Voir à ce sujet Deutsche Bank déçoit mais les investisseurs veulent y croire, publié le 31 janvier dernier dans ces mêmes colonnes.
Chez HSBC, c’est le précédent directeur général Noel Quinn qui avait jeté le pavé dans la mare et lancé le processus de restructuration. A beaucoup d’égards, celui-ci s’apparentait surtout à un retrait bien ordonné ; le groupe quittait ainsi les marchés argentin, français, grec, canadien et mauricien.
Quinn eut aussi à contrecarrer les velléités activistes de son principal actionnaire, le groupe d’assurance Ping An, lorsque ce dernier militait pour une séparation des activités européennes et asiatiques de HSBC ; ce sont en effet les secondes qui génèrent la vaste majorité des profits du groupe bancaire.
Sa double empreinte est à la fois son point fort et son point faible : point fort parce qu’il lui permet d’afficher une rentabilité supérieure à ses pairs européens ; point faible parce que sa performance reste inférieure à celle de ses meilleurs rivaux asiatiques.
En même temps qu’il abandonnait les marchés où HSBC n’était pas compétitif, Quinn orientait les investissements du groupe vers la Chine. Un temps plébiscité, le pari est désormais perçu par certains analystes comme susceptible de se retourner contre lui, tant la situation du secteur immobilier dans l’Empire du Milieu semble fragile.
Arrivé aux manettes l’été dernier, le nouveau directeur général Georges Elhedery — autrefois directeur financier du groupe — relativisait hier ces appréhensions. Pas réputé pour garder sa langue dans sa poche, l’intéressé dit ne pas nourrir d’inquiétudes particulières sur ce sujet. Les analystes de Zonebourse notent d’ailleurs que les provisions de HSBC sont en 2024 tout à fait dans leur moyenne à long terme.
Elhedery garde en tout cas le cap fixé par son prédécesseur. La cure d’amaigrissement continue, et cette fois-ci c’est la division banque d’investissement en Europe et en Amérique du Nord qui passe à la trappe. Cette dernière, c’est vrai, n’a jamais réellement percé ; néanmoins, ses activités en Asie et au Moyen-Orient, plus stratégiques, restent pour leur part dans l'escarcelle du groupe.
Le bilan à dix ans du tandem Quinn-Elhedery est en tout cas très positif. La marge d’intérêt est stable sur le cycle, tandis que les revenus liés aux frais et commissions — indépendants des taux donc — augmentent de presque $6 milliards entre 2015 et 2024.
Mais l’exploit vient surtout des économies réalisées. La structure de coûts de HSBC diminue de $8 milliards en dix ans. Assez remarquablement, les rémunérations baissent de $1.5 milliard d’un bout à l’autre du cycle, et les dépenses administratives de $8 milliards.
C’est donc un pilotage d’élite dont bénéficie le supertanker HSBC. En 2024, le groupe assure d’ailleurs son meilleur profit par action à dix ans, puisque ce dernier atteint $1.2, soit deux fois plus que sa moyenne à dix ans ; idem au niveau du dividende, avec $0.9 distribué aux actionnaires, dont $0.2 via un dividende spécial. Georges Elhedery promet par ailleurs un nouveau round d'économies à hauteur de $1.5 milliard d'ici la fin de l'année prochaine.
A l’instar des autres banques du Vieux Continent — voir à ce sujet Les banques européennes récompensent leurs actionnaires, publié le 23 janvier dernier dans ces colonnes — HSBC profite depuis quelques mois des grâces des investisseurs. Après une décennie qui a vu sa valorisation plonger fréquemment sous le seuil de x1 valeur des capitaux propres tangibles, celle-ci évolue désormais à x1.3 la valeur de ces derniers.
C’est nettement mieux que BNP, qui se languit toujours à x0.8 la valeur de ses capitaux propres tangibles ; mais aussi nettement moins qu’un pair asiatique comme DBS, qui fut pendant longtemps une position de notre portefeuille Asie, et qui demeure lui valorisé à x2.2 ses capitaux propres tangibles. On en revient à la double empreinte du groupe bancaire sino-britannique — le défaut de sa qualité, et vice-versa.
A l'aube de possibles baisses des taux et face au risque systémique que pourrait représenter de mauvaises nouvelles venues de Chine, sa valorisation revenue sur ses plus-hauts à dix ans alimentera à coup sûr les craintes des Cassandres.