Nous soulignions à l’époque que le retour de la croissance des ventes venait mettre un terme plus que bienvenu à une pénible décennie de stagnation. Cette dynamique s’est poursuivie en 2024, avec un chiffre d’affaires record de €4.3 milliards et une marge brute stabilisée à 62% — soit un niveau comparable à celui du groupe Inditex, propriétaire entre autres de Zara. 

Dans un registre moins réjouissant, un positionnement authentiquement haut-de-gamme semble rester définitivement hors de portée pour Hugo Boss, et les records de marge brute atteints entre 2012 et 2019 — lorsque cette dernière évoluait autour de 65%-66%, à égalité avec Kering par exemple — un idéal vers lequel il sera difficile de tendre à nouveau. 

Les deux autres grands vecteurs d’amélioration — la percée dans la mode féminine et sur les différents canaux digitaux — marquent eux aussi une décélération prononcée sur les douze mois écoulés, avec une croissance des ventes de seulement 3% concernant la première, et d’à peine 6% sur les seconds malgré des investissements conséquents. 

Au niveau de la performance financière, si l’on veut voir le verre à moitié plein, on dira que la génération de cash demeure plutôt bonne, et qu’elle permet ainsi à Hugo Boss d’assurer une troisième année consécutive de hausse de son dividende — la distribution atteint €93 millions — en parallèle de son désendettement. 

Si l’on veut voir le verre à moitié vide, on rappellera que cette distribution reste très inférieure au niveau qu’elle occupait entre 2012 et 2019 — époque où elle dépassait €200 millions par an. On dira aussi que la rentabilité apparaît dans l’ensemble en chute libre par rapport au cycle précédent, reflet d’un paysage compétitif dense et brutal, y compris sur le segment premium — entre le luxe et la mode grand public — qu’occupe traditionnellement Hugo Boss.

En prenant du recul, on observe que le chiffre d’affaires du groupe a quadruplé en vingt ans, mais que son profit semble pour sa part coincé sous un même plafond de verre depuis huit ans. C’est que, malgré les gains de marge brute, la profitabilité est rongée par l’inflation continue sur la structure de coûts, qui elle aussi quadruple en vingt ans. 

En vif contraste avec d’autres grandes marques de prêt-à-porter, Hugo Boss a récemment pivoté vers une nouvelle stratégie orientée vers les distributeurs, avec semble-t-il un certain succès ; mais il en faudra sans doute davantage pour réellement faire la différence. 

En bourse, les multiples de valorisation du groupe sont revenus sur leurs moyennes historiques. Le cours du titre pourrait toutefois être soutenu par l’intérêt manifeste du volcanique et talentueux homme d’affaires britannique Mike Ashley, fondateur de Sports Direct et propriétaire de Frasers

Ce dernier a continué sa montée au capital de manière ininterrompue depuis presque cinq ans, ce qui ne laisse a priori guère de doute sur ses intentions finales.