Mark Carney s’engage dans un nouveau défi de taille : diriger le Canada en pleine guerre commerciale avec les États-Unis. Succédant à Justin Trudeau après presque dix ans au pouvoir, l’ancien banquier central devient Premier ministre sans jamais avoir occupé de poste législatif ni de fonction ministérielle. Une ascension fulgurante pour un homme dont l’expertise repose avant tout sur l’économie et la finance.
Du hockey à la finance
Né à Fort Smith, dans les Territoires du Nord-Ouest, Mark Carney grandit à Edmonton et joue au hockey en tant que gardien de but avant de s’orienter vers des études d’économie. Diplômé d’Harvard, il obtient une maîtrise et un doctorat à Oxford avant d’intégrer Goldman Sachs, où il passe 13 ans et se distingue notamment lors de la crise financière russe de 1998.
Il entre ensuite dans le secteur public en devenant vice-gouverneur de la Banque du Canada en 2003, puis prend un poste stratégique au ministère des Finances avant d’être nommé gouverneur en 2008. À la tête de la banque centrale, il pilote le pays à travers la crise financière mondiale en instaurant des prêts d’urgence et des politiques monétaires claires. En 2013, il est nommé gouverneur de la Banque d’Angleterre, un mandat marqué par des difficultés, notamment autour du Brexit, jusqu’à son départ en 2020. Il devient alors envoyé spécial des Nations Unies pour la finance et le changement climatique.
Une ambition politique affirmée
Après avoir siégé au conseil d’administration de Brookfield Asset Management et présidé celui de Bloomberg, Mark Carney quitte ses engagements commerciaux pour se lancer en politique. Le 16 janvier, il annonce sa candidature à la direction du Parti libéral et affirme vouloir mettre son expérience de gestionnaire de crise au service du pays.
Un choix surprenant pour celui qui, en 2012, tournait en dérision toute ambition politique en déclarant à un journaliste : “Pourquoi ne deviendrais-je pas un clown de cirque ?” Pourtant, soutenu par le Parti libéral, il remporte l’élection du 20 octobre face au conservateur Pierre Poilievre. Son expertise internationale et son parcours dans la finance en font un négociateur aguerri, mais son manque d’expérience politique suscite des critiques.
Un apprentissage politique difficile
Sa transition vers la politique ne se fait pas sans heurts. Interrogé sur le rôle qu’il aurait joué dans une décision de Brookfield Asset Management concernant un déménagement aux États-Unis, il affirme ne plus siéger au conseil d’administration au moment des faits. Une déclaration rapidement mise à mal par une lettre adressée aux actionnaires en décembre 2024, dans laquelle il recommandait cette relocalisation. Face aux attaques des conservateurs, il admet : “Parfois, je réponds à des questions qui entrent dans les détails alors que je devrais m'en tenir à un niveau plus élevé. C'est en partie le problème de ne pas être un politicien.”
Par ailleurs, l'homme possède trois nationalités : canadienne, irlandaise et anglaise. le nouveau Premier ministre pourrait bien subir des pressions pour renoncer à ses nationalités étrangères. Ce fut notamment le cas pour Michaëlle Jean qui a du abandonner sa nationalité française lorsqu'elle fut nommée gouverneure générale. Elle n'est pas la seule puisque l'ancien chef du Nouveau Parti démocrate, Thomas Muclair, pour qu'il renonce aussi à sa nationalité française.
Désormais à la tête du Canada, Mark Carney devra prouver que son savoir-faire économique peut s’adapter aux réalités du pouvoir politique et convaincre de sa légitimité alors que les prochaines élections vont rapidement devenir une priorité.