PEKIN (Reuters) - La Chine a imposé mardi des mesures protectionnistes provisoires contre les importations de certaines catégories de spiritueux en provenance de l'Union européenne (UE), visant des entreprises comme Hennessy ou Rémy Martin, en représailles au projet de droits de douanes sur les véhicules électriques chinois adopté par les Vingt-Sept.

A partir du 11 octobre, les importateurs de spiritueux devront fournir ce que le ministère chinois du Commerce décrit comme des dépôts de garantie aux douanes chinoises lors de l'achat de leurs produits originaires de l'UE.

Ces dépôts de garantie augmenteront le prix de l'importation de spiritueux de l'UE.

Les marques de cognac Hennessy et Rémi Martin, avec des dépôts de garantie respectifs de 39% et 38,1%, sont parmi les plus touchées par les mesures du ministère chinois du Commerce.

En Bourse, LVMH, le fabricant de cognac Hennessy, perd 4,3% dans un contexte de recul généralisé des valeurs du luxe, un trader évoquant la crainte que le secteur soit visé à son tour par des mesures chinoises sur les importations.

"Le luxe recule sur des craintes qu'après le cognac, ce soit le tour du secteur du luxe et de l'automobile", a indiqué un trader basé à Milan. "Chaque fois qu'il y a un changement dans la réglementation douanière en Chine, il y a une réaction négative dans les secteurs les plus exposés à l'exportation".

Les deux principaux fabricants français de spiritueux, Rémy Cointreau, producteur du cognac Rémy Martin, et Pernod Ricard, reculent de 8% et 3,95% respectivement.

Les deux groupes, ainsi que le Bureau national interprofessionnel du cognac, n'ont pas répondu dans l'immédiat à une demande de commentaire.

REPRÉSAILLES CHINOISES

L'instauration de ces mesures provisoires intervient après la décision prise vendredi par la Commission européenne de maintenir son projet de droits de douane supplémentaires sur les importations de véhicules électriques chinois malgré des divergences entre les pays membres de l'UE, dont certains redoutent le déclenchement d'une guerre commerciale avec la Chine.

Les droits de douane proposés par Bruxelles vont de 7,8% pour Tesla à 35,3% pour SAIC et d'autres entreprises considérées comme n'ayant pas coopéré à l'enquête de l'UE.

La France, pays à l'origine de 99% des importations chinoises de cognac en 2023, est considérée comme la cible de l'enquête de Pékin, en raison de son soutien à l'imposition par Bruxelles de droits de douane supplémentaires sur les véhicules électriques chinois.

En août, avant le vote des Vingt-Sept sur les véhicules électriques chinois, la Chine avait suspendu son projet de mesures anti-dumping sur les spiritueux européens, malgré une enquête concluant que ces produits étaient vendus à des prix inférieurs à ceux du marché.

L'enquête du ministère chinois du Commerce révélait que les vendeurs de spiritueux de l'UE avaient vendu des eaux-de-vie de vin sur son marché (1,4 milliard de consommateurs) avec une marge comprise entre 30,6% et 39,0%, impactant ainsi son marché domestique.

Le ministère chinois du Commerce avait précisé que l'enquête devait prendre fin au plus tard le 5 janvier 2025 mais qu'elle pourrait être prolongée "dans des circonstances particulières".

Vendredi, la Commission européenne a déclaré vouloir continuer à négocier pour trouver une "solution alternative" avec la Chine concernant les droits de douane sur les véhicules électriques.

(Rédaction de Pékin, avec la contribution de Dominique Patton à Paris et Giancarlo Navach à Milan, version française Bertrand Boucey, Zhifan Liu et Diana Mandia, édité par Blandine Hénault)