Philippe Gélin, votre principal pôle, Volaille France, a atteint un niveau de marge opérationnel record de 7%. Ce niveau est-il soutenable ?

"Défendre ce niveau de marge n’est pas une fin en soi : la volaille doit rester accessible au plus grand nombre. C’est pourquoi nos volumes promotionnels sont en net redressement depuis le début du semestre, c’est-à-dire le mois de Mai dernier, pour tendre vers notre niveau cible de 30%. En espérant que l’influenza aviaire nous permette de fournir les volumes suffisants, ce qui nécessite une vigilance permanente. De nombreuses spécialités (pintade, canard coquelet, caille, pigeon …) ont disparu des rayons à cause de cette pandémie, au profit de produits plus basiques et de concurrents, internationaux principalement. Il nous faut aujourd’hui reconquérir ces parts de marchés. Cela passe par les prix, mais également par l’intensification de nos investissements marketing et commerciaux. Pour toutes ces raisons, il convient d’être prudent quant au niveau de marge opérationnel atteint au premier semestre. Notre norme en matière de marge d’exploitation reste 5%, voire un peu plus si nous continuons d’évoluer vers davantage de produits élaborés."

Le vaccin contre la grippe aviaire pourrait-il résoudre définitivement ce risque sanitaire ? 

"A mon avis, le vaccin n’est qu’un moyen de protection complémentaire à la biosécurité et au plan de surveillance. En vaccinant systématiquement les canards, nous réduisons la contamination de cette famille qui est la plus à risque car un canard ne manifeste des signes de maladie que deux à trois semaines après sa contamination, contre moins de deux jours pour un poulet. Mais les risques de diffusion de la maladie, notamment via la faune sauvage, restent élevés."

Les produits Traiteur, à plus forte valeur ajoutée, dégagent paradoxalement une marge opérationnelle de seulement 2% au 1er semestre. Quel est le potentiel à moyen terme sur ce pôle ?

"Nous visons sur ce pôle de retrouver les 5% de marge opérationnelle que nous avons déjà réalisé deux années de suite. A ce stade, les hausses de tarifs passées, quoique significatives en début d’année, ne sont pas encore suffisantes pour retrouver ce niveau avant l’exercice 2024/2025. En effet, les matières premières ne sont pas orientées à la baisse et les autres intrants, surtout la main d’œuvre, ne devraient pas baisser."

LDC vise la place de n°1 en France dans le Traiteur. Peut-on s’attendre à une grosse acquisition ? Comment regardez-vous le rachat de Tipiak par Terrena, très présent par ailleurs sur la filière Volaille ?

"Nous avons étudié de très près cette cible dont les deux activités représentaient un intérêt élevé pour nous. L’offre de Terrena a été retenue pour des raisons de valorisation, notamment. Terrena est déjà concurrent sur la partie volailles, où il est un compétiteur performant, ce qui est bien pour LDC. Ils vont découvrir ce qui sera pour eux deux nouveaux métiers, avec des défis à relever dès 2024. Notre objectif de devenir n°1 reste bien d’actualité, et l’acquisition en cours de négociation des Délices de Saint-Léonard va dans ce sens. Nos capacités d’acquisitions, en combinant l’endettement et une éventuelle augmentation de capital, restent très significatives."

Le groupe compte investir 290 M€ cette année. De quels types d’investissements s’agit-il ?

"20% de l’enveloppe sont consacrés à la RSE : qualité de vie au travail, bien-être des animaux, environnement, etc.  20% sont des investissements de renouvellement de matériel, et les 60% restants sont plus structurants : productivité, rendement matière, capacité, innovation… A noter que ces 290 M€ intègrent pour la première année un investissement supplémentaire de 200 M€ sur quatre ans visant à réduire notre exposition à l’influenza aviaire. En particulier, il s’agit ici d’être capable de continuer de fournir, en cas de crise et moyennant des volumes croissants, les chaines de restauration rapides qui s’engagent à s’approvisionner en volailles françaises. Ainsi sommes nous en train d’investir massivement dans nos capacités en Normandie afin de pallier une épidémie qui toucherait plusieurs bassins de production en même temps. Globalement, avec un taux d’investissement de près de 5% cette année, nous atteignons de hauts niveaux d’investissement. Cela traduit notre confiance à long terme dans la demande de volaille, une viande compétitive qui creuse l’écart avec les autres viandes."

Vous indiquez viser près de 560 M€ d’EBITDA sur l’exercice 2026-2027, objectif qui devrait être dépassé dès 2023/2024. Comptez-vous actualiser cet objectif prochainement ?

"Nos objectifs 2026/2027 comportaient également le franchissement du cap des 7 milliards d’euros de chiffre d’affaires…La publication des résultats annuels 2023/2024, attendus supérieurs à 350 M€ en termes de résultat opérationnel courant, seront l’occasion de faire un point sur notre plan stratégique en cours."

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