La tension est montée d’un cran entre Tiffany (-0,66% à 115,10 dollars) et LMVH. Le joaillier américain a dénoncé les manoeuvres du groupe de Bernard Arnault pour annuler l'opération de rachat ou en faire baisser son prix (16,2 milliards de dollars, ou 135 dollars par action). Il a donc exhorté le tribunal du Delaware à trancher avant le 24 novembre, soit la date limite de finalisation de l'accord. Mais LVMH ne l’entend pas de cette oreille : il a déposé ses conclusions devant la cour du Delaware visant à ce qu’elle rejette la demande du joaillier.

Le numéro un mondial du luxe juge que " statuer dans un délai si court serait incompatible avec une administration de la justice dans la sérénité ". Il affirme qu'aucune " raison objective ne s'oppose à ce que le procès à venir ne se déroule dans un délai normal ".

" En demandant à la justice de statuer en urgence – et en communiquant de façon aussi fébrile que précipitée-, les dirigeants de Tiffany n'ont pour objectif que d'éviter d'avoir à répondre, notamment devant leurs actionnaires, de leur mauvaise gestion et de voir leurs arguments contre LVMH tomber les uns après les autres ", a ajouté LVMH.

De son côté, Tiffany reproche au groupe français de ne pas avoir honoré ses engagements, notamment pour solliciter dans les délais nécessaires les avis des autorités de la concurrence (lesquelles constituent des conditions à la réalisation de l'opération).

A l'évidence, le groupe new yorkais entend bien se faire racheter comme convenu, et ne semble même pas rechercher le paiement d'une indemnité compensatrice, qui pourrait pourtant porter sur des dizaines de millions de dollars, en cas d'annulation du deal.

En effet rappelle Edouard Waels, avocat associé – Partner chez Bignon Lebray, la Court of Chancery de l'Etat du Delaware est une juridiction civile qualifiée pour statuer sur ce qui est appelé aux Etats-Unis les " equitable claims ".

Cette procédure permet à la partie à l'initiative du recours de solliciter l'exécution forcée d'un accord et d'obtenir du tribunal un titre à cet effet (plutôt que l'obtention d'une indemnité par exemple).

"Sur la base des éléments en notre possession (et notamment la Motion for Expedited Proceedings que nous avons pu nous procurer), Tiffany a bien pour intention d'obtenir une exécution forcée dans le cadre d'une procédure accélérée", précise l'avocat.

Selon ce dernier, si LVMH n'était pas légitime dans ses prétentions (cas de force majeure ou changement significatifs défavorables), une exécution forcée du Merger agreement serait une hypothèse tout à fait plausible.

LVMH pourrait toujours sur une base transactionnelle proposer une indemnité compensatrice à Tiffany afin de l'amener à accepter la résolution de l'opération.

"On pourrait en telle hypothèse parler de très gros sous car si Tiffany obtient une décision qui lui est favorable (possibilité d'exécution forcée notamment), le rapport de force sera loin d'être idéal pour LVHM...", ajoute Edouard Waels.

Valeurs citées dans l'article : LVMH Moët Hennessy - Louis Vuitton SE, Tiffany & Co.