BUDAPEST, 11 mai (Reuters) - La Hongrie a proposé mercredi que l'embargo qu'envisage l'Union européenne sur le pétrole russe ne concerne pas les livraisons par oléoduc mais uniquement les livraisons par transport maritime, sans faire état d'avancées dans ses discussions avec Bruxelles.

Budapest s'oppose au projet d'embargo présenté la semaine dernière par la Commission européenne dans le cadre d'un sixième train de sanctions contre Moscou depuis l'invasion russe en Ukraine au motif qu'il "détruirait" l'économie hongroise. Ce veto hongrois bloque l'adoption de nouvelles mesures de rétorsion, qui doivent être approuvées à l'unanimité.

Dans une vidéo postée sur les réseaux sociaux, le ministre hongrois des Affaires étrangères, Peter Szijjártó, a déclaré qu'un accord entre son pays et l'UE paraissait encore lointain et qu'une solution acceptable pour la Hongrie se chiffrerait en centaines de millions de dollars.

"Bruxelles n'a pas de proposition pour une solution", a-t-il dit, affirmant comme le Premier ministre Viktor Orban que le projet d'embargo proposé par la Commission reviendrait à larguer une "bombe atomique" sur l'économie hongroise.

Viktor Orban s'est entretenu lundi avec la présidente de la Commission Ursula von der Leyen, mardi avec le président français Emmanuel Macron, dont le pays préside actuellement l'UE.

Les discussions avec Ursula von der Leyen ont notamment porté sur un accroissement des investissements dans les infrastructures pétrolières de la Hongrie.

"Nous attendons qu'une telle proposition concerne non seulement la transformation de nos raffineries qui coûte des centaines de millions de dollars, non seulement l'augmentation de capacité de l'oléoduc croate qui coûtera plusieurs centaines de millions de dollars, mais concerne aussi l'avenir de l'économie hongroise", a cependant prévenu Peter Szijjártó.

Le chef de la diplomatie hongroise a également estimé que la seule voie pour un accord passait par une exemption des livraisons de pétrole russe par pipeline, alors que les importations en provenance de Russie via l'oléoduc Droujba couvrent environ 65% des besoins de la Hongrie.

Une telle exemption profiterait au groupe pétrolier hongrois MOL, qui engrange actuellement de copieux bénéfices en utilisant du pétrole russe de l'Oural pour ses raffineries, bien moins cher que le Brent. La différence entre le baril d'Oural et de Brent est actuellement d'environ 34-35 dollars.

MOL estime qu'il lui faudrait au moins 2 à 4 ans et de 500 à 700 millions de dollars pour mener à bien la transformation de ses deux raffineries de Hongrie et Slovaquie afin qu'elles ne dépendent plus du pétrole brut acheminé par l'oléoduc Droujba.

Mais accorder à MOL plusieurs années de dérogation à l'embargo ainsi que des indemnités financières pour améliorer ses infrastructures reviendrait à remettre en cause les règles européennes sur la concurrence libre et équitable. (Reportage Krisztina Than; version française Jean-Stéphane Brosse, édité par Kate Entringer et Matthieu Protard)