Paris (awp/afp) - Le week-end s'annonce compliqué dans les gares françaises: une grève lancée par un collectif de contrôleurs a contraint la SNCF à annuler 60% de ses TGV et Intercités de vendredi à dimanche. Et de nouvelles perturbations sont redoutées lors des fêtes de fin d'année.

"Bon, c'est pas grave. Ils vont me rembourser ou trouver une solution", lâche, serein, un voyageur qui dit "comprendre" les grévistes. Avec des dizaines d'autres, Bruno Vojtisek fait la queue devant la boutique SNCF de la gare de Lyon à Paris pour changer son billet destination Aix pris la veille, mais pourtant absent des panneaux d'information.

Tous ne sont pas aussi philosophes. "C'est honteux !", s'exclame, en colère, Régis Vanstracelle, dont le train pour Saint-Raphaël est annulé. "Je ne peux pas comprendre ça, je suis dans le transport routier et je travaille parfois 12-15 heures par jour", s'agace-t-il, alors que ses rendez-vous prévus à destination sont menacés.

Les contrôleurs - aussi appelés chefs de bord ou ASCT à la SNCF - ont décidé de cesser le travail pendant tout le week-end pour réclamer une meilleure reconnaissance de leur statut. La SNCF envisage une "reprise progressive" du trafic lundi. L'axe Atlantique est particulièrement touché, avec seulement 1 TGV sur 4 en circulation notamment.

"Au total, on est plus de 80% à être en grève et plus de 90% sur le TGV, c'est du jamais-vu", a assuré à l'AFP Nicolas Limon, un des six membres fondateurs du Collectif national ASCT (CNA). Lancé en septembre sur Facebook hors de tout cadre syndical, il compte aujourd'hui près de 3.000 membres.

Les syndicats Unsa-Ferroviaire, SUD-Rail, CFDT-Cheminots et FO-Cheminots ont depuis apporté leur soutien au mouvement. Mais pas la CGT-Cheminots.

"Un peu surpris"

Les presque 10.000 contrôleurs de la SNCF, dont près de 3.000 travaillent à bord des TGV et Intercités, assurent une mission essentielle pour la sécurité de la circulation et des voyageurs. Sans eux, les trains ne peuvent pas rouler.

"La direction n'a pas pris la mesure de la grogne", a déclaré à l'AFP Rénald Szpitalnik, élu SUD-Rail et contrôleur dans le TGV Paris-Milan. Le collectif a été reçu à deux reprises par la direction, mais sans avancées concrètes, avant de mettre sa menace de grève à exécution.

"C'est une grève qu'on n'a pas vu arriver, ni nous ni les syndicats", a affirmé jeudi le PDG de la SNCF, Jean-Pierre Farandou. "On a été un peu surpris par ce mouvement", a-t-il dit.

"On n'est pas considérés comme des personnels roulants, alors qu'on travaille trois week-ends par mois et qu'on ne dort pas chez nous dix soirs dans le mois", a expliqué Nicolas Limon.

Avec le CNA, il réclame l'intégration de diverses primes au salaire de base afin qu'elles soient prises en compte dans le calcul de la retraite. Ces primes indexées sur l'activité ne sont pas versées lors des arrêts maladie ou congés, dénonce aussi le cheminot.

Grève unitaire

La direction dit avoir proposé "une augmentation de la prime de travail de 600 euros par an pour tous les chefs de bord", une intégration "partielle" de celle-ci "au salaire fixe en 2024", "l'accélération de la progression de la rémunération" et "le passage à deux chefs de bord par rame pour tous les TGV Inoui d'ici trois ans".

Des propositions qui n'ont pas calmé la mobilisation.

"Les mesures annoncées sur un certain nombre de points vont dans le bon sens", admettent SUD-Rail et la CFDT-Cheminots dans un communiqué, mais "les réponses concernant la reconnaissance du métier et sa valorisation", ainsi que les propositions "sur le déroulement de carrière n'ont pas été jugées satisfaisantes par les agents concernés".

Les syndicats, en soutien du collectif, ont déposé un préavis de grève pour les week-ends de Noël et du Nouvel An afin de mettre la pression sur la SNCF, mais "on fera le maximum pour qu'il n'y ait pas de grève à Noël", a promis Nicolas Limon.

Cette mobilisation survient à la veille du début des négociations annuelles obligatoires sur les salaires qui doivent s'engager mercredi au niveau du groupe SNCF. CGT, SUD-Rail et CFDT ont appelé à une "grève unitaire" ce jour-là.

afp/lk