L'Autorité des marchés financiers attire l'attention des épargnants sur la prorogation, sous réserve de plusieurs ajustements, des mesures particulières organisant la tenue des assemblées générales dans le contexte de la crise sanitaire. Elle encourage les sociétés cotées à suivre certaines bonnes pratiques.

En raison de la persistance de la crise sanitaire et des mesures prises pour y répondre, le gouvernement a pris - par une ordonnance du 2 décembre 2020 - diverses dispositions aux fins de proroger l'ordonnance du 25 mars 2020.

L'ordonnance du 25 mars 2020 a permis de simplifier et d'adapter les règles de convocation, d'information, de réunion et de délibération des assemblées générales. Elle visait à permettre aux organes des entités concernées de continuer d'exercer leurs missions malgré les mesures de confinement et ainsi d'assurer la continuité du fonctionnement de ces entités. En particulier, l'ordonnance du 25 mars 2020 a autorisé, de façon exceptionnelle et temporaire, la tenue des assemblées à huis clos, c'est-à-dire sans que leurs membres - et les autres personnes ayant le droit d'y assister, tels que les commissaires aux comptes et les représentants des instances représentatives du personnel - n'y participent physiquement.

Au-delà de la prorogation qu'elle opère, l'ordonnance du 2 décembre 2020 apporte plusieurs modifications à l'ordonnance du 25 mars 2020, en renforçant certains droits des actionnaires dans le cadre des assemblées générales à huis clos.

D'abord, l'ordonnance du 2 décembre 2020 limite la possibilité d'organiser une assemblée à huis clos aux cas dans lesquels les mesures restrictives en vigueur à la date de la convocation de l'assemblée ou à la date de sa réunion font effectivement et concrètement obstacle à la présence physique de ses membres.

Désormais, deux conditions cumulatives doivent être satisfaites pour pouvoir organiser une assemblée à huis clos :

  • Première condition : « à la date de la convocation de l'assemblée ou à celle de sa réunion, une mesure administrative limitant ou interdisant les déplacements ou les rassemblements collectifs pour des motifs sanitaires fait obstacle à la présence physique à l'assemblée de ses membres ».
  • Seconde condition : l'assemblée générale doit se tenir pendant la durée d'application de l'ordonnance du 2 décembre 2020, c'est-à-dire jusqu'au 1er avril 2021 inclus (sauf prolongation, par voie de décret en Conseil d'Etat, jusqu'à une date butoir fixée au 31 juillet 2021).

En second lieu, l'ordonnance du 2 décembre 2020 fait désormais obligation aux émetteurs d'assurer « la retransmission de l'assemblée en direct, à moins que des raisons techniques rendent impossible ou perturbent gravement cette retransmission ». Cette retransmission intervient en format vidéo ou, à défaut, en format audio. Les actionnaires doivent être informés par la société des conditions dans lesquelles ils peuvent assister à la retransmission de l'assemblée, soit dans la convocation, soit, en cas de basculement d'une assemblée générale « en présentiel » vers une assemblée générale à huis clos, dans le communiqué ad hoc par lequel ils sont informés du changement du mode de tenue de l'assemblée générale. Contrairement à la rediffusion de l'assemblée générale en différé, cette retransmission en direct n'intervient pas nécessairement sur le site internet de la société (par exemple, en cas d'ouverture d'un flux audio).

Les émetteurs doivent également assurer une rediffusion de l'assemblée en différé sur leur site internet « dès que possible à l'issue de l'assemblée, et au plus tard avant la fin du cinquième jour ouvré à compter de la date » de l'événement. Là encore, cette rediffusion intervient en format vidéo ou, à défaut, en format audio. Cette rediffusion doit demeurer disponible pendant au moins deux ans.

En outre, l'ordonnance du 2 décembre 2020 et le décret n° 2020-1614 du 18 décembre 2020 renforce les droits des actionnaires en matière de questions écrites :

  • le délai dont les actionnaires disposent pour poser des questions écrites est allongé. Désormais, « les questions écrites sont prises en compte dès lors qu'elles sont reçues avant la fin du second jour ouvré précédant la date de l'assemblée générale » ;
  • l'ensemble des questions écrites et des réponses qui y sont apportées (y compris en séance) doivent être publiées dans la rubrique du site internet de la société consacrée aux questions-réponses « dès que possible à l'issue de l'assemblée, et au plus tard avant la fin du cinquième jour ouvré à compter de la date de l'assemblée ».

Ces obligations de rediffusion de l'assemblée générale en direct et en différé, et de publication des questions écrites et de leurs réponses sur le site internet, perdurent lorsque, après avoir d'abord décidé que l'assemblée se tiendrait à huis clos, l'organe compétent pour convoquer l'assemblée décide finalement que les membres de l'assemblée et les autres personnes ayant le droit d'y assister peuvent être présents physiquement.

Par ailleurs, des règles spécifiques sont prévues pour la désignation des scrutateurs : deux scrutateurs sont désignés par l'organe compétent pour convoquer l'assemblée parmi les dix actionnaires disposant du plus grand nombre de droits de vote dont la société a connaissance à la date de convocation de l'assemblée. En cas d'absence de réponse ou de refus de leur part, les scrutateurs peuvent être choisis en dehors des actionnaires. Les actionnaires doivent être informés de l'identité et de la qualité des personnes désignées dès que possible et par tous moyens (par exemple, dans les documents de convocation ou dans un communiqué de presse).

Enfin, le décret du 18 décembre 2020 prévoit que le procès-verbal des décisions de l'organe compétent pour convoquer l'assemblée doit comporter certaines mentions, ce qui implique que cet organe doit examiner les éléments en question :

  • s'il est décidé de tenir l'assemblée à huis clos, le procès-verbal doit préciser « les considérations de droit et de fait qui fondent cette décision, en particulier la nature de la mesure administrative » qui justifie la tenue de l'assemblée à huis clos ;
  • si, alors que les membres de l'assemblée sont privés de la possibilité d'y participer physiquement, il est décidé qu'ils n'auront pas non plus la possibilité d'y participer par voie de conférence téléphonique ou audiovisuelle, le procès-verbal doit en préciser les raisons ;
  • enfin, le procès-verbal doit préciser la façon dont il a été fait application des dispositions relatives à la désignation des scrutateurs en cas de tenue de l'assemblée à huis clos.

Ces informations doivent être « portées à la connaissance des actionnaires et des autres personnes ayant le droit d'assister à l'assemblée, dès que possible et par tous moyens permettant d'assurer leur information effective ».

Ces dispositions sont applicables jusqu'au 1er avril 2021. Elles pourront ainsi s'appliquer aux réunions des assemblées et des autres organes collégiaux tenues jusqu'à cette date, dès lors que leurs conditions d'application seront satisfaites. En cas de persistance de la crise sanitaire et des mesures restrictives prises pour y répondre, l'application de tout ou partie de ces règles pourra être prolongée à nouveau, par voie de décret en Conseil d'Etat, jusqu'à une date butoir fixée au 31 juillet 2021.

L'AMF attire l'attention des actionnaires et des sociétés cotées sur le fait que ni l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020, qui avait apporté des adaptations aux délais de procédure, ni l'ordonnance n° 2020-318 du 25 mars 2020, qui avait apporté des adaptations aux délais prévus par la loi pour l'établissement, la présentation ou l'approbation des comptes, n'ont été prorogées à ce stade.

Conformément à ses recommandations antérieures, l'AMF encourage vivement les actionnaires à exercer leur droit de vote, prérogative fondamentale de l'actionnaire, essentielle au bon fonctionnement et à une saine gouvernance des émetteurs.

Un vote exclusivement à distance en cas d'assemblée générale à huis clos, et sauf cas particulier, à exprimer avant l'assemblée générale

Dans un contexte persistant de crise sanitaire, les assemblées générales 2021 pourraient donc se tenir à nouveau à huis clos, hors la présence des actionnaires, jusqu'au 1er avril 2021, voire jusqu'au 31 juillet 2021.

En conséquence, dans une telle hypothèse, les actionnaires ne pourront exercer leur droit de vote qu'à distance, avant l'assemblée générale, à savoir en :

  • votant par correspondance via un formulaire de vote ;
  • donnant un mandat de vote (également appelé « procuration ») à une personne de son choix ou à l'émetteur sans indication de mandataire (pouvoir « en blanc ») ;
  • votant sur Internet via une plateforme de vote sécurisée, si cette modalité de vote est prévue par la société cotée. En pratique, ce vote s'exerce avant l'assemblée générale.

S'agissant du mandat de vote, un dispositif spécifique a été prévu par le décret du 10 avril 2020 (tel que modifié par le décret du 18 décembre 2020) pour les assemblées générales à huis clos. Ce dispositif permet aux mandataires d'exercer à distance les droits de vote pour lesquels ils auraient reçu pouvoir. Il s'applique uniquement aux pouvoirs avec indication de mandataire. Il est rappelé que « pour toute procuration d'un actionnaire sans indication de mandataire, le président de l'assemblée générale émet un vote favorable à l'adoption des projets de résolution présentés ou agréés par le conseil d'administration ou le directoire, selon le cas, et un vote défavorable à l'adoption de tous les autres projets de résolution ».(1)

Pour le mandant (c'est-à-dire l'actionnaire qui a donné le pouvoir), il convient :

  • d'informer le mandataire dès que possible de ce que le pouvoir lui est donné, afin que ce dernier puisse à son tour se conformer à ses obligations ;
  • d'adresser le pouvoir à la société. Le pouvoir doit être établi conformément aux règles normalement applicables. Il doit en principe être adressé par voie postale. Si la société le prévoit, il peut également être adressé par message électronique. Il doit parvenir à la société au plus tard à minuit le quatrième jour précédant la date de l'assemblée générale. Ce délai déroge au délai plus long normalement applicable à l'envoi des mandats par voie électronique (lesquels peuvent normalement parvenir à la société jusqu'à 15 heures, heure de Paris, la veille de l'assemblée générale).

S'agissant du mandataire (c'est-à-dire la personne à qui l'actionnaire a donné le pouvoir), il convient d'adresser les instructions pour l'exercice des droits de vote pour lesquels il a reçu mandat à la société (ou à l'intermédiaire habilité par elle), par message électronique, à l'adresse indiquée à cet effet par la société (ou l'intermédiaire). Ces instructions doivent prendre la forme du formulaire de vote par correspondance. Elles doivent être adressées à la société (ou à l'intermédiaire) au plus tard le quatrième jour précédant la date de l'assemblée.

L'AMF attire l'attention des actionnaires sur les difficultés pouvant résulter, dans le contexte d'une assemblée générale tenue à huis clos, du recours au pouvoir donné à une personne de son choix (hors « pouvoir en blanc »). En cas de question, les actionnaires qui souhaiteraient utiliser cette modalité de vote sont invités à contacter, au préalable, la société concernée au sujet du traitement réservé à ces mandats de vote.

En outre, par dérogation au droit commun, un actionnaire ayant déjà exprimé son vote à distance, envoyé un pouvoir ou demandé sa carte d'admission ou une attestation de participation, a la faculté de choisir un autre mode de participation à l'assemblée. A une condition toutefois : que ses instructions parviennent à la société dans les délais prévus par la réglementation. Les précédentes instructions reçues sont alors révoquées.

Dans la mesure où ces modalités de vote doivent toutes être mises en œuvre par les actionnaires en amont de l'assemblée générale, l'AMF les invite à s'informer au plus tôt auprès des sociétés sur les modalités de participation prévues dans ce contexte. Les actionnaires doivent impérativement prendre en compte les délais impartis pour exercer leurs droits de vote avant l'assemblée. Ils peuvent pour cela consulter le site internet des sociétés cotées et les communiqués publiés.

De bonnes pratiques à destination des émetteurs

Le dispositif dérogatoire introduit par l'ordonnance du 25 mars 2020 (telle que modifiée) prévoit un dispositif spécifique pour le cas où une assemblée dont il était initialement prévu qu'elle se tienne en présentiel se tient finalement à huis clos. Ce dispositif vaut également dans le cas où une assemblée, initialement prévue à huis clos, se tient finalement en présentiel.

Si la décision est prise alors que les formalités de convocation n'ont pas encore commencé, l'information des membres de l'assemblée (ainsi que celle des autres personnes ayant le droit d'y assister) peut être assurée par ces formalités de convocation.

Si, au contraire, la décision est prise alors que les formalités de convocation ont déjà commencé, un régime spécifique d'information des membres de l'assemblée (et des autres personnes ayant le droit d'y assister) est prévu :

  • les formalités déjà accomplies n'ont pas à être renouvelées ;
  • les membres de l'assemblée sont informés par tous moyens permettant d'assurer leur information effective, trois jours ouvrés au moins avant la date de l'assemblée. Dans les sociétés cotées, l'information des membres de l'assemblée est assurée par voie de communiqué faisant l'objet d'une diffusion effective et intégrale dans les mêmes délais. Dans tous les cas, l'information porte sur la façon dont l'assemblée est tenue (à huis clos ou en présentiel, selon le cas), la date, l'heure et le lieu de l'assemblée le cas échéant ; elle comprend en outre une description claire et précise des conditions dans lesquelles les membres de l'assemblée pourront exercer l'ensemble de leurs droits (en particulier le droit de voter) ;
  • les formalités restant à accomplir le sont dans les conditions ordinaires.

Afin d'assurer une information appropriée des actionnaires et d'accompagner au mieux les sociétés cotées dans ce contexte exceptionnel et difficile, l'AMF encourage les émetteurs à suivre les bonnes pratiques suivantes :

  • mettre en place, le plus tôt possible en amont de l'assemblée générale, une communication claire, précise et accessible à l'attention de l'ensemble des actionnaires concernant :
    • les modalités particulières de tenue de l'assemblée générale dans le contexte de crise sanitaire (rappelant que l'assemblée se tiendra à huis clos, sans présence des actionnaires),
    • les différentes modalités d'information des actionnaires (et notamment de consultation des documents relatifs à l'assemblée générale, y compris la liste des actionnaires),
    • les différentes modalités de participation possibles, mentionnant notamment :
      • les modalités pour poser des questions en amont de l'assemblée générale,
      • le cas échéant, l'impossibilité de poser des questions pendant l'assemblée générale,
      • le cas échéant, l'impossibilité de proposer des résolutions nouvelles pendant l'assemblée générale,
    • les différentes modalités de vote disponibles.
  • permettre aux actionnaires de voter sur Internet via une plateforme de vote sécurisée.
  • mettre en évidence, sur la page d'accueil du site internet de l'émetteur, un lien vers les pages dédiées à l'assemblée générale afin de permettre aux actionnaires de trouver sans difficulté l'information pertinente.
  • mentionner sur les pages du site internet dédiées à l'assemblée générale les informations appropriées concernant les modalités particulières de tenue de l'assemblée générale et de participation des actionnaires, dans le contexte de crise sanitaire.
  • informer directement par voie électronique (email), lorsque l'adresse électronique est connue de l'émetteur, les actionnaires au nominatif des modalités particulières de vote et de tenue de l'assemblée générale. Cette information ne dispense pas du respect des obligations d'information des actionnaires au nominatif par voie postale auxquelles l'émetteur est tenu.
  • compte tenu de l'impossibilité pour les actionnaires de se rendre, dans le contexte actuel, au siège de l'émetteur pour consulter les documents concernant l'émetteur qu'ils sont en droit de consulter, permettre aux actionnaires, lorsque cela est possible, d'exercer leur droit à communication en leur adressant - sur demande et par email - une copie des documents qui ne sont pas accessibles sur le site Internet de l'émetteur.

En outre, l'AMF recommande aux teneurs de comptes-conservateurs d'informer, le plus tôt possible, leurs clients des modalités particulières de vote et de tenue des assemblées générales.

Enfin, dans un contexte d'assemblées générales tenues à huis clos pouvant donner lieu, en amont de la tenue de celles-ci, à une connaissance, par les émetteurs, des résultats des votes concernant des projets de résolution susceptibles d'influencer de façon sensible le cours des instruments financiers concernés, il est rappelé aux émetteurs leur obligation - résultant du règlement européen sur les abus de marché - de rendre publiques, dès que possible, les informations privilégiées qui les concernent.

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