Opération surprise mais logique dans la galaxie boursière de la famille Gorge : la maison mère, Groupe Gorge, devrait fusionner avec sa filiale cotée ECA dont le poids dans l’ensemble ne cesse de grossir. L’opération sera précédée par une OPAS sur 10% du capital, ce qui offre une semi porte de sortie aux minoritaires tout en donnant toutes les chances à la fusion d’aboutir. L’issue d’une OPA+OPR classique aurait été plus incertaine. Prodways, toujours promis à un fort développement, restera cotée en espérant susciter un enthousiasme comparable à celui que ses concurrents américains cotés suscitent… Entretien.

Raphaël Gorge, quelques mois après le cœur de la crise Covid, quel regard portez-vous sur les résultats du Groupe Gorge au 1er semestre ?

"Nous avons la chance d’être positionnés sur des métiers aux cycles longs, avec des carnets de commandes importants. Seule notre activité tournée vers l’aéronautique commerciale, soit un peu plus de 8% du CA, est directement et durablement impactée par la crise sanitaire. Sur les 92% restants, nous ne voyons pas d’impact commercial durable et notre carnet de commande a augmenté sur la période. En revanche, à court terme, les difficultés à opérer et à délivrer nos produits ont fortement impacté notre CA (-20%) et notre Ebitda qui a été divisé par deux au 1er semestre, à 7,1 M€. De plus, ce contexte de crise nous a conduit à passer en revue de façon rigoureuse la valeur de nos actifs incorporels, avec à la clé une dépréciation exceptionnelle de 9 M€ qui dégrade le bas du compte de résultat."

Comment voyez-vous la fin de l’année 2020 ?

"L’activité se redresse progressivement depuis la fin du 1er semestre, le retour à la normale étant compliqué non pas par des problèmes de production en interne mais par des perturbations de notre écosystème, comme par exemple les difficultés à réceptionner le matériel en provenance ou à destination de l’international ou encore à rencontrer le client pour lui proposer nos solutions."

Y-a-t-il des activités qui profiteront de cette crise ?

"L’activité impression 3D, avec le recours probablement croissant à une production locale et à la demande, devrait en profiter, sans que l’on puisse encore le constater concrètement. Sur cette division, la dynamique est forte actuellement mais il ne s’agit pour l’instant que d’un effet de rattrapage de retards de produits à destination des cabinets dentaires et de podologie."

Vous avez annoncé lancer un rachat de 10% du capital de votre filiale cotée ECA, détenue à 65,2%, moyennant une OPAS à 28€ (prime de 25%) avec l’intention de la fusionner avec la maison mère Groupe Gorge. A quand remonte la réflexion sur cette opération ? Avez-vous envisagé des pistes alternatives ?

"C’est une réflexion que nous avons mené compte tenu du poids d’ECA au sein du Groupe Gorge, notamment depuis le contrat historique d’environ 450 M€ remporté par ECA qui représente depuis près de 80% du carnet de commande du Groupe, combiné avec les complications liées à la double cotation (liquidité, coûts supplémentaires…)... ECA était cotée depuis 2004 avec à l’origine, un peu comme Prodways en 2017, un besoin de ressources conséquent à l’époque et cela a plutôt bien fonctionné. Nous pensons aujourd’hui que le potentiel d’ECA est très important, d’où le prix de 28€ proposé aux minoritaires d’ECA qui souhaiteraient sortir. Ils peuvent bien entendu continuer à accompagner le développement d’ECA en devenant actionnaires du Groupe Gorgé. Cette opération aura un impact relutif sur le résultat de Groupe Gorgé."

Le Groupe a-t-il dans les prochaines années vocation à se recentrer sur un nombre plus limité d’activités ou à se diversifier ?

"Toutes les activités du Groupe doivent tourner autour de notre savoir-faire en matière d’industrie de haute technologie et de digitalisation de l’industrie. Nos succès dans la robotique et l’impression 3D illustrent ce savoir-faire. C’est en cohérence avec cette stratégie que nous avons récemment procédé au sein de la maison mère à la cession partielle de près de la moitié de nos activités du pôle Protection des Installations à Risques et que nous avons lancé une activité d’ingénierie, appelée StedY, qui a pour but de digitaliser la rencontre de l’offre et la demande dans le monde de la R&D externalisé. Nous visons d’atteindre rapidement plusieurs centaines de jeunes ingénieurs en recherche d’autonomie et en quête de sens que nous irons chercher à l’extérieur du Groupe. Par ailleurs, la période actuelle est propice à la croissance externe et nous disposons d’une trésorerie de 80 M€ pour ce faire. Le développement dans les solutions logiciels au service de la digitalisation de l’industrie fait partie des axes de prospection."