Le groupe au losange, qui a publié jeudi ses derniers résultats annuels de l'ère Ghosn, a fait état d'un chiffre d'affaires en baisse de 2,3% à 57,42 milliards d'euros, mais en hausse de 2,5% si l'on exclut l'impact devises.

Les changes ont amputé de 2,2 milliards d'euros les ventes de l'exercice, pour moitié à cause du peso argentin, et de 572 millions d'euros le bénéfice opérationnel du groupe.

Le constructeur a également souffert d'une forte baisse de 946 millions d'euros des ventes à ses partenaires, imputable à l'arrêt du marché iranien et à la crise du diesel qui a fait chuter ses ventes de moteurs à Nissan ou Daimler. Le chiffre d'affaires est ressorti en dessous du consensus Infront Data pour Reuters qui donnait 58 milliards.

Le résultat opérationnel du groupe a reculé de 6,3% à 3,612 milliards d'euros, donnant une marge de 6,3% (-0,3 point), supérieur cette fois au consensus (3,52 milliards).

Renault tablait pour sa part sur une hausse de son chiffre d'affaires à changes constants en 2018 et sur une marge opérationnelle supérieure à 6%. En 2019, il prévoit une nouvelle croissance organique de ses ventes, mais cette fois une marge de l'ordre de 6%.

A 14h21, le titre progressait de 3,2292% à 58,5 euros, surperformant ainsi nettement l'indice sectoriel européen (+0,03%).

"Les résultats commerciaux et financiers démontrent la résilience de l'entreprise et sa rapidité à s'adapter à un environnement plus difficile", a déclaré Thierry Bolloré, nouveau directeur général de Renault, au cours d'une conférence de presse.

Le groupe, qui réalise désormais plus de la moitié de ses ventes hors d'Europe, fait référence notamment à la situation des marchés argentin et turc. En 2019, il s'attend à une stagnation du marché mondial et européen, mais cette dernière prévision n'intègre pas les perturbations qui ne manqueraient pas d'accompagner un Brexit sans accord.

Malgré les incertitudes ambiantes, Renault a également confirmé les objectifs moyen terme de son plan "Drive the future", un chiffre d'affaires supérieur à 70 milliards d'euros et une marge opérationnelle de plus de 7% à l'horizon 2022.

"VINGT ANS D'AVENTURE"

Le bénéfice net, part du groupe, a chuté de 36,6% à 3,3 milliards d'euros, reflet principalement d'une chute de la contribution du partenaire japonais Nissan. Cette contribution avait été dopée en 2017 par une plus-value liée à la vente de l'équipementier Calsonic. Le consensus Infront Data donnait un bénéfice net de 3,85 milliards.

Nissan a revu mardi à la baisse ses objectifs annuels en vue d'une contraction des ventes automobiles dans le monde, tout en disant avoir inscrit dans ses comptes du troisième trimestre une charge de 9,232 milliards de yens (74 millions d'euros) liée à la rémunération de Carlos Ghosn.

Renault ne prévoit pas de passer de telles provisions concernant son ex-PDG, incarcéré au Japon depuis novembre et remplacé à son poste le 24 janvier dernier.

L'ombre de l'ancien homme fort du groupe a longtemps plané sur la conférence de presse. "Vingt ans d'aventure de croissance, d'une telle originalité, d'une telle singularité dans le secteur automobile, c'est quelque chose qui nous marque tous", a déclaré Thierry Bolloré. "La question était de savoir comment nous allions continuer (...) mais notre responsabilité à tous, c'est de poursuivre l'oeuvre."

"Le meilleur hommage qu'on puisse rendre à notre ancien PDG, ce sont nos résultats et c'est notre détermination à exécuter le plan stratégique", a-t-il ajouté. "Et faire en sorte que l'alliance (avec Nissan) soit irréversible et un outil de progrès pour l'ensemble des entreprises."

Malgré l'anxiété que l'affaire Ghosn a suscitée en interne, elle n'a rien changé aux projets et aux décisions de l'alliance, a poursuivi Thierry Bolloré. Il en veut pour preuve que la nouvelle plateforme commune des petites voitures Renault et Nissan, baptisée "CMF B", est en ligne avec le calendrier prévu et sera inaugurée prochainement avec la Clio 5, révélée en mars au salon de Genève.

(Edité par Jean-Michel Bélot et Benoît Van Overstraeten)

par Gilles Guillaume et Laurence Frost