, plate-forme basée à Tokyo, améliore son fonctionnement après qu'elle eut suspendu vendredi ses transactions sur toutes les cryptomonnaies, bitcoins exceptés, à l'issue d'une cyberattaque.

Coincheck a annoncé dimanche qu'elle allait rembourser à ses clients près de 90% des 58 milliards de yens (429 millions d'euros) des pièces de cryptomonnaie NEM qui se sont volatilisés, sans dire quand et comment.

Ces pièces NEM étaient stockées dans un "hot wallet" (portefeuille connecté à internet) et non dans un "cold wallet", mieux sécurisé car déconnecté d'internet, a dit Coincheck. La plate-forme n'utilise non plus un mécanisme de sécurité supplémentaire dit de multisignatures.

La FSA ajoute qu'elle a ordonné à Coincheck de lui présenter d'ici au 13 février un rapport sur l'incident et des mesures pour corriger les failles. Si nécessaire, le régulateur inspectera d'autres plates-formes, a dit un responsable.

La FSA a enregistré 16 plates-formes d'échange de cryptomonnaies jusqu'à présent et 16 autres attendent un feu vert. Coincheck a présenté sa propre demande en septembre.

"Cela fait longtemps que l'on dit que les cryptomonnaies sont un système solide mais que les plates-formes ne le sont pas", dit Makoto Sakuma, chercheur au NLI Research Institute.

"Cet incident montre que le problème n'a pas été réglé du tout. Si Coincheck s'y prend mal dans la résolution de la crise, cela pourrait faire retomber la fièvre des cryptomonnaies."

Le NEM est tombé de 1,01 dollar à 0,78 dollar vendredi mais il a rebondi à 0,97 dollar lundi, selon CoinMarketCap. Les actions liées aux cryptomonnaies, notamment GMO Internet qui a pris 5,7%, ont pour la plupart monté lundi en Bourse de Tokyo.

La Fondation NEM, basée à Singapour, a annoncé avoir un système de traçabilité sur la chaîne de blocs ("blockchain") NEM et disposer d'un "compte-rendu complet" de tous les NEM perdus sur Coincheck.

Elle a ajouté que les pirates n'avaient transféré aucun fonds sur d'autres plates-formes d'échange ou sur des comptes personnels mais qu'elle n'avait aucun moyen de restituer les fonds volés à leurs propriétaires.

En 2014, la société Mt. Gox, dont le siège était à Tokyo et qui naguère gérait 80% des échanges mondiaux de bitcoins, avait fait faillite après avoir perdu un demi-milliard de dollars de bitcoins.

Plus récemment, la plate-forme d'échanges électroniques sud-coréenne Youbit a dû fermer ses portes en décembre, ayant fait faillite après avoir été victime de deux cyberattaques en 2017.

L'élite de la finance et de la politique réunie ces derniers jours au Forum économique mondial de Davos en Suisse a de nouveau alerté sur les dangers des cryptomonnaies. Le secrétaire américain au Trésor, Steven Mnuchin, a fait part des inquiétudes de Washington quant à une utilisation de tels actifs pour des opérations illicites.

De fait, beaucoup de pays ont pris des mesures de rétorsion contre les plates-formes d'échange mais le Japon a opté pour une autre politique, devenant l'an dernier le premier pays à introduire une réglementation nationale de ces plates-formes, une initiative qui a été saluée par de nombreux intervenants. (Avec Makiko Yamazaki, Takahiko Wada, Chang-Ran Kim à Tokyo, Vidya Ranganathan à Singapour; Juliette Rouillon pour le service français, édité par Wilfrid Exbrayat)