par Patrick Vignal

PARIS, 22 février (Reuters) - Les votes d'Allianz Global Investors lors des assemblées générales en 2020 ont mis en lumière des disparités dans les standards de gouvernance, les propositions relatives à la rémunération restant les plus controversées au niveau mondial, indique une étude publiée lundi par la société de gestion.

Les votes ont montré un soutien fort aux résolutions d'actionnaires sur les sujets liés aux facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG), le dernier conditionnant les deux autres, dit à Reuters Marie-Sybille Connan, analyste ESG pour la société, l'un des principaux acteurs mondiaux de la gestion active.

"Sans bonne gouvernance, on peut se poser des questions sur les pratiques environnementales et sociales, d'où l'importance pour les investisseurs institutionnels de s'assurer que les entreprises ont de bonnes pratiques en la matière, avec une réduction des conflits d'intérêt potentiels et un bon niveau d'indépendance du conseil d'administration", dit-elle.

AllianzGI a participé à plus de 10.000 assemblées générales en 2020, exerçant ses droits de vote sur près de 100.000 résolutions d'actionnaires et de dirigeants dans un contexte troublé par la pandémie de coronavirus.

"Beaucoup d'assemblées générales se sont tenues à huis clos avec très peu d'interactivité et des résultats parfois connus à l'avance", déplore Marie-Sybille Connan avant d'espérer davantage de transparence en 2021.

"On va avoir une année sensible avec une crise sanitaire qui a des conséquences économiques majeures et qui a fait que tous les plans à trois ans des sociétés ont été complètement chamboulés", dit-elle. "La cohésion sociale est importante et il faut que l'effort de guerre soit partagé par tout le monde."

Le pourcentage des votes contre les résolutions sur la rémunération par pays en 2020 montrent un situation contrastée avec le Royaume-Uni en premier de la classe (12%), les Etats-Unis dans le rôle du cancre (74%) et la France plutôt bien classée (26%), selon des données fournies par AllianzGI.

"Il y a des disparités importantes, notamment en Europe où le niveau de transparence sur la rémunération des dirigeants, par exemple, est bien moindre en Allemagne qu'au Royaume-Uni ou en France", commente l'analyste, qui a participé aux assemblées générales pour la France.

"On a aussi un mauvais exemple aux Etats-Unis où le niveau de rémunération est très élevé en termes de montant, avec un faible alignement sur la performance des sociétés."

DES BONS POINTS POUR LEGRAND, CARREFOUR ET VEOLIA

AllianzGI a modifié ses lignes directrices de vote pour 2021 et examinera au cas par cas les propositions de rémunération généreuses lorsque les entreprises ont reçu une aide d'État directe importante, que des licenciements importants ont été enregistrés ou que les dividendes ont été réduits, lit-on dans un communiqué de la société.

Marie-Sybille Connan invite pour sa part à se méfier de la simplification sur certains sujets en insistant sur la nécessité pour les entreprises de pouvoir renforcer leur capital et sur l'effet bénéfique que peut avoir le versement d'un dividende.

"La question pour nous est surtout de s'assurer des grands équilibres au sein de la société, de s'assurer que la société ait les moyens financiers de traverser au mieux cette crise", dit-elle.

"Pour les dividendes, ils sont souvent perçus comme étant versés aux grandes fortunes mais ils permettent aussi de rémunérer les actionnaires individuels de long terme pour lesquels ils constituent un complément de revenus ou de retraite."

Parmi les bons élèves, elle cite Legrand, qui a coupé l'an dernier dans la rémunération de ses dirigeants et maintenu le versement d'un dividende en mettant en avant la nécessité de soutenir les petits porteurs.

"C'est un très bon exemple de bonne gouvernance, d'ESG et de bon équilibre entre toutes les parties prenantes", dit-elle.

L'analyste décerne également des bons points à Carrefour , qui a réduit son dividende et dont le PDG, Alexandre Bompard, a baissé la partie fixe de sa rémunération de 25% pendant les deux mois du confinement.

"Les enjeux sociaux, qui avaient tendance à être un peu en retrait par rapport aux enjeux de gouvernance et les sujets environnementaux, sont devenus plus importants avec la crise", poursuit Marie-Sybille Connan avant de louer la politique de Veolia, qui a développé l'actionnariat salarié et mené une réflexion sur son rôle et son utilité face aux attentes de la société.

(édité par Matthieu Protard)