Déposée sous la présidence Trump, la plainte remonte à cinq ans. Le procès s’ouvre dans un contexte tendu pour le géant californien, déjà confronté à une centaine d’assignations en justice en France pour pratiques déloyales, à des polémiques autour de son IA, à des accusations de violation de droits d’auteur et à des plaintes pour publicités trompeuses.
Une procédure aux conséquences majeures
Le procès tournera largement autour d’une question décisive : TikTok et YouTube font-ils partie du même marché que Facebook et Instagram ? Pour la FTC, Meta domine les “réseaux sociaux personnels”, un segment qu’elle isole en excluant ces deux géants de la vidéo. À l’inverse, Meta fonde sa défense sur leur inclusion, affirmant qu’ils captent le même public, le même temps d’attention, et concurrencent directement ses produits. Ce débat sur la définition du marché sera au cœur des huit semaines d’audience.
Zuckerberg, habitué des tribunaux, fait face cette fois à un enchaînement de procédures inédit. Il a témoigné lundi pendant trois heures, principalement sur les débuts de Facebook, et doit de nouveau comparaître ce mardi. Sa défense entend prouver que le succès d’Instagram et WhatsApp tient aux investissements massifs de Meta, et non à une stratégie anticoncurrentielle.
L’enjeu est de taille : Instagram est aujourd’hui la plateforme la plus rentable du groupe, en termes de revenus par utilisateur et représente 50% des revenus publicitaires du groupe aux Etats-Unis.
Mark Hansen, l’avocat de Meta, affirme que ces acquisitions visaient à “faire grandir et améliorer les entreprises” et ne sauraient être qualifiées d’illégales. Il les décrit comme des “réussites” profitables aux consommateurs.
Un procès sous haute tension
Prévu pour durer huit semaines, le procès tournera en grande partie autour de la définition du marché. La FTC considère que Meta domine les “réseaux sociaux personnels” , des plateformes dédiées aux échanges entre proches et exclu TikTok et YouTube, pourtant au cœur de la stratégie de défense de Meta pour démontrer la présence d’une réelle concurrence.
À la barre, Zuckerberg a reconnu que la mission de connecter les proches reste importante pour Meta, mais qu’elle est devenue secondaire : “Les connexions avec les proches représentent une part de moins en moins grande de notre organisation”, a-t-il indiqué.
Ce dossier s’inscrit dans une offensive plus large des autorités américaines contre les géants de la tech. Google (Alphabet) a été reconnu coupable d’abus de position dominante l’an dernier, tandis qu’Apple et Amazon font actuellement l’objet de procédures similaires.
Les débuts d’Instagram au cœur du dossier
Les débuts d’Instagram intriguent particulièrement les enquêteurs. Mark Zuckerberg a été interrogé sur ses inquiétudes de l’époque, alors que Facebook peinait à développer sa propre application photo, rapidement abandonnée. La FTC s’appuie notamment sur des courriels internes de 2011 et 2012. Dans l’un d’eux, il écrivait : “L’impact potentiel d’Instagram est vraiment effrayant, et c’est pourquoi nous devrions envisager de payer beaucoup d’argent.”
L’agence fédérale cherche à démontrer que le quasi-monopole de Meta sur les réseaux sociaux personnels a nui à l’expérience utilisateur : surcharge publicitaire, modifications imposées, manque d’alternatives.
Malgré sa victoire contre Google, la FTC a connu plusieurs revers, notamment son échec à bloquer le rachat de Within par Meta ou celui d’Activision Blizzard par Microsoft.
Un climat judiciaire tendu
Parallèlement à ce procès, la FTC et le ministère de la Justice mènent quatre autres actions contre les géants du numérique. Amazon, Apple et Google (Alphabet) sont aussi visés, ce dernier sera de nouveau au tribunal dès la semaine prochaine, dans une affaire liée à une possible revente forcée de Chrome.
Meta, elle, est accusée par plusieurs médias français de violer le RGPD, ce qui lui aurait conféré un avantage injuste sur le marché publicitaire. Des auteurs britanniques l'accusent aussi d’avoir utilisé illégalement leurs œuvres pour entraîner ses IA. Le lancement forcé de Meta AI sur WhatsApp a enfin fait l’objet d’une plainte européenne le 8 avril. Malgré ces polémiques, le groupe prévoit d’investir 65 milliards de dollars dans l’intelligence artificielle d’ici 2025.