Le prix des actions des sociétés cotées de l’Eurostoxx représentait un peu plus de 9,5 fois leurs bénéfices lorsque l’indice était au plus bas et les inquiétudes au plus haut, l’année dernière. Aujourd’hui, nous atteignons un PER de 17x alors qu’il ne dépassait pas les 14x, juste avant que la crise n’explose. Les marchés européens semblent donc fortement surévalués, d’autant que la situation économique européenne et les bénéfices des sociétés ne s’améliorent pas. Les investisseurs ont besoin d’être confiants quant à la situation du continent pour tenir de tels niveaux de valorisation, ce qui n’est pas le cas.

Le CAC 40 ne fait pas exception et présente, actuellement, une valorisation d’environ 16 fois les bénéfices des sociétés, bien supérieure aux 15,3 fois lorsque l’indice était au plus haut, avant l’éclatement de la bulle des subprimes, et à la moyenne de 13,8x constatée au 21ème siècle. Les actions des 40 plus grosses capitalisations françaises présentent donc des niveaux de valorisation extrêmes, difficilement tenables quand on sait que la croissance a disparu en France.

Ces niveaux de prix pourraient, cependant, être maintenus si les bénéfices des entreprises allaient en s’améliorant. Malheureusement, l’indice est maintenant totalement décorrelé des résultats des entreprises qu’il représente. Les bénéfices par action moyens du CAC 40 sont en chute libre, depuis septembre 2011, date du début de la reprise de l’indice. Alors que ce dernier s’est apprécié d’environ 40%, les bénéfices ont chuté de 30% et le rendement des actions de 40%. Les opérateurs ne portent guère plus d’importance aux fondamentaux des sociétés, et ce n’est pas la récession du vieux continent qui va justifier leurs investissements.


Indice CAC 40 et BNA



Jaune : Cours du CAC 40
Blanc : Bénéfices nets par action moyens des sociétés du CAC 40


L’argent gratuit de la BCE profite aux marchés financiers au lieu d’être investi dans l’économie réelle. Les indices boursiers montent, les profits des entreprises baissent. La banque centrale revêt l’uniforme de pompier de l’économie et l’arrose de liquidités, qui se dirigent finalement trop peu vers les entreprises au profit des marchés financiers.

Les investisseurs ne se retrouvent plus dans la rémunération trop faible des taux d’emprunts d’État, causée par les rachats massifs de dette publique de la BCE. Ils se rabattent alors sur les actions, plus rémunératrices, en se souciant peu de leur valeur intrinsèque. Les investisseurs sont, logiquement, moins regardant puisqu’ils empruntent l’argent à un coût proche de zéro.

Mais que se passera-t-il  lorsque l’abondance de liquidités ne sera plus là pour justifier la hausse des bourses européennes ? Ni les statistiques européennes, ni les résultats des sociétés ne sont en mesure de prendre le relais et d'expliquer les niveaux de PER constatés actuellement.

L’économiste Nouriel Roubini, estime que les banques centrales sont en train « de créer une bulle de crédit et des actifs aussi importante que la précédente, sinon plus ». Une bulle est en formation et il n’y a que deux solutions pour que cette dernière disparaisse. Soit l’injection massive de liquidités profite enfin à l’économie réelle, à l’innovation, à la recherche & développement, aux bénéfices des sociétés et justifie finalement les niveaux de valorisation actuels ; soit Mario Draghi constate que les bienfaits de la politique monétaire accommodante sont limités et réduit sensiblement l’afflux de liquidités, éclatant par la même occasion la bulle créée par le BCE.

A la vue de la surévaluation des marchés européens et plus particulièrement du CAC 40, nous privilégierions les marchés américains. Ces derniers présentent une valorisation raisonnable, d’autant qu’ils disposent d’entreprises aux profits croissants et d’une situation économique rassurante, justifiant de telles appréciations de prix. Les bénéfices par action des sociétés composant l’indice américain S&P 500 se sont, en effet, appréciés de 15% depuis le mois de septembre 2011.

Ainsi, le PER du S&P 500 de 16x, légèrement inférieur aux 16,5x de moyenne constatés sur la dernière décennie, devrait être contenu par l’appréciation continue des profits. La valorisation d’avant crise de 18,9x ne devrait, par conséquent, pas être rejoint de sitôt.

Les marchés américains disposent d’une économie en phase de reprise, de sociétés de plus en plus rentables et donc d’un potentiel d’appréciation bien supérieur à leurs homologues du vieux continent.

S&P 500 et PER


Jaune : Cours du S&P 500
Bleu : PER moyen des sociétés du S&P 500
Ligne bleue en pointillés : PER moyen du S&P 500 sur les 10 dernières années