Qatar

PARIS (awp/afp) - Le fonds activiste Amber Capital a détrôné le fonds souverain du Qatar comme premier actionnaire de Lagardère, mettant ainsi un peu plus la pression sur le groupe d'édition et de distribution, dont il conteste la gestion.

Selon un avis publié vendredi par l'Autorité des marchés financiers (AMF), Amber contrôle désormais 13,98% du capital de Lagardère. Il passe ainsi devant le fonds souverain du Qatar qui, au dernier pointage, détenait 13,03% du capital.

En revanche, le Qatar reste devant en termes de droits de vote, avec 19,45% contre 10,48% pour Amber.

Dans l'avis, Amber explique qu'il envisage de poursuivre "l'acquisition de titres sur le marché ou dans une transaction privée", mais sans aller jusqu'au contrôle de Lagardère SCA.

Le fonds estime par ailleurs que, compte tenu des résultats financiers de la société, il est "essentiel de revoir la gouvernance actuelle de Lagardère SCA et sa stratégie". Dans ce but, il envisage de "solliciter la nomination d'un ou de plusieurs nouveaux membres au conseil de surveillance".

Amber avait déjà manqué en 2018 l'occasion de faire élire des représentants au conseil de surveillance, empêché à l'époque par le ralliement à la dernière minute du Qatar à Arnaud Lagardère.

15 millions de pertes

Contacté vendredi soir par l'AFP quant à ce changement d'actionnariat, le groupe Lagardère n'a pas souhaité faire de commentaire.

Mais Arnaud Lagardère, qui se prépare à recroiser le fer avec Amber lors de l'assemblée générale des actionnaires prévue le 5 mai, a annoncé jeudi la nomination au conseil de surveillance de deux poids lourds, l'ancien président de la République Nicolas Sarkozy et l'ex-patron de la SNCF Guillaume Pepy.

Une source proche du dossier avait alors indiqué que la nomination de Nicolas Sarkozy, intime d'Arnaud Lagardère et très proche du Qatar, et de Guillaume Pepy, également très impliqué dans les relations économiques avec l'État de la péninsule arabique, visait à resserrer les rangs autour du fils unique de Jean-Luc Lagardère avant l'assemblée générale.

Recentré sur l'édition et la distribution dans les lieux de transport à travers les enseignes Relay, le groupe Lagardère a publié jeudi un chiffre d'affaires 2019 de 7,2 milliards d'euros, en progression de 5% mais inférieur aux attentes du marché.

Il a enregistré une perte nette annuelle de 15 millions d'euros, attribuée notamment au changement de périmètre, la filiale Lagardère Sports dont la cession au fonds HIG Capital a été annoncée en décembre ayant entraîné un résultat négatif de 207 millions d'euros.

resserrer les rangs

Dans une société en commandite par actions (SCA) comme le groupe Lagardère, le conseil de surveillance, émanation des actionnaires, supervise la stratégie mise en oeuvre par le gérant commandité Arnaud Lagardère, qui détient 7,33% des actions et 10% des droits de vote.

En plus des critiques sur les cessions "à la casse" des actifs du groupe, Amber Capital a obtenu en octobre du tribunal de commerce de Paris qu'il ordonne la publication des comptes de la holding Lagardère Capital & Management (LC&M), qui détient la participation personnelle d'Arnaud Lagardère dans le groupe.

Le fonds souhaite notamment vérifier son niveau d'endettement, alors qu'un associé commandité est responsable indéfiniment des dettes de l'entreprise sur ses biens propres, et s'interroge sur l'utilisation et la destination des fonds versés par le groupe Lagardère à LC&M.

Arnaud Lagardère n'a pas obtempéré, ne montrant ses comptes qu'à un journaliste du Point lors d'un entretien en janvier, et a fait appel de la décision. Une audience est prévue en mars.

Il a également immédiatement contre-attaqué, accusant le fonds activiste de mener une "campagne de déstabilisation" et lui réclamant 84 millions d'euros en guise de réparation.

lrb/soe/pb