Madrid (awp/afp) - Être présent en ligne partout dans le monde et développer le "click and collect": malgré un virage pris avec un peu de retard en 2010, le propriétaire de Zara mise sur une stratégie digitale intégrée pour tirer sa croissance.

A l'occasion de la publication des résultats semestriels du groupe mercredi - qui ont montré un bénéfice net en hausse de 3% à 1,4 milliard d'euros - le PDG d'Inditex Pablo Isla a assuré que les "opérations en ligne continuaient d'augmenter très vite", sans toutefois donner de chiffres, alors qu'en 2017, les ventes en ligne ont représenté 10% du chiffre d'affaires total.

Pour Michael Hewson, analyste de CMC Markets, le lancement en ligne de Zara en Australie et en Nouvelle-Zélande en mars a notamment prouvé "la bonne performance" des ventes du groupe sur internet.

Fort de cette performance, Inditex a annoncé la semaine dernière que les huit marques du groupe (Zara, Oysho, Bershka, Massimo Dutti...) offriraient un service de vente en ligne dans tous les pays d'ici 2020, même là où le groupe ne possède pas de boutiques.

Pour ce faire, dans un souci de maîtrise des coûts, le géant du textile espagnol n'utilisera que les dépôts déjà existants sans en construire de nouveaux, a-t-il précisé mercredi.

Inditex veut aussi étendre son système de stock intégré à toutes les boutiques Zara disposant d'une plate-forme en ligne d'ici la fin de l'année et à tous ses marchés d'ici 2020 alors qu'aujourd'hui seulement 25 marchés utilisent cette technique permettant de faire des achats en ligne à partir de l'inventaire des boutiques.

Il compte pour cela étendre son dispositif de radio-identification, qui permet de savoir où se trouve un vêtement à n'importe quel moment et de satisfaire au plus vite un client qui souhaite l'acheter.

"Inditex est l'un des meilleurs quand il s'agit de réduire l'écart entre le +offline+ et le +online+", estime Ricardo Perez, professeur d'innovation numérique à l'IE Business School de Madrid.

Dans cette optique, Zara a ouvert la semaine dernière à Milan une boutique comportant un "distributeur intelligent" où le client peut récupérer lui-même des achats réalisés en ligne en scannant un code QR.

"Suiveur efficace"

Révolutionnaire? Pas vraiment, car cette alliance entre réel et virtuel est la tendance suivie par de nombreux détaillants.

"Inditex n'a jamais cherché à être le premier à se ruer sur une technologie, mais c'est un suiveur efficace", observe Ricardo Perez.

"Il cherche d'abord à comprendre comment la technologie peut être utile à ses clients, puis il s'en saisit (...) et il est très rapide dans l'exécution", poursuit-il, soulignant que "normalement, les grandes organisations sont très lentes" à oser innover.

Inditex a dû "changer sa stratégie" face à Amazon, mastodonte qui a rejoint en septembre le club des sociétés dépassant les 1.000 milliards de dollars de capitalisation boursière, observe Barbara Kahn, professeure en marketing au sein de l'université américaine de Wharton.

Pour l'auteure du livre "The shopping revolution" (2018), le groupe espagnol "peut atteindre ses objectifs pour 2020", fort de ses acquis.

A l'instar d'Amazon, qui a fait de la livraison sa principale force, Inditex valorise l'expérience d'achat et non pas uniquement le produit, selon Barbara Kahn. Le groupe a en effet fondé sa réussite sur le modèle de "fast-fashion" consistant à fabriquer 60% de ses vêtements relativement près du siège en Europe et au Maghreb pour pouvoir mettre en rayon en quinze jours des pièces collant aux tendances de la mode.

Mais est-ce assez pour convaincre les marchés? Ces annonces ambitieuses ont en tout cas suivi la publication fin août d'un rapport de Morgan Stanley qui estimait que les stratégies d'investissement d'Inditex faiblissaient. Le cours de l'action avait alors fortement chuté.

Après la publication des résultats semestriels, le titre prenait 3,80% à 26,49 euros vers 14H30 GMT.

"La tendance de fond reste baissière, mais les résultats positifs (du marché) pourraient être le début d'un rebond", estime Sergio Avila Luengo, analyste chez IG Markets.

En revanche, pour Ivan San Felix, de Renta 4, "la réponse des investisseurs a été tiède" et la promesse d'être présent sur tous les marchés en ligne est surtout "très positive d'un point de vue marketing", nuance-t-il.

afp/al