(Actualisé avec ministère de la Défense)

par Gederts Gelzis

RIGA, 20 février (Reuters) - Les accusations de corruption qui ont débouché sur la suspension mardi du gouverneur de la Banque centrale lettone procèdent peut-être d'une campagne de désinformation ourdie à l'étranger, visant à nuire au climat de confiance en Lettonie et à influer sur les élections prévues en octobre, a déclaré mardi soir le ministère de la Défense à Riga.

Dans un communiqué diffusé en anglais, le ministère ne dit pas qui pourrait être responsable de ce qu'il nomme une "opération massive de désinformation venant de l'étranger" mais il souligne qu'elle est "identique, pour ce qui est de la structure et de l'exécution" aux campagnes de désinformation qui ont précédé les récentes élections en France, en Allemagne et aux Etats-Unis.

Ces campagnes de désinformation ont été imputées à la Russie, qui nie catégoriquement chercher à influer sur les élections en Occident.

"Il y a de fortes probabilités qu'il s'agisse d'une vaste opération de désinformation venant de l'étranger, dont le but est de faire passer la Lettonie pour un allié peu digne de confiance, et pour détourner l'opinion du gouvernement", a déclaré le ministère letton de la Défense, à propos des événements entourant le gouverneur de la banque centrale.

Quelques heures plus tôt, le cabinet du Premier ministre letton avait annoncé que le gouverneur de la banque centrale, Ilmars Rimsevics, soupçonné d'avoir sollicité un pot-de-vin de 100.000 euros, avait été suspendu de ses fonctions en raison d'une enquête menée par l'agence anti-corruption du pays.

Ilmars Rimsevics, qui a été interpellé ce week-end, a déclaré mardi qu'il était victime d'une campagne de diffamation parce qu'il mène une croisade anti-corruption dans le secteur bancaire letton. Il a précisé qu'il ne démissionnerait pas.

"Je n'ai pas réclamé, ni reçu, de pots-de-vin", a-t-il dit lors d'une conférence de presse. "Je suis devenu la cible de certaines banques commerciales lettones pour détruire la réputation de la Lettonie."

MERCREDI A LA REUNION DE LA BCE ?

Dans la soirée, il a réaffirmé dans une interview à la télévision nationale que les accusations le visant étaient un tissu de mensonges et que le pays vivait un moment très important. Il a ajouté qu'il se rendrait à la réunion de mercredi à la Banque centrale européenne (BCE), où il siège au conseil des gouverneurs, si on l'y autorisait.

Lundi, le gouvernement letton avait estimé qu'Ilmars Rimsevics devait démissionner. "Je ne peux pas concevoir qu'un gouverneur de la Banque de Lettonie placé en détention pour une accusation aussi grave puisse continuer à travailler", a déclaré lundi le Premier ministre, Maris Kucinskis.

Le secteur financier letton est également fragilisé depuis quelques jours par des accusations de blanchiment d'argent et de violation des sanctions contre la Corée du Nord portées par les Etats-Unis contre la troisième banque de Lettonie, ABLV.

Le système bancaire de la Lettonie, pays balte ayant acquis son indépendance de l'Union soviétique en 1991, avant de rejoindre l'Union européenne en 2004, puis la zone euro en 2014, est dominé par des établissements nordiques.

Dans un document détaillant ses accusations contre ABLV, le département du Trésor américain écrit que la dépendance du système bancaire letton à l'égard des comptes détenus par des étrangers l'expose à un risque accru d'activités illégales.

Le Fonds monétaire international (FMI) a appelé à plusieurs reprises la Lettonie à la vigilance sur les dépôts de non résidents - essentiellement russes ou des pays de la CEI (ex-URSS) - et à renforcer ses mesures de protection contre le financement du terrorisme et le blanchiment d'argent. (Juliette Rouillon et Eric Faye pour le service français)