par Megha Rajagopalan

PEKIN, 7 septembre (Reuters) - Six mois après la disparition du Boeing de Malaysia Airlines, les familles des disparus, qui cherchent toujours à savoir ce qui s'est passé, estiment que les autorités chinoises sont devenues ouvertement hostiles à leur égard.

Lors d'interviews, plusieurs personnes ont raconté avoir été détenues et avoir été physiquement maltraitées par la police.

"Au début, la police de Pékin nous protégeait, mais son attitude a complètement changé", commente Cheng Liping, 38 ans, dont le mari avait pris le vol MH370. Elle dit ne pas comprendre les raisons de ce changement d'attitude.

Le Boeing 777, avec à son bord 239 passagers et membres d'équipage, a disparu le 8 mars après avoir décollé de la capitale malaisienne Kuala Lumpur à destination de Pékin. Environ les deux tiers des personnes à bord étaient chinoises.

Selon plusieurs témoignages, au moins deux personnes dont les enfants se trouvaient à bord du Boeing disparu ont été battues par des policiers. Dans un des cas, une femme d'une cinquantaine d'années a été hospitalisée trois jours.

"Je suis allée la voir à l'hôpital; j'ai vu des blessures à la tête et au corps", raconte Zhang Yongli, 64 ans, dont la fille se trouvait sur le vol MH370.

La police pékinoise n'a pas répondu aux demandes de commentaires.

Certaines familles disent avoir le sentiment que leur domicile est surveillé. La police a plusieurs fois procédé à des arrestations à un bureau d'information que le gouvernement a ouvert dans un quartier de la capitale où peuvent se rendre les familles pour s'informer au sujet de l'enquête.

Les détentions durent en principe 24 heures, signalent les familles et leurs avocats. La police a mis en avant des raisons diverses pour ces interpellations, indiquent les membres des familles, comme par exemple la réglementation contre les rassemblements importants.

SANS DONNER DE RAISON

Par deux fois, des enfants ont été incarcérés en même temps que des adultes de leur famille.

Dans au mois deux autres cas, racontés à Reuters par des proches, la police pékinoise est arrivée au domicile des familles avant l'aube et a procédé à des interpellations sans donner de raison.

Dans les semaines qui ont suivi la disparition du vol MH370, quand l'attention des médias était forte, la police assurait une présence constante à l'hôtel Lido à Pékin, où Malaysia Airlines avait installé les familles et tenait des réunions quotidiennes.

Mais l'histoire ne fait plus la une des journaux et les recherches se sont enlisées. Les autorités se sont montées moins coopératives, racontent les familles.

Cheng Liping, qui a deux jeunes fils et qui a elle même était retenue au bureau d'information, raconte qu'elle n'a aucun moyen d'avoir accès au compte bancaire de son mari en Malaisie et que les autorités des deux pays se sont montrées indifférentes à ses demandes.

"Ma vie a complètement changé", dit-elle. "Je ne parviens plus à travailler".

La plupart des membres des familles se rendent au bureau de d'information au moins une fois par semaine. Pour certains, c'est un trajet de plusieurs heures. Comme Cheng Liping, ils sont nombreux à avoir quitté leur emploi.

Laissés sans explications, les proches des victimes sont nombreux à estimer que les Etats-Unis ou d'autres puissances cachent des informations.

"Cela ne fait aucun doute dans mon esprit qu'Obama est au courant", estime Liu Wanyi, 26 ans, nouvelle mariée dont l'époux était dans l'avion de la Malaysia.

"Aucune des parties responsables ne fournira de preuve de ce qui s'est passé, dit-elle. Qui sait quelle est la motivation derrière tout cela?" (Avec Joseph Campbell et Reuters Pictures; Danielle Rouquié pour le service français)