Le business de l’entreprise est basé sur un système de MLM (Multi Level Marketing), le même qui a fait le succès de Tupperware. Le principe est simple : des distributeurs sont recrutés parmi le grand public, puis ces mêmes personnes vendent le produit à leurs proches et les enrôlent, à leur tour, comme revendeurs. Ces derniers, pour démarrer leur activité, doivent débourser 400 dollars afin d’acheter un premier pack de produits, d’après un distributeur interrogé par le Wall Street Journal.

Il est ainsi reproché au groupe de réaliser la majeure partie du chiffre d’affaires grâce au recrutement de ces nouveaux collaborateurs, et non grâce à la vente de produits minceurs, ce qui ferait de l’activité d’Herbalife un schéma de pyramide de Ponzi.

William (ou Bill) Ackman, fondateur du très performant fonds d’investissement Pershing Square, s’est insurgé en décembre 2012 contre les pratiques de l’entreprise et a annoncé s’être porté vendeur à découvert pour la modique somme d’un milliard de dollars, estimant que la valeur réelle de l’action Herbalife était de zéro dollar. En effet, le New York Post nous apprend que la Federal Trade Commission (FTC) aurait ouvert une enquête sur les agissements d’Herbalife (le groupe a cependant demandé une correction au journal et dément l’information) ; si elle estime que l’activité de l’entreprise est bel et bien un système pyramidal, le groupe pourrait se voir contraint de fermer ses portes. Ackman a défendu sa position dans un exposé composé de 342 slides qu’il a présenté à Manhattan : il affirme qu’Herbalife vend sa poudre nutritionnelle, qui représente 27% du chiffre d’affaires, en moyenne le double du prix de la concurrence et ses multivitamines, le triple. Et ajoute que ces produits ne disposent d’aucun avantage concurrentiel, les dépenses en R&D étant très faibles. Ainsi il serait peu probable que l’entreprise réussisse à vendre sa gamme de produits à de réels clients, et que les revenus ne pourraient provenir qu’en majeur partie des achats effectués par de nouveaux distributeurs.

Carl Icahn, adversaire historique de Bill Ackman avec qui il a déjà eu plusieurs différends financiers, a annoncé le 14 février après avoir lourdement échangé avec notre insurgé sur les médias américains, avoir investi à hauteur de 13% du capital d’Herbalife. Coup dur pour Ackman qui voit l’action s’envoler et se retrouve dans une situation bien délicate avec son milliard de dollars vendus à découvert.

Icahn n’est pas le seul à soutenir Herbalife et à contredire le patron de Pershing Square. John Hempton, l’un des managers de la société de gestion de fonds Bronte Capital a publié une note, en janvier dernier, dans le but de discréditer la théorie de William Ackman : « La thèse de Bill Ackman est la thèse baissière la plus facile à invalider que je n’ai jamais vue provenant d’un fonds d’investissement majeur ». Le rédacteur dit être allé visiter un club de nutrition Herbalife dans le Queens et s’être rendu compte que, certes la plupart des clients étaient aussi des distributeurs, mais principalement dans le but d’obtenir une réduction de 25% sur les produits qu’ils achetent. Surtout, il constate lors de sa discussion avec les clients et les propriétaires du club, la présence évidente d’un esprit de communauté qui permet aux utilisateurs de tenir bon dans leurs efforts pour perdre du poids. Il ajoute que la force et la grandeur de cette communauté sont justement possibles grâce au Multi Level Marketing.

John Hempton, s’amuse à contredire les arguments de M. Ackman point par point :
  • L’avantage concurrentiel, absent d’après la théorie de M. Ackman se trouverait, en réalité, dans le support communautaire fourni avec les produits Herbalife : « Herbalife est vendu avec un mécanisme de support communautaire. A Central Park tout le monde peut aller courir. C’est gratuit. Cela vous coûte 20 dollars l’heure si vous voulez faire de l’exercice avec un coach personnel », la valeur des produits Herbalife viendrait par conséquent du soutien fourni par la communauté.
  • Ackman note le manque de dépenses publicitaires et l’impossibilité de maintenir par conséquent de tels prix. Hempton répond ainsi : « Herbalife possède la meilleure publicité possible : le bouche-à-oreille ».
  • L’argument principal de Bill Ackman est que le véritable produit Herbalife n’est pas un article physique, mais en réalité une opportunité d’affaires proposée aux clients qui s’avèrent être, in fine, des distributeurs. Son détracteur est d’accord avec lui pour dire que beaucoup de clients sont des revendeurs, mais précise qu’ils sont aussi clairement des consommateurs du produit, comme il le constate dans le club visité au Queens.
 
La note se termine ainsi : « Bill Ackman (…) a parié plus d’un milliard de dollars sur une vente à découvert sans vérifier les faits ». Certes, M. Ackman n’est pas allé voir ce qu’il se passait sur le terrain, mais il paraît quelque-peu prétentieux de se targuer d’avoir invalidé la théorie d’Ackman en basant son argumentaire sur l’exemple d’un unique point de vente Herbalife. Personne n’est là pour confirmer que les éléments constatés dans ce club, se vérifient partout ailleurs.

Quoi qu’il en soit, il est bien difficile de prévoir le dénouement de l’affaire Herbalife. Il est, ainsi, préférable de se tenir à l’écart du titre avant d’avoir des réponses à nos questions. En effet, ne restent engagés sur l’action du groupe que les investisseurs convaincus, générant par conséquent un climat de tension extrême sur le titre. Un jour ou l’autre, l’un de nos deux investisseurs retirera sa position, engendrant par la même occasion un décrochage ou une envolée des cours, selon le cas de figure.

Graphique de l’action Herbalife (chandeliers en données journalières) :




M. Ackman sera désigné vainqueur en cas de décision de la Federal Trade Commission définissant comme illégale l’activité de l’entreprise de compléments nutritionnels. Seul problème pour notre insurgé : la FTC n’a pas souhaité confirmer qu’une enquête était réellement en cours, sans pour autant démentir. Comme nous le montre le graphique de l’action Herbalife, les cours forment un triangle qui prend fin à la mi-avril. Il semble probable, qu’en l’absence de décision de la part de l’institution ou de nouvelle révélation, l’affaire s’évapore d’elle-même aux alentours de cette échéance, que les baissiers perdent espoir et que les acheteurs reprennent la main.